Beauty Behind Madness

Chapitre 11 : Atè

Le lendemain matin, je la croise dans la cuisine. Elle s'arrête nettement en me voyant. Nous sommes toutes les deux surprises de se croiser aussi tôt. Il n'est que cinq heures du matin et Lidia n'est généralement pas celle qui se réveille en première. C'est la première fois depuis longtemps qu'elle ne m'adresse pas de sourire en me voyant.

— T'es déjà levée ? demande-t-elle sèchement.

— Je n'ai pas vraiment dormi, en fait.

Elle ricane en marmonnant dans ses dents un « ouais, moi non plus ». Elle attrape une bouteille d'eau pour se remplir un grand verre de son contenu.

— Écoute, Lidia.

— On n'est pas obligé de parler, lance-t-elle brièvement. Il ne s'est rien passé.

— D'accord, alors pourquoi tu sembles légèrement en colère contre moi ?

— Je ne suis pas légèrement en colère contre toi, Morgane. Je suis tellement en colère contre toi.

— Je sais, je m'excuse. J'avais beaucoup trop bu.

— Je ne veux juste pas que tu ailles répéter à qui que ce soit qu'on s'est embrassé, car ce n'est pas le cas, TU m'as embrassé. Tu entends ?

Je ne réponds pas, je me contente d'étirer mon cou et de serrer les dents, m'empêchant d'avoir les larmes aux yeux lorsqu'elle dit des choses pareilles. Ça faisait un moment, d'ailleurs.

Je m'apprête à sortir dehors pour aller fumer une cigarette, mais elle m'arrête avec une question transcendante.

— Est-ce que tu es toujours amoureuse de moi ?

— Non, je mens. Bien sûr que non, je me sentais juste seule, j'ai cru que...-

— Tu as mal cru. Je suis toujours avec Fanny, et je l'aime. Je vais la retrouver aujourd'hui.

J'hoche la tête avant de sortir de la maison.

Je l'ai embrassé, certes, mais elle m'a rendu ce baiser. Elle pourrait au moins éviter d'être aussi aigrie avec moi. Il y a des détails qui ne trompent pas, les yeux ne trompent jamais.

Je me souviens du jour où j'ai appris qu'elle était avec Fanny... Elle ne me l'a pas dit, elle ne me l'a jamais dit, d'ailleurs. Je l'ai appris par la bouche de quelqu'un d'autre. Je n'ai d'abord pas eu le courage de lui demander dans les yeux si elle était vraiment avec quelqu'un d'autre, alors que seulement quelques jours avant, nos corps se rencontraient une nouvelle fois. Lorsque j'ai finalement trouvé le courage de la confronter, elle m'a regardé dans les yeux, pendant de longues secondes, comme si elle n'avait jamais envisagé que je puisse lui poser la question.

— Oh, elle a d'abord dit. Ça...

— Oui, ça. Ce détail.

— Je voulais te le dire, je te le jure.

— Pourquoi tu ne l'as pas fait, alors ?

— Je ne savais pas comment le faire. Je ne veux pas te perdre.

Je ne lui ai jamais clairement dit, mais Lidia m'a brisé le cœur ce jour-là. J'ai voulu garder la tête haute, alors je lui ai souhaité rien de moins que du bonheur. Finalement, c'est tout ce que je lui souhaitais, même si j'aurais souhaité que son bonheur, ça soit moi.

Lorsque tout le monde s'est réveillé, nous avons reprit la route avant qu'une nouvelle mésaventure se mette au travers de notre chemin. En fin de compte, nous sommes enfin arrivés à Kentrogara. D'un point de vue extérieur, il semble que ce « camp » soit le plus grand que l'on ait vu. En fait, ça ne ressemble même pas à un camp, mais plutôt à une ville. Celle-ci est munie de grands remparts métalliques et même de l'extérieur, nous pouvons voir le nombre élevé de résidents. Certains d'entre eux s'approchent déjà des remparts pour nous observer de plus près alors que deux hommes ouvrent la porte pour nous rejoindre à l'extérieur. C'est bien plus grand que ce que Zackary a construit. Aux portes du campement, Christopher a immédiatement demandé si un certain Mario Donatello se trouve ici. Les deux hommes nous ont rigolé au visage. Lorsqu'ils ont demandé qui le demandait et que Christopher a donné son nom de famille, ils nous ont immédiatement fait rentrer en effaçant leurs rires moqueurs, comme si nous étions attendus.