Chapitre 11

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La nuit était tombée sur le village. Iseult et Morgan avaient passé la journée à s'assurer que tout était en ordre, ils devaient repartir le lendemain afin de regagner l'Académie. Ils en profiteraient pour ramener la jeune femme qu'ils avaient condamnée à Riftha. Certains villageois avaient montré leur mécontentement au fait qu'il n'y ait aucune peine de mort, mais ils n'auraient pas osé contester les ordres des chasseurs. Même s'ils aidaient la population, certaines rumeurs couraient à leur sujet, parfois farfelues d'autres fois plus sérieuses, mais qui n'étaient pas avérées. La plupart du temps ils décidaient de les ignorer.

Leur repas était terminé depuis plus d'une heure, et Iseult avait caressé l'espoir de pouvoir aller se coucher, mais ils étaient condamnés à faire une ronde. Un jeune homme avait aperçu d'étranges mouvements dans la forêt et était rentré apeuré. Ils étaient donc contraints de vérifier qu'il n'y avait aucune créature dans ces bois. Iseult laissa échapper un bâillement, ils n'avaient rien trouvé et elle aspirait à retrouver le lit pour dormir. À ses côtés, Morgan inspectait les environs. Un frisson remonta le long de l'échine de la jeune femme, comme une main glacée qui se saisissait de sa colonne vertébrale. Ses scrutèrent les alentours à la recherche d'une présence. Contrairement à son partenaire, ses sens n'étaient pas accentués par la magie. L'avantage de la magie de la guerre était de voir ses sens accrus, tout comme sa force et Morgan étaient l'un des plus doués dans cet art. Il lui agrippa le poignet pour la faire reculer avant de lui faire signe de le suivre. Ils s'étaient éloignés du sentier pour s'avancer dans la pénombre de la forêt. Iseult referma sa main sur son épieu et le dégaina en silence.

Il ne leur fallut pas plus d'une minute pour déboucher sur un sentier cabossé, au milieu de celui-ci ils distinguèrent une silhouette allongée sur le sol ainsi qu'une bête penchée dessus. Le loup releva son museau et poussa un grognement pour les dissuader d'avancer. Ses yeux brillaient d'une lueur rouge inquiétante. Elle lança un regard vers le ciel et constata que ce n'était même pas la pleine lune. Ses sourcils se froncèrent. Morgan s'était déjà élancé, et elle le suivit. Le loup se jeta sur eux en poussant un rugissement qui fit s'envoler les oiseaux. Ses babines se retroussèrent et il baissa la queue, ses yeux rivés sur eux. Il se jeta sur Morgan qui dégaina son arme, les crocs de l'animal passèrent à quelques centimètres de son visage. Les mains serrées sur son arme, Iseult s'élança, son épieu en avant. Elle parvint à écorcher les côtes de l'animal qui poussa un jappement de douleur avant de se tourner vers elle. Ses griffes raclèrent le sol et il fit claquer ses mâchoires pour l'attaquer. Il n'eut pas le temps de bondir que la lame de Morgan l'empalait au niveau du dos. Le corps de la bête s'affaissa et son regard se vida. Iseult déglutit.

– Ce n'est même pas la pleine lune, fit-elle remarquer.

– Les loups ne peuvent pas se transformer quand il le souhaite, continua son partenaire. Tu as remarqué quelque chose d'étrange ?

– Ses yeux, ils étaient rouges. Or, je n'ai jamais lu une telle chose, pas chez les loups-garous en tout cas.

Iseult prenait plaisir à apprendre les bestiaires par cœur, elle se souvenait de chaque petit détail. Son manque de force était ainsi compensé par ses connaissances, là où Morgan se contentait d'informations succinctes dont la plupart consistaient à savoir comment tuer une créature. Ils s'approchèrent du cadavre, Iseult eut un sursaut de surprise. Le corps n'avait pas été déchiqueté au niveau de l'abdomen, comme cela aurait dû être le cas. De larges traces de morsures s'étendaient sur la gorge de l'homme tué.

– Il a bu son sang, murmura-t-elle.

– Qu'est-ce que ça signifie ? grogna Morgan.

Elle n'eut pas le temps de répondre qu'un hurlement les obligea à se tourner. Le loup s'était éveillé, ses yeux brillaient de nouveau, et il tentait d'avancer malgré la lame fichée dans son corps. Sans réfléchir, Iseult empoigna son arme, d'un coup sûr et maîtrisé elle abattit le côté tranchant de l'épieu sur la nuque de la bête. Il lui fallut s'y reprendre à trois reprises pour que la tête se détache du corps. Elle eut un haut-le-cœur à chaque projection de sang, l'odeur était infecte et le liquide qui s'écoulait du corps du loup était noir.

L'Opale NoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant