Chapitre 3

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La nuit était tombée, et seules les bougies éclairaient le temple d'Hëlia. Agenouillée sur le sol, Iseult observait l'impressionnante statue de la déesse. Être dans ce lieu la rassurait, ses angoisses s'apaisaient. Depuis qu'elle était enfant, Iseult priait la déesse de la guérison, on lui avait appris à faire ses offrandes et à prendre celles des pèlerins. Il lui semblait parfois avoir un lien privilégié avec Hëlia, ce qui était sûrement de la vanité de sa part. La jeune femme déposa aux pieds de la statue un dryle (1), dans un petit panier prévu à cet effet. Les temples de l'Académie étaient ouverts la journée aux habitants de la ville, Hëlia était une déesse très appréciée, notamment car elle était dédiée aux soins. Néanmoins, à l'heure à laquelle Iseult s'y trouvait, les portes étaient fermées. Elle y était donc seule, les guérisseurs avaient dû prier avant le repas ou le feraient avant de se coucher. Quant aux apprentis, ils privilégiaient le matin.

Les paupières closes et les mains jointes, elle récitait ses prières. Pour l'heure, elle voulait surtout comprendre la raison pour laquelle on ne lui avait pas accordé le don de la guerre pour son opale. Iseult partait du principe que chaque évènement avait une raison, les Dieux ne laissaient rien au hasard. Cela l'aidait à expliquer l'imprévu auquel elle devait faire face. Le haut prêtre lui avait annoncé qu'elle rencontrerait les membres du conseil le lendemain.

– Tu as déjà prié ce matin, fit remarquer la voix de Morgan.

Il se mit à genoux à ses côtés. D'un geste précis, il lança une pièce dans le panier avant de se tourner vers elle.

– J'ai prié Felÿa ce matin, j'avais besoin d'apaiser mes angoisses, expliqua-t-elle.

– Ce qui apaiserait tes angoisses, ce serait de te changer les idées, proposa son ami.

– Vous voulez toujours aller à la taverne ce soir ?

Leur petit groupe s'était décidé à aller fêter la fin de leur apprentissage. Iseult ne s'était pas prononcée, elle aimait le calme du temple et de sa chambre. Les doigts de Morgan agrippèrent les siens et il les porta à ses lèvres pour y déposer un baiser. Il respectait sa foi et ses choix, même s'il la poussait à sortir de sa zone de confort.

– Nous allons nous amuser, puis cela ne pourra pas te faire de mal, lui dit-il.

– Il y a du bruit, et des gens, la dernière fois quelqu'un a renversé sa bière sur ma chemise, bougonna Iseult.

Son partenaire éclata de rire, elle avait râlé tout le lendemain et avait peiné à retirer l'horrible odeur du vêtement.

– Le pauvre homme a cru que tu allais le foudroyer sur place. Je t'assure que tout se passera bien, on va juste s'amuser.

– Vous pouvez y aller sans moi, tenta-t-elle.

– Nous pouvons.

Morgan se tourna vers elle, sa main glissa sur sa joue, puis caressa sa nuque avec tendresse.

– Mais qu'est-ce que je ferais sans ma partenaire ? Puis, je ne veux pas que tu restes toute seule.

Il l'attira contre lui pour poser ses lèvres sur les siennes. Son bras entoura sa taille pour la serrer plus étroitement, Iseult se laissa aller à cette étreinte. Morgan savait comment l'amadouer pour obtenir ce qu'il voulait, et elle se laissait faire. Elle soupira contre ses lèvres.

– Je viens, mais je ne pense pas rester longtemps, souffla-t-elle.

Un sourire se dessina sur les lèvres de son partenaire, il déposa un nouveau baiser sur sa joue. La jeune femme se redressa pour s'adresser une nouvelle fois à la déesse, afin de la remercier de l'attention qu'elle lui portait. À ses côtés, Morgan attendait qu'elle ait terminé, les prières l'ennuyaient et il ne cacha pas sa satisfaction de pouvoir sortir du temple. Il priait Felÿa parce que cela était nécessaire à leur ordre et il n'était pas aussi dévot qu'elle pouvait l'être.

L'Opale NoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant