Réveil difficile

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☆Point de vue Amalia☆

Je me réveille en sursaut, le corps endolori, j'ai l'impression que ma tête va exploser, mes cheveux et ma nuque sont trempés.
Je tâtonne la place vide et froide à mes côtés, l'obscurité de la chambre ne me permet pas de voir grand-chose, mais le vide est là, toujours le vide. Je devrais être habituée pourtant.
Joan n'est pas à côté de moi, son parfum ne remplit pas la pièce, son odeur n'a pas imprégné l'oreiller encore bien trop carré à mes côtés. Joan a encore passé la nuit dehors, certainement à la recherche de notre Graal, notre Or blanc.
Je me résonne, s'il n'est pas là, c'est pour moi... pour nous.

Ma mâchoire se serre, mes mains sont moites, mon coeur s'emballe, mes doigts tremblent sur la couette. J'inspire et expire profondément.
J'ai beau chercher très fort, aucun souvenir de la veille ou de la nuit ne me reviennent. Nous sommes sûrement encore partis nous perdre dans cet endroit où nous sommes les dieux, les rois, les héros d'un monde qui n'appartient qu'à nous et où nous nous rendons bien trop souvent.

Je sais, j'ai bien conscience que cela ne durera pas toujours, je sais bien que nous nous abîmons, que nous nous détruisons un peu plus chaque jour. Qu'il est de plus en plus difficile de faire la différence entre la vie réelle et là où elle nous emmène.
Je sais très bien que c'est forcément elle qui gagnera. Nous ne serons jamais des parents, des grands-parents, nous ne vivrons certainement pas vieux et heureux dans une grande maison avec un clebs et tout le bordel, car après tout les vieux junkies ça ne court pas les rues.
Je ne sais plus quel monde je préfère... Enfin si, je le sais, le monde que je préfère, c'est Joan.
Peu importe que j'ai un pied ici ou avec elle, tant que Joan est là, alors je suis à ma place.

Lorsque j'ai rencontré Jo, j'étais une ado paumée, pas très bien dans sa peau, à l'écart, préférant de loin l'obscurité et la poussière de la Malle à Disque à la lumière et la présence d'autres jeunes. Toujours en marge, mon esprit n'était clairement pas en phase avec les gens de mon âge, ce qui me semble encore être le cas d'ailleurs.
Cette maudite impression de ne pas être née à la bonne place, à la bonne époque, dans le bon monde...
Mon frangin passait le plus clair de son temps avec Joan, donc par la force des choses, j'ai fait sa connaissance et j'ai commencé à partager beaucoup de moment avec eux, avec lui.
Il était tellement beau, il faisait partie de ces gens hyper sociable qui sont pour moi des extraterrestres... Capable de s'intéresser à n'importe qui, de s'exprimer sur n'importe quel sujet, avec une confiance en lui et une présence complètement surréaliste.
Il pouvait vous parler de n'importe quel groupe de musique, comme de politique ou de fringues, cela me fascinait, il paraissait à l'aise en permanence, sur n'importe quel terrain. Il suffisait qu'il soit dans une pièce pour que toute la lumière soit vers lui, j'admirais tellement sa prestance et son aplomb.
J'ai tout de suite été subjuguée par ce qu'il dégageait, et par son physique, ses cheveux bouclés en bataille, ses yeux foncés qui me transperçaient à chaque fois qu'il posait le regard sur moi et me faisait sentir spéciale.
J'étais étonnée de pouvoir piquer son attention, qu'il s'intéresse à moi... Oui, quelqu'un comme lui qui s'intéressait à moi, la petite jeune bizarre, enfermée dans un monde dans lequel elle ne trouvait pas sa place.
Alors, je m'étais enfin sentie vivante. Et puis, les premières fois où il m'avait fait voyager, où il m'avait emmené dans son monde, il avait été si présent, si rassurant et prévenant que je m'étais senti particulière, importante pour quelqu'un, importante pour lui.
J'avais enfin trouvé un partenaire de route et une route.
Avec lui j'étais prête allez n'importe où. Et c'est ce que j'ai fait dans tous les sens du terme, j'ai tout plaqué pour partir à l'autre bout de la France, complètement à l'arrache mais tellement amoureuse.
Et même si notre couple ne faisait pas l'unanimité, cela m'était bien égal, il était là, nous étions ensemble partout et tout le temps, lui et moi contre tous et c'est bien tout ce qui comptait pour moi.
Plus rien, ni personne ne semblait vraiment indispensable à part lui et le monde dans lequel nous volions tous les deux.

Nous nous aimions, tout autant que nous déchirions. Les hauts étaient très haut et les bas très bas, je crois que c'est ce qu'on appelle la passion. L'amour passionnel est destructeur, je le sais pour avoir dansé avec lui quelques années.
Nous faisions l'amour aussi intensément lorsque nous planions, que nous nous battions, quand elle venait à nous manquer.
Toutes nos émotions décuplées à cause d'elle.
Lorsque que je fais le point sur notre histoire, je me rends compte que tout, oui, tout ce que nous vivions, ressentions, était biaisé par sa présence.

Parfois je n'arrive même plus à discerner la réalité, de la défonce... tous mes souvenirs ont-ils vraiment existés... une chose est sûre c'est que je me suis fait du mal, bien plus qu'il n'aurait pu m'en faire, je me suis mis des chaînes que j'ai forgé moi même...

Je continue à inspirer et expirer profondément.
Je reprends le dessus, ma mâchoire se décontracte, mes doigts cessent de trembler, mes yeux s'habituent à l'obscurité de la pièce. Mon cerveau se reconnecte à la réalité, non, Joan n'est pas là, il ne sera plus là... puisque je l'ai laissé, je l'ai abandonné avec elle.
Combien de temps vais-je encore devoir supporter tout ça, tous ses maux, tous ses moments où je ne sais plus ce qui est le passé et le présent... ça doit être ma « croix à porter » ma punition pour avoir fait les mauvais choix, pour avoir voulu trouver un endroit qui semblait mieux me convenir... pour tenter de m'en sortir, mais pour l'avoir lâchement laissé derrière moi... dans ses « bras » à elle.

Le bip de mon portable me ramène à la réalité, un lendemain de cuite, avec une sérieuse gueule de bois, dans la chambre d'amis du nouvel appartement de ma pote d'enfance.

Axel

Hello, p'tite bombe, j'espère que tu n'as pas trop mal aux cheveux ?!
J'aimerais te voir dans la journée si tu es dispo ?

J'esquisse un sourire et me détend considérablement, c'est l'effet qu'Axel a sur moi.
Il est comme une lumière dans mes ténèbres, une ancre dans ma tempête personnelle.
Il me remet les pieds dans la vraie vie. Il balaye doucement le fantôme de Joan, qui a encore trop d'ascendant sur moi.

J'ai tellement peur, de le blesser, de l'abîmer, de le détruire... car je finis par salir tout ce que je touche.
J'ai du mal à croire que j'ai le droit à ça ! Une histoire paisible, tranquille, ne plus marcher sur le bord du précipice. Pouvoir à nouveau profiter des choses et des bonheurs simples comme le font la plupart des gens.

J'ai essayé de me tenir éloignée de lui, persuadée que mes sautes d'humeur auraient déjà fait une bonne partie du taf et qu'il se rendrait vite compte que je ne vaux pas le coup, que je suis bien trop cassée, bien trop sombre, dangereuse.

Mais non, il est là, même après que j'ai eu des comportements incompréhensibles, même après les confidences sur mon passé.
A-t-il vraiment mesuré l'ampleur de ce que je lui avouais ?
Quoi qu'il en soit, il est resté, il a décidé d'essayer, alors qu'il ne me connaît pas ou très peu, juste la poudre aux yeux que j'offre à ceux qui s'approche un peu de moi.

Mais il a choisi que ça valait le coup, que je valais le coup et à son contacte j'arrive à croire que c'est possible, que je peux y arriver. Il m'offre une lueur d'espoir, il atténue mes maux.

Il est ma lumière, ma méthadone.

☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆

Hello, Alors ? Alors ?
C'est la première fois que nous sommes dans le cerveau "torturé" d'Amalia. Qu'en avez vous pensé ?

Aimeriez-vous d'autres chapitres de son point de vue ?

Encore merci pour vos commentaires et votes ☆

Lou

Mon AngeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant