Assis sur le banc face à l'école de Tiago, je glisse pour la énième fois une main dans mes cheveux en maudissant le coiffeur. Bordel, quelle idée merdique j'ai eu d'en tenter un nouveau pour avoir le rendez-vous plus rapidement. Il m'a foiré et en beauté. Playmobil, ma nouvelle marque de fabrique.
Je prie juste pour que Tiago n'est pas la bonne idée de vouloir regarder l'ornemental sur mon crâné, vu que le coiffeur m'a rasé pour rattraper sa merde. Parce qu'avec ses conneries, il est remonté haut sur ma tempe et très franchement, le tatouage partiellement caché par une feuille de rosier est toujours trop visible. Je me jette d'un pont si Tiago le voit.
La cloche sonne et un flot d'étudiants se met à sortir. Mercredi midi, la liberté leur tend les bras. Au moins, les grandes vacances approchent, plus que cette fin de semaine, deux autres et c'est la délivrance. Avec ça, je réalise que mes résultats de partiels tombent la semaine pro et je m'enfonce dans le dossier du banc, mon pied qui tape sur le sol. Mon portable tourne entre mes doigts tandis que je guette la tête de Tiago, ses piercings à l'oreille et son sourire de charme. J'espère qu'il va regarder son téléphone avant de partir, que je n'ai pas fait la route pour rien.
Il y a quatre jours, il me parlait d'acheter des poissons. Aujourd'hui, je vais l'y amener. Une pensée pour Cornflakes qui aura un nouveau repas de roi à se mettre sous la dent.
— Dis-moi que tu as un truc à manger, j'ai la dalle.
Je lève un sourcil alors que Tiago se plante devant moi, mains tendus dans l'espoir d'être nourri. Mais ses yeux constatent rapidement que je n'ai rien à part une veste et mon portable. Le temps est nuage, l'air un peu plus frais, et ça alors qu'on est à quelques jours de l'été.
— Faut qu'on aille acheter un truc, je lui réponds en me levant. Allez, on se bouge.
— Et mon bisou de bonjour ?
Je m'arrête tandis qu'il attrape doucement mon poignet, son sourire qui revient en force sur son visage. Ses yeux brillent, son t-shirt lui va beaucoup trop bien et je ne parle même pas de son jean qui lui fait un cul d'enfer. Pourtant, je me sens obligé de regarder autour de nous pour constater qu'il y a encore beaucoup d'élèves qui patientent, des adultes, sûrement certains de ses collègues. Je n'ai pas envie qu'il ait des problèmes avec son établissement, les choses peuvent vite dégénérer s'il tombe sur des connards d'homophobe.
— Arrête de réfléchir, me murmure soudain Tiago en passant sa main sur ma nuque. La directrice est mariée à une femme et on est dans un établissement qui, pour une fois, n'est pas à chier sur la liberté et l'ouverture d'esprit. Donc... un bisou ?
— Tu l'as mérité ? je réplique quand mes épaules se détendent.
— Carrément, j'ai bossé toute la matinée ! Et ils ont pas été super sympa, je suis un prof martyrisé par ses élèves...
— Je croyais que c'était une école sympa ?
— Tu me saoules.
Son sourire dévoile ses dents et je le laisse m'embrasser. Quand il s'écarte, nos doigts se lient et je le tire vers le centre de la ville.
— Bon, du coup, on fait quoi ? Hé, t'es passé chez le coiffeur ?
Je repousse sa main lorsqu'il a l'idée de dégager mes cheveux et Tiago a un petit rire. Pourtant, il n'insiste pas. Tranquillement, on marche et je lui explique le programme de l'après-midi : trouver le prochain repas de son chat, trouver un nœud papillon pour le mariage de Tilla et Gaëtan puis flâner dans les boutiques à l'approche des soldes. Ça a l'air de lui plaire parce qu'il acquiesce en serrant ses doigts sur les miens. Un arrêt dans une boulangerie, on prend un sandwich qu'on mange en continuant de marcher.
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Ficção GeralLyoris a fait de son corps une œuvre qui raconte son histoire. Tiago, lui, est subjugué par toute cette encre qui cache une âme abîmée. Mais ouvrir son cœur, c'est raviver des blessures. Lyoris le sait mais accepte de jouer le jeu quand Tiago comm...