CHAPITRE XXI - WYATT

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Je crois que Julian n'a jamais ressenti ce que je ressens en cet instant. Si c'était le cas, il aurait arrêté à la seconde même où il a commencé à caresser mes hanches. J'ai eu tant de garçons dans ma vie, tant de corps entre mes doigts, mes draps. Entendu tant de souffles, de gémissements et de plaintes rauques déclarant de façon abstraite un plaisir qui vous flambe les entrailles... J'ai vécu tant de choses, et pourtant jamais rien d'aussi exaltant que la peau de Julian qui se balade afin de découvrir la mienne.

Je ne partirai pas, c'est ce qu'il a dit. Dans un sens, je l'ai prit comme une promesse qui, je l'espère, sera respectée. Le problème est qu'il a ajouté pas ce soir, et mon désir le plus profond voudrait qu'il reste pour toujours. C'est vrai, je m'avoue vaincu... Julian m'a eu. Il ne s'agit pas d'amour, ce serait trop facile ! Et puis, ça n'existe pas, n'est ce pas?

Non, il ne s'agit pas d'amour, mais plutôt de désir. Un désir comme je n'avais jamais connu auparavant, quelque chose de si fort qu'il est quasi impossible de s'en défaire. C'est ironique, mais cet homme de Dieu a réussi à me posséder à la façon du Diable.

- Julian, soufflé-je.

Juste son prénom... j'aurais très bien pu me taire, laisser la pulpe de ses doigts découvrir mon torse, mais je suis incontrôlable. Dans ma tête, plus rien ne tourne sauf le fait de lui faire l'amour. Cette fois, je ne parle pas d'une baise vulgaire entre coups de reins agressifs et capote usagée dans une poubelle du Caprice. Je parle de longs baisers échangés entre deux hommes, de soupirs inattendus, de langues qui se découvrent lascivement.

Alors que ses lèvres embrassaient ma mâchoire, le voilà qu'il relève sa tête et plonge ses billes azur dans les miennes, bien plus sombres. Je détaille chaque parcelle de son visage comme s'il apparaissait devant moi pour la première fois. J'ose, plus délicatement qu'à l'habitude, poser mon index sur ses lèvres pulpeuses. Son regard est différent qu'à l'accoutumée. Julian n'est plus cet homme qui se cache derrière un vêtement liturgique. Le voilà sur terre, la vraie Terre.

- Tu sais à quel point je suis vulgaire généralement, avoué-je, mais ce soir... ce soir, Julian, tu n'es pas baisable comme j'ai pu si souvent le penser. Tu es beau. Juste beau, comme personne d'autre ne peut l'être.

- Tais-toi, me somme-t-il d'une voix à peine audible.

Il a raison, ça risquerait de tout gâcher. Je dois me taire et laisser nos consciences apprécier ce moment. Mais puisqu'il y a toujours cette partie de moi qui domine le jeu, j'inverse les rôles et son dos se retrouve contre le mur. Je le surplombe avec mon corps, entoure son visage de mes avant-bras et nos souffles se mélangent. Nos yeux également.

- C'est pourquoi nous ne perdons pas courage, commence Julian. Et lors même que notre homme extérieur se détruit, notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour.

L'incompréhension doit certainement se lire sur mon visage, mais il ajoute ;

- Conrinthiens...

Je l'arrête d'une main levée.

- Je me fiche que ça soit de l'ancien ou du nouveau Testament, de Corinthiens ou de Pierre, Paul, Jacques. L'important est ce que j'ai pu comprendre à travers ça.

Julian baisse les yeux, mais je relève son visage du bout des doigts.

- Et crois-moi, il n'y a rien de plus plaisant que ça, conclus-je.

- Ai-je le droit, Wyatt ? Ai-je le droit d'aimer ce qui se passe entre nous actuellement ? De découvrir une peau qui n'est pas la mienne? De rougir face à tes sourires, à tes soupirs et tes... plaintes ?

Quelle torture insoutenable ! Mais quelle torture insoutenable doit-il subir pour en arriver à me demander ça ! Pour une fois, je dois bien avouer que mon égoïsme a pris la fuite, et mon coeur se fend quelque peu lorsque la peur s'installe dans ses yeux.

GOOD BOYS GO TO HELLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant