Lorne inspira profondément avant d'expirer plus fort encore. Il suivait le rythme imposé par le doigt de son roi à chaque respiration, et cela lui avait bien servi. Il se sentait apaisé, serein, confiant. Sa douleur à la jambe était toujours présente, elle nécessiterait un temps de guérison, mais il ne la sentait plus autant qu'à sa fulgurante descente des hauteurs.
Comme pour accompagner la fin des combats, le retour de ce calme tant désiré, une pluie symbolique et fraîche s'abattit en lourdes gouttes dans les bois. Elle réduisit considérablement l'impact de l'air ambiant qui pesait si lourd dans les cages thoraciques. Tous furent étonnés lorsqu'ils sentirent l'eau blanchâtre s'échouer sur leurs crânes, tant les arbres les coupaient du monde extérieur. On aurait aisément pensé qu'aucune condition météorologique ne puisse passer au travers de ce rempart feuillu.
Personne ici ne craignait la maladie, aussi ils restèrent tous sous les gouttes, profitant de cette douce récompense méritée. Les soldats qui tenaient encore debout s'occupaient de ceux que le combat n'avait pas épargnés. Jihal avait couru rejoindre l'entrée des bois pour prévenir les frontaliers qu'ils avaient besoin de bras pour porter les corps hors d'ici, tandis que les deux autres figures de tête se reposaient sur un tronc d'arbre abattu.
- Comment va votre jambe ? s'enquit Esol en abaissant son doigt, mettant fin à l'exercice de son second.
- Toujours fracturée.
Le roi roula des yeux.
- Vous ne vous lasserez jamais de vous jouer de moi, n'est-ce pas ?
- C'est un privilège auquel je tiens, affirma Lorne en souriant franchement.
- Le contraire m'aurait étonné.
Esol jouait également de la situation, répondant avec amusement aux répliques salées de son ami blessé. En vérité, il s'était tellement inquiété de ne plus le voir durant la bataille qu'il profitait désormais de le savoir bien en vie, à ses côtés, certes blessé mais plus en danger mortel. Il ne supporterait jamais de perdre un allié si précieux, un homme qui avait tout vu de lui, qui le connaissait mieux que lui-même n'y parviendrait jamais. Il ne le réalisa pas immédiatement, mais un bonheur tel venait du fait que jamais ils n'avaient connu de combats réels, de duels quelconques et encore moins de guerres.
Polaris avait prospéré dans l'entente globale depuis sa fondation, et même si des tensions étaient déjà nées, le peuple se savait trop fragile et minuscule pour se permettre de se déchirer seul. Les seuls combats que la petite planète avait connus étaient restés entre les dirigeants de plus petites villes, et ils s'en étaient souvent tenus à des tacles au niveau économique. Au final, chacun parvenait toujours à régler ses conflits et si nécessaire, le roi de l'hémisphère s'en mêlait et l'ordre s'imposait de lui-même. Rien d'alarmant, donc.
Lorne toussota pour s'éclaircir la voix. Il avait quelque chose d'important à dire, cela se lisait sur son visage tourmenté par les questionnements.
- Sire, j'ai découvert quelque chose en montant là-haut, annonça-t-il doucement.
- Quoi donc ? répondit Esol en fronçant les sourcils.
- Quelqu'un, plutôt. J'ai distrait les voleurs pour lui permettre de descendre, et je lui ai dit de se cacher en bas, que nous reviendrions pour elle lorsque tout serait fini.
L'expression concernée du roi se changea en un visage ébahi. Une survivante du convoi. Leur unique et précieuse source d'informations quant à ceux qui l'avaient attaqué. La récompense de toutes ces pertes. Il n'y avait pas une seconde à perdre.
Esol se leva d'un seul coup.- Nous devons aller la chercher, et vite, décida-t-il alors. Vous sentez-vous capable de me montrer où vous l'avez trouvée ?
Lorne serra les dents.

VOUS LISEZ
Fallen
Fantasy✈︎ Tome 1 : Le roi déchu. ✈︎ Esol Priam gouverne la moitié Ouest de Polaris depuis bientôt sept ans. Mais en quelques mois seulement, sa santé décline et le monde commence à le surnommer fou. Il est pourtant persuadé d'être le seul homme clairvo...