42. Le frère perdu

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"Arbre dénudé

Orange chrysalide

Tombée à ses pieds"

Haïku, Renarde de Brume

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Le raclement du mur, lorsqu'il pivota, les stoppa net. Un dernier sortilège s'écrasa contre un bouclier, la baguette de Kaede lui sauta des mains et atterrit dans celles de Yoshinobu, mais elle ne parut même pas le remarquer. Toute son attention, à l'instar de celle d'Hugo, s'était tournée vers le fond du cul-de-sac.

Vide.

« Ça alors, se reprit Kaede, Kurosawa nous a faussé compagnie ! »

Elle s'avança d'un pas, mais Hugo la bouscula pour se précipiter vers l'endroit où se trouvait la gravure d'oiseau, une minute auparavant. Elle avait désormais disparu. Il tâta, palpa, martela, en vain. La paroi demeurait figée face à lui.

« Emiko ! Tu nous entends ? »

Seul l'écho de sa voix lui répondit.

« Faut croire que c'était pas la sortie, finalement, lança Kaede avec une nonchalance narquoise. Bonne chance pour récupérer Kurosawa, derrière y'a peut-être le même genre de puits infesté de squelettes que celui qu'on a croisé.

- Dégage. » grogna Yoshinobu.

Il lui ôtait les mots de la bouche. Hugo se retourna et rendit sa baguette au coéquipier de Kaede. Maintenant qu'ils n'étaient plus que deux, ils allaient sans doute les laisser tranquilles, on ne gagnait pas une épreuve avec une équipe incomplète... La Corneille tendit la main vers Yoshinobu, son rictus suffisant toujours accroché aux lèvres, mais ce dernier déclara :

« T'es trop gentil, Hugo. Moi, je dirais plutôt : va chercher, et tu seras un bon chien ! »

Et d'un puissant geste du bras, il lança la baguette de Kaede à l'autre bout du couloir, le mince morceau de bois se perdant dans les ombres au-delà de quelques mètres, et tinta à peine lors de sa chute. Désormais furibonde, Kaede attrapa Yoshinobu par le col, mais il lui planta sa propre baguette magique dans la jugulaire.

« Tin tin tin, si tu ne recules pas de suite, je peux la transférer dans un coin du labyrinthe qu'on a visité tout à l'heure, tu sais Hugo, celui avec le crabe-scorpion qui voulait nous bouffer et qui sécrétait un poison paralysant ? »

Kaede blêmit.

« Oh mais oui, excellente idée, Yoshi ! répondit-il en insistant sur le surnom. Bonne chance à vous pour retrouver le coin, en revanche... »

Le regard noir, la jeune fille lâcha son coéquipier et se contenta d'un :

« On se tire. »

Reculant à demi, elle s'éloigna en compagnie du reste de son équipe, et Hugo et Yoshinobu patientèrent quelques minutes, afin de s'assurer qu'elle ne revienne pas les attaquer.

« J'aurais dû mettre ma menace à exécution, fit alors Yoshinobu. Traîner avec toi me rend trop doux, Callaghan. »

Il lui ébouriffa les cheveux pour agrémenter sa remarque, et au lieu de se dérober, Hugo se figea, perturbé. C'était le geste qu'il réservait à Sean, mais ici, cela lui paraissait trop... intime. Un coup de coude lui aurait paru plus cohérent.

En apparence aveugle à son trouble, Yoshinobu enchaîna :

« Bon, qu'est-ce qu'on fait, maintenant ? On reprend ton idée de défoncer le mur ?

Le Sourire du Corbeau (Mahoutokoro, tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant