Chapitre 11

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Je m'approche de Colin, furieuse de son comportement et de sa façon de me regarder : comme si je ne représentais rien. Il me toise de son petit air arrogant habituel, mais je commence à y être accoutumée.

Luan : "Non, mais tu te prends pour qui ? Je joue du piano depuis que j'ai dix ans. Je ne suis pas une putain de débutante ! Groupe de métal ou non, mon pote, il n'y a personne d'autre dans cette pièce susceptible de vous filer un coup de main."

Je reprends mon souffle, tandis que le regard de Colin reste vrillé au mien. Malgré toute la colère que je ressens en ce moment, je ne peux m'empêcher d'être troublée par ces yeux perçants. Je me collerais des gifles. Ce type est aussi agréable qu'un champ d'ortie. J'ai envie de souffrir ou quoi ? Je devrais m'intéresser à un garçon gentil, posé, drôle. Pas à un métalleux aussi sensible qu'une huître.

Colin continue de me toiser comme si j'étais du purin. La tension et la colère m'envahissent de plus belle.

Luan : "Je suis passée au conservatoire. Je peux jouer du rock autant que du jazz, si ça t'intéresse. Ma grand-mère était choriste dans un groupe de jazz connu, ce qui n'est pas encore ton cas, que je sache. Ton fameux groupe de métal a besoin de ce concert et a fortiori tu as besoin de moi."

Je me noie dans son regard. Le bleu de ses yeux a l'air de devenir liquide tant il est furieux. Mais il faut bien que quelqu'un le fasse redescendre un peu de son piédestal ! Je le sens vibrer et la colère transpire par tous les pores de sa peau. Mais, bizarrement, je ressens autre chose de presque charnel. Je dois rêver cette tension. Je ne suis pas habituée à vivre des histoires passionnées et passionnantes. Je ne suis pas douée pour percevoir ce type d'émotions intenses. Je dois être en train de tout inventer. Colin ne peut pas ressentir autre chose que de la colère à mon égard. Même Samuel, mon ex, avait du mal à ressentir autre chose pour moi que de l'amitié.

Luan : "C'est toi qui vois, Colin. Es-tu capable de passer outre tes petits a priori merdiques et tes clichés ? Es-tu capable de te comporter comme un vrai professionnel ?"

Je plante mon index sur son torse. J'ai l'impression de mettre le doigt sur une bête féroce. Il ne cherche pas à m'en empêcher. Mon sang cogne dans ma tête. Colin me fait péter les plombs ! Je ne me suis jamais imposée de cette façon. Je n'en reviens pas d'oser dire ce que je pense avec un tel aplomb. Mais ce type me fait sortir de mes gonds ! Est-ce que je suis seulement capable de m'asseoir au piano devant un public ? Je n'en sais rien, bon sang !

Je m'approche encore jusqu'à frôler son torse. Il m'épie. Il a l'air de boire mes paroles, même si la ride entre ses sourcils s'est creusée. J'essaie de rendre ma voix plus forte pour sembler moins timorée. Je fais mine d'être indifférente.

Luan : "Ce n'est pas mon groupe, Colin. Si tu n'as pas besoin de mon aide, je m'en vais. Je ne joue pas ma carrière."

Un éclair jaillit dans son regard. Mon pouls est chaotique. Il hésite. Je le sens bien, il est nerveux. Non, il est en colère !

Luan : "Je ne joue pas ma vie. C'est toi qui décides. Mais tu n'es pas tout seul dans l'histoire."

Je désigne Adam d'un geste de la main, sans le quitter des yeux. J'ai l'impression que le monde autour de nous a disparu. Même Matt se tait et se fait tout petit, près d'Adam. Il n'y a plus que Colin, moi et la violente tension qui règne entre nous.

Luan : "Moi, je n'ai pas besoin de toi, Colin... C'est toi qui as besoin de moi."

Il plisse les paupières. Je sens que j'ai touché le point sensible. Tout à coup, il saisit une mèche de mes cheveux. J'ignore son geste.

IS IT LOVE ? - COLIN : Mélodie du CœurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant