(J'ai trouvé cette image, et j'ai eu l'impression de me retrouver face à Emiko ! Ce n'est pas parfait, parce que par exemple elle n'a pas les yeux bleus, mais ce qui se dégage du portrait me fait vraiment penser à elle !)
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"Pin solitaire
La neige éternelle
Lui tient compagnie"
Haiku, Renarde de Brume
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(Vendredi 10 mai 2007, Ile Iwō Jima, Japon)
« Franchement, depuis que Maeda est directrice, les équipes de tournoi sont de pires en pires. Un aveugle, une coréenne et un étranger sans lignée ? Sans parler de Kurosawa...heureusement que Kaede rattrape un peu les choses, parce qu'il y a peu de personnes qui méritent de participer...
— Mon père a toujours dit qu'une femme ne pouvait pas avoir de telles responsabilités, diriger une école ce n'est pas rien. On voit ce que ça donne maintenant. »
Les voix grinçantes lui parvinrent aux oreilles alors qu'elle descendait dans sa salle commune, décidée à trouver un endroit plus tranquille que son dortoir pour pratiquer la magie calligraphique. Ses affaires pour le week-end étaient déjà prêtes, elle n'avait plus qu'à attendre l'heure où les pétrels-tempêtes viendraient les chercher. Elle s'arrêta net sur une marche, à quelques pas du sol.
Deux garçons de septième année, assis à une table près d'une bibliothèque, grimaçaient au-dessus de leurs notes de cours.
« Ça me donne presque envie de pas assister aux épreuves. On sait direct qui va gagner, y'a qu'une seule équipe compétente.
— Aucun suspense. », confirma l'autre dans une moue dédaigneuse.
Emiko ouvrit la bouche, frappée d'une colère plus virulente que d'habitude, mais leurs paroles lui faisaient perdre ses mots. Elle n'avait encore entendu personne critiquer à haute voix non seulement elle, mais Hugo, Hisaka et une jeune fille d'origine coréenne à qui elle n'avait jamais parlé. Qui ne méritaient pas d'être salis ainsi. Elle s'habituait à ce qu'on la critique elle : si cruel cela pouvait être, c'était justifié par un fait, la trahison de son frère.
Elle serra le bois de la rambarde entre ses doigts. Dénigrer des innocents, en revanche, c'était injustifié. Ils n'avaient pas le droit.
« Je peux savoir ce qui vous fait dire ça ? »
Elle se planta derrière eux, à moitié sûre que ces paroles sortaient réellement de sa bouche. Elle reconnut dans leurs traits des visages croisés à des évènements de l'aristocratie, issus de familles dont elle avait appris la généalogie par coeur mais qui individuellement, ne lui avaient pas laissé de souvenir marquant. Parmi les notes étalées sur la table, elle remarqua une copie bardée de stylo rouge, ainsi qu'une note bien basse apposée au coin supérieur. Pitoyable.
« Vous êtes si peu travailleurs que vous essayez de rabaisser les autres à votre niveau, c'est ça ? Le talent n'est pas inné, vous savez. Il y a une raison pour laquelle vous n'avez pas été sélectionnés par l'Eventail, ni aucun de vos amis. »
Trop surpris de son irruption et encore plus de ses propos, les deux garçons ne réagirent pas.
« Les sans-lignées ou les sang-mêlés peuvent valoir dix fois plus qu'un seul d'entre vous. »
Sachant que sa belle assurance s'effondrerait dès qu'ils lui répondraient, elle fit volte-face et sortit de la salle commune en trombe. Haletante, elle s'adossa au mur, après avoir passé le coin d'un couloir. Avait-elle vraiment fait ça ? Avait-elle réellement confronté deux enfants de grande lignée, prompts à raconter à toute la haute société son tempérament exécrable ? Si sa mère ou son grand-père l'apprenaient, ils en seraient malades. Cependant, elle ne put s'empêcher d'échapper un rire nerveux. Ça faisait longtemps qu'elle les retenait, ces paroles.
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Le Sourire du Corbeau (Mahoutokoro, tome 1)
Fiksi PenggemarEmiko, descendante d'une longue lignée de sorciers nippons, voit son univers voler en éclats lorsque son frère est accusé d'avoir usé de magie noire, jetant le déshonneur sur toute sa famille. Dès lors, il lui incombe de redorer l'image des Kurosawa...