CHAPITRE 17

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PDV de Kate:

"_ Jack! Je vole!
_ Ouais mais il va finir par crever." répondit platement la jeune fille à son écran plat, qui diffusait Titanic.
Elle était affalée sur le canapé du salon, vêtue d'un vieux bas de pyjama en pilou et ingurgitant des popcorns par poignées, tout droit sortis d'un immense saladier rose fluo.
Kate se sentait excédée, lassée de tout. Le monde semblait exécrable, d'une nullité absolue.
Parfois elle se demandait ce qui la maintenait en vie.

La sonnette retentit. Une fois. Puis deux. Trois. Et enfin un son ininterrompu qui lui grésilla les tympans. Mais elle n'avait aucune envie d'aller ouvrir.
"Si tu crois que c'est en me rendant sourde que je vais me lever..." soupira-t-elle, s'enfonçant un peu plus dans le sofa, des popcorns gisant sur son tee-shirt licorne- qu'elle n'avait toujours pas enlevé. Peut-être même qu'elle puait.
Le bruit horripilant cessa enfin. Remplacé vivement par la sonnerie stridente de son téléphone.
Elle ne regarda même pas le nom de l'être abominablement cruel venant la sortir de son marathon-films romantiques.

Puis ce fut au tour du fixe.
"Arg c'est qui ce cinglé!" hurla la jeune fille de lassitude.
Elle se traîna alors jusqu'à l'entrée, légèrement à bout de nerfs. Puis, voyant dans la lentille que le tortionnaire n'était autre qu'Ashley, elle eut un moment de doute.
Que venait donc faire sa pseudo-amie chez elle?

À peine eut-elle le temps d'ouvrir la porte que déjà la petit brune s'engageait dans l'entrée, lui claquant une bise sonore sur la joue, et se ruant vers le miroir pour remettre son brushing en place.
"Bah alors Kate qu'est-ce-que tu fais? Ça fait vingt minutes que je t'attends! Mais... Pourquoi t'es pas prête pour la fête!" cria-t-elle d'une voix suraiguë.
Moins fort je parle pas en ultrason!
"_ La fête? demanda-t-elle, vaseuse.
_ Oui! Celle de Dereck! De samedi. On est samedi!
_ Qu'est-ce-que tu fais là? fut la seule question que Kate réussit à articuler.
_ Je suis venue pour te faire belle! Et c'est pas une mince affaire à ce que je vois..."
Kate leva les yeux aux ciel.

"I'M HOMELE-EEEEEESSSSSSSSS!" beugla Ashley, comme si on venait de lui enfoncer une batte de baseball dans les côtes.
Pas con...
Kate ne rêvait plus que d'une chose: s'en aller le plus loin possible et enfermer cette version maléfique de Madonna dans le coffre du cabriolet écarlate.
Malheureusement, elle conduisait.

Lorsque la chanson prit fin- et la torture de Kate par la même occasion- Ashley se retourna vers elle, baissant enfin le volume de la radio.
Ses cheveux virevoltaient dans le vent et Kate pensait déjà à la tête qu'elle ferait lorsque, arrivée chez Dereck, elle comprendrait que son brushing était foutu.
La brune prit alors un air très sérieux, comme sur le point d'élucider un mystère exceptionnel. Elle planta ses iris dorés, soulignés d'un trait d'eye-liner noir, dans ceux de Kate, les lèvres pincées, les sourcils froncés.
"Je crois qu'il est temps que je t'avoue le nom de mon prétendant." dit-elle lentement, comme les huissiers de justice dans les émissions de téléréalité, possédant entre les mains le sort décisif d'autruches siliconées à la chevelure aussi filasse que peroxydée.

Kate soupira, replaçant une mèche de cheveux derrière son oreille, tentant vainement d'arborer une mine un minimum intéressée.
"Alors?" demanda-t-elle finalement, feignant un intérêt total.
Ashley fixa la route un moment, ses longs doigts ornés de bagues multiples encastrés dans le volant.
Puis, reposant les yeux sur Kate d'un air théâtral, déclara:
"Tu connais Ben?"

Son souffle se coupa un instant. La jeune fille tourna les yeux vers le rétroviseur. Puis, les dents serrées, demanda:
"_ Lequel?
_ Clayton."
Elle sentit comme un poids s'abattre sur elle.

L'adolescente resta confinée dans un mutisme total jusqu'à la fin du trajet, tandis qu'Ashley lui expliquait à quel point Benjamin était fabuleux.
"Je crois que je lui plais... Enfin... Comme à tous les autres mais lui, il a l'air gentil. Et intelligent. En tout cas je compte bien me le faire ce soir..."
La rousse tenta de rester hermétique aux déblatérerions interminables de la brune.
Ce serait dommage qu'un œil au beurre noir abîme ton si beau maquillage.

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