CHAPITRE XVII - WYATT

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Jamais je n'aurais pu imaginer me retrouver dans une situation pareille, à suivre un jeune curé jusqu'à la cellule du Père Julian. Pour être honnête, marcher dans ces couloirs me fait honte. J'ai honte de moi, de ce que j'ai pu faire dans cette église. Avoir provoqué Julian de la sorte était franchement déplacé, et le pire est que je pensais arriver à mes fins de cette manière.

Quel con !

L'avoir vu dans un état tel qu'il l'était, ensanglanté et au sol, m'a fait prendre conscience qu'il ne méritait pas une once de mes vices. De ma folie. J'imagine qu'il est assez fort pour passer au-dessus de ça, et heureusement ! Quelqu'un doté d'un mental plus faible aurait pu être traumatisé par ma venue, mes gestes déplacés, ma sexualité débridée. La drogue a joué un rôle important dans tout ça, et j'en suis conscient. Je sais que cette merde a bousillé quelques-uns de mes neurones, mais je n'étais franchement pas obligé d'agir comme je l'ai fait.

- C'est dingue que le Père Julian vous fasse à ce point confiance, dit frère Paul, deux pas devant moi.

Tout en jetant un regard méfiant autour de moi, sur ces murs froids, je fronce les sourcils.

- Pourquoi ?

- Ne le prenez pas mal, monsieur Moore, mais nous n'avons pas reçu la meilleure image de vous pour être tout à fait honnête.

Je préfère ne pas rétorquer.

Julian l'a mis au courant de ce que j'ai fait dans le confessionnal ? Impossible, je suis certain que lui-même se sentait trop honteux pour en parler ! Il n'aurait jamais dit un seul mot à ce sujet, encore moins du reste. Et le reste en question me ramène quelque peu en arrière. Ce fameux soir où nous avons échangé un baiser auquel je ne m'attendais guère. Duquel je ne suis pas remis d'ailleurs, parce que plus j'y pense, plus mon cœur s'emballe. Cette sensation de perdre pieds n'a d'importance pour moi que durant l'acte de chair. Mais cette fois, ce ne sont rien que des souvenirs, et ils me font perdre la raison. Pourquoi mon cœur bat-il si fort alors que je ne fais rien d'autre que suivre frère Paul ?

Ridicule.

- Nous y voilà, souffle ce dernier. Je vous attendrai ici, je retourne à ma cellule passer un coup de fil à mademoiselle Buekens.

Sans le regarder, j'acquiesce. Frère Paul ouvre la porte de la cellule de Julian et me laisse y pénétrer. Lorsqu'elle claque dans mon dos, je me retrouve seul dans cet endroit qui me ramène immanquablement à avant-hier soir. Je baisse les yeux vers le sol ayant été minutieusement nettoyé, et pourtant je suis capable de revoir Julian... juste là, le visage tuméfié, défiguré. La rage s'empare de mon corps, parce que je ne sais rien. En fait, peut-être que c'est préférable ! Si je savais, si seulement je savais qui lui a fait ça, je jure devant Dieu que mes poings serviraient à quelque chose.

Très vite, et en essayant de garder l'objectif de ma venue en ligne de mire, je trouve la commode dont il me parlait et prends quelques sous-vêtements, trois t-shirts et même deux pantalons de survêtement. Je fourre le tout dans un grand cabas et y planque même sa paire de pantoufles. Après avoir pris un pull dans le dernier tiroir, je le pose contre mon visage et respire l'odeur du tissu. Son odeur. Celle qui sent la jeunesse, le dynamisme, et me rappelle notre première rencontre. Qu'il était beau... bon sang, qu'il est beau.

Ça suffit, cette odeur va me tuer.

A la dernière seconde, je me souviens du chapelet sous l'oreiller. Je me penche sur le lit et soulève les coussins.

- C'est quoi ça ? soufflé-je.

Bien évidemment, il y a le chapelet, mais pas que. Ce qui m'attire en premier est un carnet à la couverture noire. J'aurais pu le confondre avec un simple livre, mais ça n'en est rien. C'est un petit journal que, malgré mon envie de rentrer dans le droit chemin à l'égard de Julian, j'attrape. En le feuilletant très rapidement, je remarque qu'il y a énormément de choses écrites à l'intérieur.

GOOD BOYS GO TO HELLOù les histoires vivent. Découvrez maintenant