40 - Vulnérable

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Lorsque je revins dans la pièce, nos deux verres à la main et toujours le sourire aux lèvres, Shawn me faisait dos et il semblait observer quelque chose qu'il tenait dans la main. Au moment où il se retourna vers moi, son regard avait radicalement changé. Je dirigeai alors mes yeux sur ce qu'il tenait en main, et je compris aussitôt. Mon sourire s'effaça instantanément et mon cœur accéléra sa cadence. Avant de ne me laisser emporter par la vague d'émotions qui menaçaient de me noyer, je posai nos verres sur la table la plus proche, sous l'oeil attentif du canadien. Avec appréhension et presque tremblante, je replaçai lentement mes yeux dans les siens. Ces derniers en disaient long... Il m'observait l'air égaré, et un brin de pitié traversa ses pupilles.

— Madi... dit-il d'une voix faible.

Sa voix me donna soudain envie de pleurer mais je me resaisissais et dès lors, c'est la colère qui monta en moi. Mes dents se serrèrent et ma respiration commençait à trahir mon état. Je m'approchai abruptement du jeune homme avant de lui arracher d'un geste vif les trois peintures qu'il tenait dans ses mains.

— Tu n'avais pas à voir ça, protestais-je sèchement.

Je me retournai de suite et avançai d'un pas décidé vers la porte de ma chambre, que j'ouvris vivement avant de balancer ces trois peintures sur mon lit. Dans ma rage, je voulus immédiatement refermer la porte en la claquant et revenir vers le salon. Mais je m'arrêtai soudainement dans mon élan et me stoppai net. La main sur la poignée, je pris un instant pour me retourner et observer mes peintures. Comme si le temps s'était arrêté. Ces toiles, je les avais réalisées lorsque j'avais traversé le moment le plus difficile de mon existence. Elles étaient sombres et elles traduisaient ce qui s'était trouvé au plus profond de moi pendant un moment. Je ne les avais jamais montré à personne, pas même à Charlotte. Je trouvais qu'elles ne me représentaient pas, ou du moins plus. J'avais réussi à sortir de cette période très difficile et je ne voulais plus jamais y penser, tant elle avait été dévastatrice. C'est pour cela que sur le coup, je ne compris même pas pourquoi ces toiles n'avaient pas déjà finies à la poubelle. Ma main commença à trembler et sans que je n'arrive à la retenir, une larme coula sur ma joue. Shawn avait vu la seule chose pour laquelle je voulais qu'il ne soit absolument jamais au courant. Voilà pourquoi j'étais tant angoissée qu'il vienne. Voilà pourquoi j'étais vulnérable. Et ce que je redoutais était finalement arrivé... Soudain, j'entendis des pas s'approcher de moi. Aussitôt, je compris qu'il arrivait vers moi et j'essuyai rapidement mes larmes d'un revers de la main avant de claquer la porte pour ne plus que les peintures puissent être à sa vue. Face à la porte, je restai figée. Il était derrière moi, je le savais, et il fallait que je le confronte. J'aurais plus que tout aimé que cette situation ne soit jamais arrivée. Mais j'étais en train de la vivre, et je n'eus d'autre choix que de me retourner, lentement, en essayant de laisser apparaître le moins d'émotions possible. Le visage fermé et la mâchoire serrée, je dirigeai mes yeux vers ceux du grand brun. Son regard qui traduisait l'incompréhension n'avait pas vraiment changé. Il avait juste l'air plus que tout perdu. Il s'était arrêté à une distance très respectable de moi, et aucun de nous n'osait parler. Honnêtement, j'avais juste envie de m'enfouir plus bas que terre et de ne plus jamais revoir ce beau canadien qui me faisait face. Sans comprendre pourquoi, j'éprouvais beaucoup de honte.

— Madison... Est-ce que je peux te faire un câlin ?... articula-t-il après un long moment de silence.

Presque paralysée, je déglutis difficilement. Sa voix traduisait la douleur et si on continuait comme ça, je savais que j'allais exploser en larmes devant lui.

— Oui, répondais-je d'une voix sourde, en essayant tant bien que mal de contrôler mes émotions.

Il s'avança aussitôt vers moi, ouvra ses bras et les referma tout contre mon corps. Je vins dès lors réfugier ma tête contre son torse et l'odeur si familière de son parfum m'apaisa. Sans que je ne puisse la voir venir, une larme s'échappa de mon œil pour lentement venir se déposer sur le t-shirt du canadien. Ce dernier me serrait comme jamais il ne l'avait fait auparavant et me caressait tendrement les cheveux. Dans le plus vaste silence, je me laissai aller contre lui et après un temps, j'effectuai un rapide bisous sur son torse, à travers son t-shirt. Dès lors, il déserra doucement son étreinte et fit se rencontrer nos regards. Ses prunelles noisettes demeuraient soucieuses.

I don't even know your name -  [Shawn Mendes fr]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant