Elle rêva qu'elle se trouvait dans une immense clairière couverte de fougères et d'herbes hautes. Visiblement, personne n'était passé par là depuis longtemps. Elle suivait deux silhouettes encapuchonnées devant elle. Elle-même portait une cape sombre et lourde qu'elle reconnut facilement comme étant celle d'un Ombre. Des volutes de fumée sortaient de sa bouche à chaque respiration.
Soudain, une main lui saisit l'épaule et stoppa sa progression. Elle releva la tête. Une des silhouettes encapuchonnées lui faisait face. Elle ne voyait pas son visage, caché par l'obscurité de la nuit. Elle ne vit que de longs cheveux d'un blond très clair descendre sur les épaules, et des yeux bleus comme la glace révélés par l'éclat de la pleine lune. Elle sentit une terreur monter en elle. Cet Ombre était un danger. Elle distingua ses lèvres fines qui s'étirèrent en un sourire maléfique. L'Ombre s'approcha d'elle et porta ses lèvres près de son oreille. Elle pouvait sentir son parfum boisé lorsqu'il lui murmura :
— Je te vois.
La voix était grave, masculine. Elle parcourut son corps de haut en bas, accompagnée de milliers de chuchotements dans sa tête, bruyants et incessants. La main resserra son emprise sur son épaule. Elle avait l'impression qu'elle cherchait à lui broyer les os. Elle tenta de se dégager sans succès.
— Et je vais te retrouver maintenant.
Ses doigts s'enfoncèrent dans sa chair, lui arrachant un cri de douleur. Une énergie brûlante et maléfique traversa sa peau et se mêla à son seidr.
— Will !
Elle se réveilla en sueurs dans son lit. Charles se tenait devant elle, un quartz illuminé par Sowilo à la main, sa baguette dans l'autre. La pleine lune se découpait derrière elle, immense dans le ciel dégagé. Elle sentait chaque cellule de son corps s'agiter, dérangée par une intrusion qu'elle ne saurait nommer.
— Que s'est-il passé ? demanda-t-il, toujours sur le qui-vive.
— Je l'ignore.
Elle passa une main sur son visage. Qu'est-ce que tout cela représentait au juste ? Cela ne ressemblait pas à une vision, dans tous les cas.
Le reste de la nuit fut très court. Charles veilla sur le fauteuil, les doigts près de sa baguette. Will, quant à elle, ne dormit pas. Au petit matin, ils reprirent la route en direction de Blackstone. Ils s'arrêtèrent à une station-service juste avant l'entrée de la ville.
À l'intérieur, un homme les accueillit d'un œil soupçonneux, vêtu d'un pull troué et fumant une cigarette bientôt terminée. Charles paya directement pour l'essence tandis que Will inséra un billet dans une machine. Le café qui sortit n'était clairement pas du café, mais plutôt un mélange aqueux de couleur brun.
Elle repensa à ce qu'elle avait vu la veille. C'était plus comme une sorte de cauchemar très réaliste.
Elle tendit le bras pour prendre le gobelet quand une vive douleur surgit au niveau de son épaule. Les images de son rêve revinrent en flash. En y repensant, c'était très proche de ses sensations lors de sa sortie au parc Fox Brook. Elle revit la silhouette l'empoigner et enfoncer ses doigts dans sa chair comme s'il s'agissait de papier crépon.
Tremblante, elle se releva lentement. Se pourrait-il que... ? Elle abandonna son café et se dirigea vers les toilettes, prise de nausées. Une forte odeur d'urine lui saisit les narines. Les dalles de carrelage grises ne semblaient pas avoir été lavées depuis des lustres. Il y faisait froid ce qui, de toute façon, ne donnait pas envie de s'attarder en ces lieux.
Elle s'approcha d'un lavabo et passa de l'eau glacée sur son visage. Elle avait envie de pleurer sans savoir pourquoi. Elle s'observa alors dans le miroir. Elle était clairement effrayée, comme si son inconscient tentait de l'alerter sur un danger imminent.
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Les sorcières de Blackstone
МистикаMagie, Rituels, Meurtres Découvrez le vrai visage de la sorcellerie ! Willow Lewis, dix-sept ans, ne rêve que d'une chose : que les évènements étranges et incontrôlables dont on l'accuse cessent. Le jour où elle emménage à Blackstone dans l'État du...