Chapitre 62 -Mamie Adélaïde-✅

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Victoire avait passé le reste de la soirée à se morfondre. Son futur n'avait rien d'un conte de fée, alors que sa situation avait pourtant changé.

Après avoir séché ses larmes et épousseté sa robe, elle était retournée dans la salle destinée aux adultes et avait demandé à sa mère s'il était possible de partir rapidement. Philomène, qui elle aussi avait passé une soirée passablement mauvaise, avait acquiescé. Il n'y aurait visiblement pas de future invitation à prendre le thé pour Madame De Réan. Tout avait été dit ce soir.

Victoire avait expliqué sur le trajet du retour, qu'un taxi viendrait la chercher le lendemain matin pour rendre visite à Madame Adélaïde De Réan, à l'hôpital. Philomène demanda à sa fille de lui transmettre toute son affection. Philomène avait fait la part des choses, elle ne m'était qu'Adrienne à l'origine de cette supercherie scandaleuse.

La nuit fut longue pour notre héroïne. Elle pensait à son avenir, tant sur le plan sentimental que celui d'une possible carrière, notamment reprendre la direction de l'orphelinat St Paul. Elle pensait aussi à Marie Beckette, dont elle n'avait pas encore pris le temps pour lui répondre, signé de son nouveau nom. À Arthur et sont départ précipité, à Abel et à Adélaïde, cette femme qu'elle considérait comme une parente. En somme, Victoire tourna une bonne partie de la nuit dans ses draps à la douceur exquise, sans pour autant fermer l'œil plus de deux heures.

Au petit déjeuner, elle se retrouva à table avec ses parents et Cosette. Elle attendrait ce soir pour raconter à son amie le bal et la journée qu'elle allait passer aujourd'hui. Puis, alors que le déjeuner se passait dans le silence, une bonne entra dans la pièce avec un plateau en argent, sur lequel était posé une grosse enveloppe.

Le courrier était destiné à Aloïs, puisque la servante le lui tendit. Aussitôt, Victoire se figea, elle savait ce que c'était. Tout à coup, elle se mit à avoir peur et si finalement elle n'était pas leur fille ? Et si elle l'était, son père changerait-il de comportement à son égard ?

— Qu'est-ce donc ? demanda avec détachement Philomène toujours en froid avec son mari.

Selon Victoire, jamais ses parents ne retrouveraient une complicité telle qu'ils semblaient l'avoir eu à l'époque, avant que l'histoire d'infidélité avec Berthe n'éclate. Le goût des croissants lui parut soudain infâme.

Aloïs ne répondit pas immédiatement à sa femme. Il semblait trop concentré pour cela. Il sortit d'abord des documents écrits, puis l'écrin où se trouvait le médaillon qui avait été expertisé et sa copie, qui avait toujours été portée par Philomène depuis la naissance de leur fille.

— Alors ? Etes-vous satisfait du résultat ? demanda-t-elle ensuite, convaincue elle-même de ce qu'il y avait marqué sur le document officiel.

Victoire et Cosette étaient pendues aux lèvres d'Aloïs. L'attente était insoutenable. Mais il semblait prendre son temps. Lisant le document avec minutie. Quand soudain, il dirigea son regard vers Victoire, un regard la pénétrant de toute part. Comme si, au travers de son visage, il voyait une explication au fait que la lettre lui confirmait bien l'authenticité du médaillon et que la jeune fille devant lui était bien sa fille. Il avait cru dur comme fer que le médaillon serait un faux. La vérité semblait lui faire mal.

— Le médaillon est authentique, dit-il simplement, sans rien ajouter d'autre, prenant sa tasse de café pour la porter à ses lèvres.

Victoire s'était imaginé des excuses, même brève, mais non il n'en fit rien. Elle avait juste la confirmation qu'elle était la fille d'un homme rancunier, infidèle et têtu. Parviendrait-elle à l'aimer un jour ?

— Je le savais, comment en aurait-il pu être autrement... s'exprima Philomène avec une certaine raideur. Pourrons-nous maintenant organiser cette fête ?

Les jumeaux Réan - Roman -TERMINÉOù les histoires vivent. Découvrez maintenant