Chapitre 10 : La fugue

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— Comment vous sentez-vous aujourd'hui, Willow ? demanda le Dr Perkins.

Trois jours s'étaient écoulés depuis Mabon. Will n'était pas dans son assiette. Elle mangeait à peine, dormait peu. Elle se sentait épiée jour et nuit, dormait avec sa baguette dans son poing et gardait toujours une lumière allumée.

— Très bien.

— Avez-vous eu des effets secondaires indésirables à la suite du nouveau traitement que je vous ai donné il y a quelques jours ? Nausées, vomissements, maux de tête ?

Et si le tueur savait où elle habitait ? Si ce n'était pas le cas, ce n'était plus qu'une question de temps de toute manière.

— Non.

— La bouche sèche peut-être ? Une irritation au niveau de la gorge ?

« Vous n'êtes plus en sécurité chez vous ». Les mots pesants de Charles tournaient en boucle dans sa tête.

— Non.

Elle n'accorda même plus d'importance au griffonnage irritant du crayon contre le carnet du Dr Perkins. Elle était perdue.

Quand elle arriva au lycée l'après-midi, elle n'entendit pas les remarques de Hellawes sur ses entretiens avec la psychiatre, ni même le soutien sans failles de Callie à son égard.

— Elle ne devrait plus y aller. C'est une perte de temps, dit l'érudite.

— Qu'est-ce qu'elle dira à ses parents ? Tu y as pensé ?

Hellawes haussa les épaules et donna un coup de coude dans les côtes de Will.

— Tu jettes bien les médicaments ?

Will leva des yeux fatigués et acquiesça. Ses amies la détaillèrent de la tête aux pieds.

— Est-ce que ça va ? demanda Callie. Tu n'as pas l'air dans ton assiette depuis quelques jours. C'est Mabon qui t'a mis dans cet état ?

Will secoua la tête. C'était trop lourd à porter seule.

— Vous vous souvenez les excursions que je fais avec Charles ? Nous avons découvert quelque chose. Et je ne sais pas quoi faire de cette information.

Ses amies se resserrèrent autour d'elle afin qu'elle puisse baisser le son de sa voix. Leurs visages étaient attentifs et inquiets.

— L'Ombre me recherche. C'est moi qu'il traque depuis toutes ces années.

La stupeur se lut sur leurs traits. Hellawes secoua la tête.

— Mais enfin pourquoi toi ? Tu as découvert que tu étais une sorcière il y a peu de temps. Il ne pouvait pas connaître ton existence.

— Je l'ignore. Je ne sais pas plus comment j'ai pu lui échapper.

— Cela n'a aucun sens, marmonna Callie.

— Miss Lewis ?

La voix nasillarde de M. Stevens interrompit leur conversation. Le proviseur était accompagné, à la plus grande surprise de Will, de M. et Mme Lewis.

— Papa ? Maman ?

Les expressions de ses parents étaient insondables. Pourtant, un sentiment d'insécurité naquit au fond d'elle. Cela ne fit que s'aggraver lorsque M. Steven l'autorisa à sécher les cours pour l'après-midi, sans aucun motif. Elle suivit ses parents jusqu'à la voiture, non sans jeter un dernier coup d'œil troublé à ses amies.

Le trajet se passa dans le silence le plus complet. Elle resserra les manches épaisses de son sweat-shirt contre elle. Quelque chose n'allait pas, elle le sentait. Elle ne cessait de dévisager le regard neutre de son père dans le rétroviseur. Lorsqu'il se décida enfin à parler, une ambiance glacée tomba dans l'habitacle.

Les sorcières de BlackstoneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant