Chapitre 17

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Tout se mélange dans ma tête. De nombreuses images se bousculent mais elles restent toutes très floues. Je n'y comprends rien. J'ai juste ouvert cette porte. Juste une. Et il me semble en rester des milliers. Sherlock place doucement une de ses mains dans mon dos, me faisant frissonner. Quelques secondes passent avant que je ne mette mon premier pied dans le bâtiment. Je n'y vois qu'une entrée toute poussiéreuse avec un miroir et un porte manteau. Cela mène à un couloir, un grand couloir avec plusieurs portes. J'avance lentement. La présence de Sherlock me rassurant très peu.
J'ouvre une première porte pour y trouver une cuisine plutôt grande. Des ustensiles et des couverts jonchent sur le sol avec des morceaux de verres brisés. Je m'accroupis pour en prendre un dans ma main sans comprendre. Puis je vois des ombres crier et lancer des objets sur une autre ombre plus grande. Je ferme mes yeux et secoue la tête en lâchant le verre que je tenais. Je me relève et regarde cette cuisine si sale par le temps qui s'est écoulé. Je soupire. Je ne veux pas croire que mon passé était ainsi. Peut-être y'a t'il une explication. Je regarde Sherlock qui inspecte la pièce lui aussi, cherchant à comprendre. Je souris légèrement. D'autres souvenirs me parviennent. D'agréables odeurs, des rires, de la chaleur humaine. Ils sont totalement différents de ceux d'avant.
Je retourne dans ce long couloir et vois un placard. Lorsque je l'ouvre, le grincement de celui-ci ressemble à un film d'épouvante. Il est pleins d'objets en tout genre et de vestes attachées par des cintres. Soudainement, j'aperçois alors une ombre, très sombre et grande passer devant ce placard fermé alors que ma vision me laisse penser que j'y suis cachée. Il fait froid. Il n'y a aucun un bruit. Juste les pas lourds de cette ombre. Je sens un frisson parcourir tout mon corps.
La seconde porte m'amène dans une grande pièce qui regroupe le salon et la salle à manger. Un canapé en cuir noir devant une télévision fissurée. Les chaises cassées. La table de salon jetée à l'autre bout de la pièce. Je les vois danser en riant joyeusement. Je me sens taper dans mes mains pour applaudir puis, soudainement, j'entends des cris. J'entends des pleurs. Je me bouche les oreilles. C'est horrible. Sherlock me rejoint et prend une de mes mains dans les siennes en me regardant dans les yeux.

« Tout va bien? Me demande-t-il. Que vois-tu? »

J'ouvre la bouche mais ces cris sont si forts.

« Il y a des cris.. des bruits d'objets qui se brisent.. il y avait une ombre très grande.. très sombre.. elle me fait peur Sherlock. »

Il m'écoute attentivement en serrant ma main.

« Mais aussi deux autres, plus petites et plus accueillantes.. je ne comprends pas.. »

Je baisse la tête. Pourquoi tout est flou? Pourquoi tout est si bizarre.

« Continuons alors. »

Il serre ma main et retourne dans le couloir. Il me semble sans fin. J'ai cette impression horrible d'aller vers la douleur et la mort, que chaque pas que je fais m'en approche. Je serre sa main, sûrement très fort, mais il ne dit rien et avance. Il ouvre la porte d'une salle de bain qui semblait coquette. Une baignoire assez grande y est présente. J'entends des rires et souris légèrement.

« On rigolait.. on s'amusait.. Je m'approche de la baignoire pour la toucher du bout des doigts. Il y a une dame.. elle a l'air jolie.. elle prépare le bain et moi.. je ris doucement. Je lui saute dessus en lui montrant quelque chose. C'est lumineux et plaisant. Ça sent bon aussi. Le repas devait être presque prêt. »

Il me fait un signe de tête pour confirmer qu'il m'écoute bien.

« Mais il n'y a pas cette ombre ici.. »

Il semble réfléchir. Je sors alors et l'entraîne avec moi dans le couloir. Il ne reste que deux portes mais l'une d'entre elles m'effraie presque. Cette porte pourtant colorée bien que la peinture soit craquelée et vieillie. Serait-ce.. ma chambre? Je serre encore plus la main de Sherlock en pointant du doigt un détail de la porte. Le verrou est cassé, comme si la porte avait été forcée. Il fronce les sourcils et va rapidement vers celle-ci mais je le retiens. Je dois l'ouvrir moi. Je ne sais pourquoi mais je tremble. J'ouvre très lentement la porte et entre dans une chambre d'enfant. Tout est coloré, tout semble joyeux mais elle est si froide. Je fixe la pièce. J'ai une remontée d'horreur et de peur. Je fais un pas en arrière alors que des images me tambourinent l'esprit.
Il y a les ombres sur le sol. Elles ne bougent plus. Je les secoue. De plus en plus fort. Je cris leurs noms. Je pleure. Je vois du rouge. Beaucoup de rouge. Ils ne bougent plus. Il n'y a plus de rires, plus de cris non plus. La porte s'ouvre dans un grand fracas et je cris.

« Y/n! »

Sherlock me tient de ses deux mains et me regarde avec inquiétude. Mes joues sont trempées. Je tremble. Je regarde mes mains si vite. Il n'y a rien.

« Que se passe-t-il? Me demande-t-il.

- Ils ne bougent plus.. j'ai beau les secouer, leur crier de se lever.. ils ne bougent plus. Je vois du rouge.. mes mains sont rouges. Dis-je en les fixant. La porte s'ouvre d'un coup.. Je tourne ma tête vers la porte d'entrée. Il y a des gens et des sirènes. Ils viennent mais je les secoue. Ils ne bougent plus.. il ne.. respirent plus.. Je regarde Sherlock, la lèvre inférieure tremblante et les larmes coulant de mes yeux. Ils sont morts. »

Sherlock semble avoir un déclic avant de me regarder avec stupeur et surprise.

« Y/n Moore.. »

Ce nom que seul Magnussen a prononcé.

« Tu es.. »

Ses mots semblent si lents à sortir de sa bouche.

« Tu es la jeune fille retrouvée entourée de ses deux parents tués. »

J'ouvre la bouche pour parler mais rien ne sort. Aucun son. Aucun bruit.

« L'affaire.. mes parents en ont parlé. Il me regarde. Personne n'a jamais su ce qu'il s'était passé. Certains pense encore que c'est la propre fille qui les aurait tués car elle était différente. »

Différente? Comment ça différente? En quoi suis-je différente?

« Mais ça n'a jamais été prouvé. Personne n'a jamais su. Personne n'en a jamais reparlé et la jeune fille a disparue. »

Je baisse les yeux et mon regard tombe sur un album. Je passe à côté de Sherlock et attrape le petit bouquin sous le lit. Une trace rouge y est présente, une goutte. Je m'assoie sur le lit et l'ouvre. Il y a une belle femme avec un homme qui porte un bébé. Elle a les cheveux longs et un grand sourire. Lui aussi a ce même sourire et les cheveux un peu longs d'ailleurs. Je tourne la page et vois de nombreuses photos remplies de joie, de bonheur. Je vois la femme et l'enfant jouer aux échecs, dessiner. L'homme danser et cuisiner. La petite s'amuser. Je caresse le papier du bout des doigts.

« Maman.. Ma voix est à peine audible. Papa.. »

Un petit sourire se forme sur mes lèvres alors que de petites larmes tombent sur le papier. J'avais des parents. Ils m'aimaient. On s'aimait.
Sherlock s'assoit à mes côtés et regarde aussi les photos. Pendant longtemps. Lorsque nous ressortons de cette maison, la nuit est tombée. Je soupire en serrant l'album que j'ai gardé.

« Je veux savoir. »

Je regarde Sherlock qui acquiesce d'un mouvement de tête. Alors qu'il interpelle un taxi pour que nous puissions rentrer.

« Alors nous chercherons.. »

Il m'ouvre la porte puis me rejoint dans le véhicule.

« Et nous trouverons. »

Il me fait un petit sourire et son regard semble certain. Il va m'aider à trouver. Il veut m'aider et, surtout, c'est Sherlock Holmes. Aucune affaires ne lui résistent. J'hoche la tête et le taxi démarre.

De retour au 221B Baker Street, je demande à Sherlock de ne rien dire à John car il me faut du temps et que je préfère en parler moi-même. Heureusement, il accepte. Très vite, c'est mon appartement qui devient un champ de bataille. Nous sortons tout ce que nous pouvons comme information sur cette affaire; des journaux, des photos, des interviews, des interrogatoires. Il y a tant de choses. Mais en même temps, il n'y a rien.

Tout mène toujours à une impasse.

All I gotOù les histoires vivent. Découvrez maintenant