Chapitre 27

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J'ouvris lentement la porte et passai le seuil avec hésitation pour finalement m'arrêter net sur le pas de cette dernière. Les mains dans les poches et la tête enfoncée dans mes épaules, je ne parvins pas à lever les yeux vers elle. J'avais honte de tout ce que j'avais pu lui faire. Je ne voulais pas affronter son regard accusateur encore une fois. Du coin de l'œil, je l'aperçu, dans le coin de la pièce, installée dans son fauteuil de lecture, près de sa bibliothèque. Quand je décidai enfin qu'il était temps de croiser son regard, le mien alla à sa rencontre et je vis immédiatement tout ce que je n'avais absolument pas envie de voir. Ses genoux repliés contre son torse, ses bras croisés appuyés sur ces derniers, ses yeux rivés sur moi, ses sourcils froncés, j'étais en plein interrogatoire. Elle semblait attendre que je parle, enfin. Je percevais alors que la moindre bêtise sortie de ma bouche signerait mon arrêt de mort. Péniblement, j'avalais ma salive. Il fallait que je me fasse pardonner, que je lui prouve que je n'étais pas le crétin que j'avais été ces derniers jours, mais aucun mot ne parvenait à franchir la barrière que formaient mes lèvres dorénavant. Sa patience avait des limites et elle n'attendit pas plus longtemps pour prendre la parole.

- J'attends. Je n'ai pas toute la soirée devant moi. Si tu n'as rien à me dire, alors je te demanderais de bien vouloir partir et me laisser tranquille une bonne fois pour toute.

J'avalai ma salive avec une très grand difficulté. Je sentis dans ma gorge comme un nœud. Ma trachée et mon œsophage c'étaient liés, comme pour m'empêcher de parler, de respirer, de vivre ... En cet instant, je ne savais plus quoi faire. Je ne voulais absolument pas la perdre définitivement, mais mon corps refusait catégoriquement de répondre. Il avait décidé de ne plus être mon allié ce soir-là. Comme si, lui aussi refusait que je puisse encore une fois faire du mal à la personne la plus extraordinaire que nous avions pu rencontrer. Je n'arrivais pas à soutenir son regard. À chaque fois que mes yeux croisaient les siens, ils ne parvenaient pas à rester focalisés sur elle plus de quelques secondes, intimidé par tout ce qu'elle pouvait représenter.

J'étais stressé, j'avais honte et je savais que je jouais toute notre relation. Toutes ces choses ne m'aidaient pas. Il était impératif que je choisisse bien tous mes mots pour que ces derniers aient un impact sur elle, même minime, pour qu'elle accepte de me laisser entrer à nouveau dans sa vie.

Ce soir-là, ce fut compliqué de me livrer et de lui dire tout ce que je pensais d'elle. Je m'excusai à maintes reprises en espérant qu'elle daigne me laisser revenir. Elle avait le pouvoir ; le pouvoir de me guérir ou de m'anéantir. Elle était la seule à pouvoir accepter mes excuses, elle était la seule à pouvoir décider de ce qu'elle ferait de nous et de notre avenir. Je sentis de nombreuses émotions la traverser, pour la plupart négatives, à mes dépens. La colère et la tristesse se mêlaient dans ses traits. Je désespérai de ne pas pouvoir la retrouver, de ne pas être capable de la ramener à moi.

Le silence tomba finalement. J'avais épuisé tous les arguments que j'avais à ma disposition pour ma défense. Rien de fit changer les choses. Elle restait là, obstinée à ne pas m'accorder un seul regard. Des larmes coulèrent souvent et cela me torturait. J'étais la raison de ces dernières et j'avais l'impression qu'un nouveau coup de couteau me perforait le cœur et le corps tout entier à chaque fois qu'une nouvelle glissait sur son visage. En cet instant, je me haïssais. Je me haïssais comme jamais personne n'aurait pu me haïr. J'étais même persuadée de me détester plus qu'elle ne me détestait elle-même.

La sentence tombée et condamné à ne plus vivre auprès d'elle, je sortis la dernière carte de mon jeu. Tremblant et craignant que cela fasse too much ou même qu'elle ne me croit tout simplement pas après tout ce qui venais de se passer entre nous, je me décidai à lui dire ce que j'avais envie de lui dire depuis des mois et cela ne se résumait qu'en quelques petits mots.

- Je t'aime Élisa ... et je suis désolé.

Elle leva soudainement le regard dans ma direction. Les yeux baignés de larmes, elle semblait surprise par mon aveu. Elle se redressa brusquement et courut vers moi éclatant en sanglots. Sans plus attendre et sans ménagement, elle me prit dans ses bras. Je n'hésitai pas une seconde et l'enveloppai de mes bras posant une main dans son dos et l'autre sur sa nuque. Je me sentis soulagé et tous les muscles de mon corps devinrent immédiatement douloureux. J'étais resté tendu si longtemps qu'ils n'avaient pas eu une seule seconde de répit depuis des heures maintenant. Malgré la douleur, rien au monde n'aurait pu me forcer à la lâcher. J'espérais, je priais pour que ce moment dure toujours, dure éternellement. Je ne voulais plus la laisser partir, jamais. Et comme pour la retenir, dans un dernier effort pour ne jamais la voir s'en aller, je lui murmurais au creux de l'oreille, encore et encore, inlassablement que je l'aimais et que je l'aimerai toujours.

- Je t'aime, je t'aime plus que tout. Et je suis désolé. Désolé de t'avoir fait endurer tout ça pendant des semaines. Tu ne méritais pas ça, et je te promets d'être celui que tu mérites d'avoir à tes côtés.

N'arrivant pas à se calmer, elle renifla et soupira de nombreuses fois au creux de mon torse. Secouée par tout ce que nous venions de vivre, elle ne parvenait pas à relever la tête. Le soulagement de l'avoir dans mes bras était immense mais je me sentis extrêmement mal de l'avoir mise dans cet état. Il fallait que je la rassure. Il fallait que je fasse tout pour la rendre heureuse désormais.

Je pris un peu de recul et plaçai ma main sous son menton pour la forcer à relever la tête et affronter mon regard. Je voulais lire dans ses yeux tout ce qu'elle ne disait pas. Je voulais comprendre et deviner tout ce qu'elle pouvait ressentir à ce moment précis. Je voulais mesurer le degré de douleur qu'elle pouvait contenir par ma faute.

Son regard croisa le mien et je sentis pour la énième fois mon cœur voler en éclat. Elle était en face de moi, plus belle que jamais. Et malgré les larmes qui avaient fait couler son mascara, elle esquissait le plus beau des sourires. Je fus soulagé de voir qu'elle me pardonnait, encore une fois de mes nombreuses errances. Maintenant, j'allais devoir faire mes preuves. Et surtout, il allait falloir que je prenne bien soin d'elle et que je ne lui fasse plus jamais de mal si je ne voulais pas me détruire moi-même à petits feux.

Ses yeux plongés dans les miens, elle resta immobile un long moment, hésitante avant de parvenir à dire enfin ce qu'elle avait, elle aussi, sur le cœur.

- Je t'aime Maxime. Plus que tu ne m'aimeras jamais.

Ces mots traversèrent ses lèvres avec la plus grande des douceurs. J'aurais pu les prendre comme un reproche, comme un pic, comme un rappel que je ne l'aimerais jamais assez. Mais la manière dont elle me les avait dits et son regard paisible qui ne me lâchait plus, m'indiquèrent qu'elle avait tout simplement essayé d'exprimer avec les mots les plus justes possible ce qu'elle ressentait pour moi et ce qu'elle pensait de tout cela.

Je la repris alors dans mes bras, la serrant contre moi plus fort que nécessaire. Elle enveloppa ses bras autour de mon cou et prit une petite impulsion pour entourer mes hanches de ses jambes. Elle rit en me voyant surpris de la tournure que prirent les évènements. Je plaçais mes bras sous ses fesses pour la soutenir et l'empêcher de partir si l'envie lui prenait. Elle scruta chaque partie de mon visage alors que mes yeux étaient incapables de lâcher les siens. Elle glissa ensuite ses doigts dans mes cheveux. Nos regards se croisèrent enfin et lorsque je lui souris, elle les empoigna et tira légèrement dessus pour me forcer à lui faire face. Elle posa ses lèvres sur les miennes et nous nous embrassâmes amoureusement, fougueusement, douloureusement.

Ne voulant plus la laisser s'échapper, je plaçais de nouveau mes mains dans sa nuque, la plaquant contre le mur le plus proche. Les yeux fermés nous savourions ce moment en oubliant totalement ce qui pouvait se passer autour de nous.

Mon cœur, nos corps et l'appartement autour de nous volèrent en éclats. 

Jamais plus sans toi - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant