CHAPITRE 15 : RANCŒUR ET FLEURS

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L'absence est aussi bien un remède à la haine qu'un appareil contre l'amour — Jean de la Fontaine

DEMETRIO

Je crois que quand je te tuerai

Je lui enverrais bien des fleurs pour évacuer ma rancœur.

♛♛♛

Du sang coulait de mes mains. Un sang presque gluant tant il était frais. J'ai essuyé grossièrement les quelques gouttes qui perlaient dans le creux de ma paume, avant de ranger soigneusement mon arme, qui reflétait la pâleur de la lune.  J'ai dégainé mon briquet doucement, avant de vider l'essence sur lui.

Je crois que je n'ai jamais été aussi calme après avoir décapité un homme.

Ou peut-être que j'aime seulement savourer ma vengeance lentement et sadiquement.

Je ris.

C'est tellement bien.

Je me sens vraiment bien.

Le feu se répand

Comme dans mon cœur.

Mais plus de rancœur.

Il y a juste moi

Et le corps fumant,

De Marco Ferretti.

♛♛♛

— Alors ce voyage aux Maldives, Deme' ?

J'écrase ma clope dans le cendrier encore fumant, et ouvre la fenêtre. Je rive mes yeux vers Valentino, qui est rentré du Portugal. Ses yeux verts, comme les miens, sont luisants de curiosité. Je ne dis toujours rien, et m'assois.

— Très reposant.

Il se met à rire d'amusement. Il fout sa main dans ma boîte à cigare avant d'en allumer un, les yeux brillants comme un gamin devant un parc d'attraction, tentant de déceler une pointe d'ironie dans ma gestuelle.

—  T'es allé retrouver ta gazelle, ou bien tu-

— Je n'y suis pas allé pour les plages, Valentino. J'y suis allé pour nettoyer la crasse.

Il ne dit rien, et me crache un nuage de fumée dans la gueule. Je lui arrache le cigare de la main, le fiche dehors, entre mes doigts, pour qu'il vienne fumer par la fenêtre. Je déteste que d'autres personnes - excepté moi - fument dans mon bureau.

Il ricane comme un requin, avant de se lever, nonchalant, pour le récupérer à la fenêtre.

—  Enzo...?

— Non. Un petit brun qui dormait avec des putes aux bras, sur une belle plage. J'ai fait un beau feu avant de foutre son corps dedans.

—  Rassure-moi, tu ne l'as pas brulé vivant, hein ?

— Non. Je lui ai foutu une balle dans le torse et je lui ai tranché la tête. Je l'ai envoyée à Enzo.

Cette fois-ci, Valentino explose de rire. Une espèce de gloussement qui me fait sourire méchamment.

—  Tu vas le tuer lui aussi ?

—  Pas tout de suite. Je vais attendre qu'il transmette l'info à Eva, puis je le tuerai.

Valentino m'observe du coin de l'œil, avant de jeter son cigare par la fenêtre.

Quel gâchis.

— Refais ça et je te les fais bouffer jusqu'au dernier, Valentino.

Il ne dit rien, sourit, et sort de mon bureau, sans un bruit ni un mot. Je ferme la fenêtre dans un clap violent, et m'écroule sur mon fauteuil, les paupières lourdes. Les vols de nuit m'ont toujours ravagé la tête. Je ferme les yeux, et expire profondément. Je crois que je devrais me prendre des vacances.

EVAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant