Chapitre 15

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Je prenais alors le temps de tout lui expliquer. Du début jusqu'à la fin sans omettre aucun détail. Je lui devais la vérité alors je lui livrais sur un plateau toutes les informations dont elle avait besoin pour comprendre, toutes les informations qu'elle méritait de connaitre. Mes ressentis, mes craintes, mes impressions, mes volontés ... Et surtout la peur viscérale que j'avais eu de la perdre et les raisons, non justifiées, de mes agissements.

Je déblatérais pendant un long moment, en tentant tant bien que mal de lui faire comprendre ce qui m'était passé par la tête. J'espérais qu'elle se mettrait à ma place, ou au moins, qu'elle saisisse le pourquoi de mes bêtises. J'espérais plus que tout au monde qu'elle ne m'en veuille pas, en tout cas, pas plus longtemps qu'elle ne l'avait déjà fait et qu'elle me pardonne. Parce que je ne voulais pas la perde. Parce que je me refusais d'accepter une vie sans elle. Parce que j'étais tombé éperdument amoureux d'elle.

Comme à son habitude, elle me fixait, droit dans les yeux. Comme toujours, elle semblait sûre d'elle. Et encore une fois, elle avait tout à fait raison de ne pas baisser les yeux. Elle savait que j'avais eu tort sur toute la ligne. Et je le savais aussi. Inévitablement, nous étions d'accord sur les fautes que chacun d'entre nous avait commises, ou non. Nous étions sur la même longueur d'ondes quand il s'agissait de désigner un coupable : moi.

Après un long moment à défendre ma cause, comme je le pouvais, nous baissâmes finalement tous les deux les yeux. Un long silence retentit alors. Personnellement, je ne savais plus quoi dire et elle, elle donnait l'impression d'être en train de poser le pour et le contre, de délibérer intérieurement, afin de rendre sa sentence. J'avais mille fois fait le tour de tout ce que je pensais, de tout ce que je voulais lui partager. Implorant, je levais les yeux vers elle. Pendant quelques minutes, je ne pus déterminer quelles émotions elle ressentait, ce qu'elle pensait. Elle ne laissait rien paraître et là était mon problème à cet instant précis.

Le cœur serré, un nœud se forma dans ma gorge. Tétanisé, attendant que mon jugement tombe enfin, les larmes montèrent à mes yeux, à la vitesse de l'éclair. Sans que je ne puisse les retenir. Sans que je ne puisse, jamais, revenir en arrière. Elle leva enfin le regard vers moi. Des éclairs de feu dans les yeux. Elle semblait en colère, plus que jamais. Je découvrais une nouvelle facette d'Élisa, une facette que je ne connaissais pas et que je n'avais jamais espéré connaitre.

- Arrrg ! Mais pourquoi ? Pourquoi tu as fait ça ? C'était compliqué de venir me parler ? Compliqué de m'expliquer tout ça ? Visiblement oui ! C'était plus simple de batifoler avec une inconnue totale devant mes yeux.

- Élisa ... S'il te plait.

Le regard et un doigt accusateur pointé sur moi, elle m'avait hurlé dessus. Du maximum que ses poumons ne le lui permettaient. Et elle continua encore. Ces mots heurtaient mon corps comme des couteaux. Ils me blessaient, me lacéraient, me torturaient, me tuaient.

- Il n'y a pas de s'il te plait qui tienne. Tu es un crétin fini et un abruti de première. Un vrai mec qui ne prend même pas le temps de réfléchir avant d'agir.

Désormais, elle faisait les cents pas dans le chalet. Elle ne me regardait plus. Elle bouillonnait simplement de l'intérieur, les larmes aux yeux, elle aussi. Des milliers de pensées se bousculaient dans sa tête. Elle tentait invariablement de les canaliser, de les rassembler.

- Tu voulais me blesser et tu as réussi. Je me suis sentie humiliée, trahie, meurtrie. Je t'ai détesté plus que tout depuis. Je croyais simplement t'avoir perdu ... Je pensais que tu ne m'aimais plus ... que tu ne m'avais jamais aimé.

Au fil de sa phrase, elle s'était calmée petit à petit. Sa voie s'était faite plus douce, plus lente. Elle donnait l'impression d'avoir perdu cette bataille intérieure qu'elle menait de front depuis de nombreuses heures maintenant. Elle avait l'air las de tout cela. Las de cette situation. Et moi, en face d'elle à attendre sa décision finale, je n'espérais qu'une chose : qu'elle soit aussi lasse de notre séparation, de la distance qui s'était immiscée entre nous pendant ces dernières quarante-huit heures.

Elle finit par se réasseoir, sur le canapé cette fois-ci, relevant les genoux le long de sa poitrine, y reposant ses bras, la tête enfouie à l'intérieur de ces derniers comme pour se cacher de moi. Quelques minutes s'écoulèrent avant qu'elle ne relève la tête. Elle pleurait encore, et je me maudissais d'avoir provoqué tout cela. Je me jurais intérieurement de ne plus jamais provoquer ce genre d'émotions chez elle. En espérant évidemment, qu'elle accepte de me garder auprès d'elle pour que ce ne soit pas moi qui finisse au fond du gouffre.

- Dis-moi que tu n'as rien fait avec cette fille. Dis-moi qu'il ne s'est rien passé de plus que ce que j'ai vu.

Elle m'implorait presque maintenant. Je me devais de lui donner la vérité. Je me devais de la rassurer. Je devais faire en sorte d'éclairer les choses pour qu'elle n'envisage plus le pire.

- Il ne s'est rien passé avec cette fille. Je te le promets. Je n'en avais aucune envie. C'est vrai que j'espérais te blesser, et j'ai été un vrai con pour ça. Mais cette fille ne m'a jamais plu ... Aucune autre d'ailleurs. Je n'ai jamais rien voulu de sa part. Elle n'a servi que d'instrument à cette vengeance. Une vengeance insensée, je le sais. Je ne connais même pas son prénom.

Sous ses larmes, un sourire apparu. Il me réchauffa le cœur instantanément. Immédiatement, une lueur d'espoir pointait le bout de son nez.

- Son prénom ? Tu ne connais même pas son prénom ?

Elle éclata de rire. Dans un fou-rire contagieux, je la suivi sans pudeur. Nous rigolions tous les deux de bon cœur. Nous moquant de ce qu'il se passait autour de nous, nous moquant de tout le mal que j'avais pu faire à cette fille. Je lui confirmais que non, je n'avais même pas pris la peine de le lui demander.

- Tu crains !

Et elle rigolait de plus belle, toujours sur le canapé, recroquevillée sur elle-même, les yeux encore baignés de larmes récentes. La situation semblait tellement absurde, irréelle, sortie d'un autre monde. Mais je savourais ce moment, je m'en imprégnais le maximum que je le pouvais, en espérant que ce moment ne se termine jamais, en espérant qu'elle soit toujours à mes côtés, pour voler en éclats.

Les mains dans les poches, en face d'elle et malgré nos rires, je ne savais que faire, je ne savais comment réagir. Je ne savais pas si j'avais enfin le droit de la prendre dans mes bras ou si je devais attendre, attendre qu'elle revienne en arrière et recommence à me hurler dessus. Attendre que les blessures cicatrisent, que la colère disparaisse, que la rancune s'en aille. Rapidement, le bruit de nos rires s'évanouit dans le silence, progressivement, decrescendo. Et sans un mot, j'attendis une réaction, un feu-vert, un premier pas de sa part.

Elle ne laissa pas le doute planer trop longtemps, pour mon plus grand soulagement. Elle me sourit, se leva et s'approcha. Elle me prit dans ses bras et me serra contre elle aussi fort qu'elle le pouvait, aussi fort que ses bras frêles le lui permettaient. Elle enfouit sa tête dans mon torse, les bras dans le creux de mon dos. Je sentis immédiatement nos respirations ralentir, ensemble, s'accordant parfaitement. Comme ci l'une calmait l'autre et vice-versa. Je passai mes bras au-dessus de ses épaules, autour de son cou. Et à mon tour, dans un grand moment de sérénité, je plongeai mon visage dans ses cheveux, afin de pouvoir m'imprégner pour toujours de leur odeur.

- Ne fais plus jamais ça, tu m'entends ?

- Plus jamais. Promis.

- Je te promets de te présenter Lucas.

– J'y comptais bien ...

Jamais plus sans toi - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant