Chap 15 - Enlèvement

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[27 novembre, 01h23]

Seule au beau milieu de la ruelle à peine éclairée, je tournai lentement sur moi-même pour tenter de me repérer un minimum. Peine perdue. Il faisait trop sombre, j'étais trop loin de chez moi.

« Mettre en scène mon enlèvement. »

Seth n'avait rien ajouté après cette simple phrase lâchée de son ton froid habituel. Il m'avait seulement menée jusqu'ici, sans me quitter du regard, et m'avait ordonné d'attendre. Puis il avait reculé, s'était fondu dans les ombres de la rue, et le bruit de ses pas s'éloignants avait fini par disparaître.

« Mettre en scène mon enlèvement. »

Était-ce cela qui était arrivé à Eliza Maonel, à Julia Brook, et à toutes ces autres filles ? Pas kidnappées... mais « embauchées » ? Pourquoi auraient-elles accepté la proposition de Seth ? Pour l'argent ?

Évidemment, pour l'argent. Pourquoi ferait-on ça par plaisir ?

Toutes ces questions ne m'avançaient à rien. J'étais toujours paumée dans cette ruelle. Et j'avais froid. Près de dix minutes s'étaient écoulées depuis le départ de Seth.

Est-ce qu'il me testait ? Est-ce qu'il attendait de voir si je profitais de son absence pour fuir ?

Est-ce qu'il m'observait en cet instant même ?

Qu'est-ce qu'il veut encore, bordel ?

- Seth ?

Ma voix résonna dans la ruelle, mais je n'obtins aucune réponse. J'avalai difficilement ma salive. Cette situation était trop étrange, trop flippante, et je commençais à regretter ma décision prise sur un coup de tête. J'aurais dû en parler à Dorian. Aller voir la police. Ils nous auraient protégés.

J'aurais dû faire tellement d'autres choses.

Mais tout s'était enchaîné si vite...

- Coucou, chaton.

Je me retournai vivement en sursautant, la bouche ouverte sur un cri qui ne franchit pas mes lèvres. Kaelie, aussi belle et grande que d'habitude, me dévisageait de haut en bas, les lèvres pincées. Elle était vêtue d'un mini-short et d'un simple tee-shirt noir qui soulignaient ses courbes outrageusement parfaites. Son seul manteau était une veste en cuir, et je me demandai comment elle faisait pour ne pas avoir froid dans l'air de novembre.

- Que... qu'est-ce que tu fais là ? balbutiai-je d'une voix misérable que je détestai sur-le-champ.

- Je fais les courses de Seth... encore une fois, soupira-t-elle en croisant les bras. Je vais lui demander d'augmenter mon salaire, si ça continue. Tu viens ?

Et la voilà qui repartit en sens inverse, à l'opposé de l'endroit par lequel j'étais arrivée.

- Je... et on va où, exactement ?

Kaelie s'immobilisa soudain et pivota vers moi.

- J'oubliais ! s'exclama-t-elle soudain en revenant vers moi d'un petit pas pressé.

Ce faisant, elle plongea la main dans la poche de sa veste et en sortit... une aiguille. Une aiguille, longue de bien vingt centimètres, dont la pointe effilée luisit à la lueur du lampadaire à quelques mètres de nous.

- Tu vas faire quoi avec ça ? questionnai-je.

Elle me sourit. Un sourire aussi faux et glacial que celui de Seth... avant qu'elle ne lève l'aiguille et en enfonce la pointe dans mon bras. Profondément.

Belle de NuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant