Chapitre 3

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Alex attendit avec une impatience difficilement contenue son cours de tp de SVT qui avait lieu en toute fin de matinée, juste avant le déjeuner. Ce jour-là, leur professeur leur avait annoncé une dissection de grenouille. Toute la classe paraissait passablement excitée lorsque Alex se laissa tomber sur une chaise haute à côté de son ami Timothée après avoir grignoté à la hâte le paquet de gâteaux que lui avait remis sa mère.

Le ventre un peu plus plein, le jeune homme se sentait de meilleure humeur, après sa déconvenue du réveil et la succession de catastrophes qui s’en était suivie (son professeur d'histoire l'avait accueilli très sèchement). Le cours de sciences naturelles était en effet l'un de ses préférés, non pas parce qu'il adorait découper des grenouilles en morceaux (il n'était pas un psychopathe, tout de même !), mais parce que Jean-Baptiste le suivait aussi, comme il le lui avait rappelé tout à l'heure (même s'il n'y avait absolument aucune chance pour qu'Alex l'oublie).

Son regard se tourna discrètement vers le jeune homme de son cœur, pour l'espionner en douce, comme d'habitude (il prenait toujours soin de s'asseoir derrière lui, car il aurait été beaucoup moins discret de devoir se retourner sans arrêt comme une girouette).

Il fronça les sourcils en voyant que Jean-Baptiste était installé ce jour-là sur une paillasse à côté de Nathalie Delaunay.

Nathalie était une fille aux longs cheveux blonds et aux yeux bleus dont la beauté sculpturale faisait tourner la tête à presque tous les garçons. Qui plus est, elle était bonne élève et tous les professeurs lui vouaient une véritable adoration. Alex était sûr et certain que ce n'est pas à elle que M. Cotty aurait donné une retenue pour avoir eu une panne de réveil et être tombée dans une flaque. Non, la vie était beaucoup plus simple lorsqu'on était une belle et riche jeune fille. C'était l'évidence même.

Le professeur de SVT, un homme encore jeune avec de grosses lunettes rondes, était en train de donner avec enthousiasme toute sortes d'instructions qu'Alex n'écoutait que d'une oreille. M. Barnard n'avait pas une grande autorité naturelle et tout le monde se sentait en droit de bavarder pendant son cours, surtout pendant les travaux pratiques. Alex préférait, pour sa part, se concentrer sur l'homme de sa vie, un spectacle dont il ne se lassait pas. Jean-Baptiste était tout de même plus intéressant que les organes internes d'une grenouille.

Nathalie battit des cils en gloussant. Elle chuchota quelque chose à l'oreille de ce dernier et Jean-Baptiste se mit à rire à son tour sans bruit après lui avoir jeté un regard complice.

Alex sentit la jalousie lui serrer les entrailles. Est-ce qu'ils sortaient ensemble, maintenant ? Il ne manquerait plus que cela ! Lui aussi aurait voulu faire rire Jean-Baptiste. Et pas parce qu'il se serait ridiculisé en tombant tête la première dans une flaque de boue.

Timothée lui flanqua soudain un coup de coude et il sursauta.

— Bon alors, s'impatienta son ami. On lui fait la peau à cette grenouille ?

Alex roula des yeux et remarqua pour la première fois que leur professeur venait de déposer les cadavres des malheureux batraciens sur chacune des paillasses.

— Elle est déjà morte, jugea-t-il utile de préciser en luttant pour ne pas reculer le plus loin possible du corps encore à moitié congelé.

Timothée se saisit d'un scalpel.

— Paix à son âme. Qu'est-ce qui t'est arrivé, au fait ?

Alex grimaça.

— Je suis tombé dans une flaque de boue.

— Oh. D'accord, réagit son ami.

Et il enfonça sa lame dans le corps de la grenouille tandis qu'Alex posait instinctivement ses mains sur ses yeux avec un petit cri dégoûté, incapable de se retenir plus longtemps.

Alex ou le portable merveilleux (bxb) [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant