EVA
Pression. Sur mon front. Sur mon cœur.
Lenteur. Sur mes douleurs.Ouvre les yeux. J'ai l'impression que cette main me dit de m'ouvrir au monde. Mais je ne veux pas sortir de cette transe. Je veux me laisser perdre dans mon sommeil léger et qui flotte. Mais la main me secoue maintenant.
C'est avec lenteur que je me réveille. Et. Dans un clignement des yeux. Mes pupilles se verrouillent dans ce bleu. Ce bleu. Qui m'aspire douloureusement et me sors de ma léthargie.
Mon corps étendu devant cette porte brisée. Je n'ai pas fui. Je l'ai laissé partir. Cela me déchire l'âme maintenant.
Eva, tu es conne ou quoi ?
C'est vrai. J'aurais dû partir.
Pourquoi je ne suis pas partie. Pourquoi je suis là. Pourquoi il est là. Pourquoi on se verrouille du regard. Pourquoi il me regarde comme ça. Pourquoi il ne dit rien.
C'est horrible de voir comme je suis faible en ce moment. La soirée d'hier soir me revient en flash.
Dis moi pourquoi tu es là.
Si tu savais Aaron. Je ne saurais même pas te répondre.
Tu es trop importante dans cette histoire pour périr.
Importante...
Je crois. Oui. Merci Aaron. Tu me donnes la force de me redresser devant lui aujourd'hui.
Cette force remonte doucement. Mes jambes sont fortes. Mon visage est ferme. Car malgré l'incompréhension qui se noie dans ses yeux perçants, la violence est là. Il est en colère. Une colère noire. Lourde.
Je ne dis rien. Peut être que nous restons là, plantés l'un en face de l'autre à se scruter une bonne minute. Ça m'a paru être une éternité.
Dans ses yeux j'ai l'impression d'être cette boule noire. Qu'il traine derrière lui. J'ai l'impression qu'il s'efforce douloureusement de me haïr pour dissimuler sa curiosité maladive.
Tu es trop curieux , Demetrio.
Ça reste dans ma gorge. Je ne veux pas lui adresser un mot. Pourquoi gaspiller de la salive alors que les mots ne lui parlent pas ? Il ne comprend que la douleur. La violence. Le froid, le chaud. La paix lui est inconnue. C'est presque aveuglant de voir qu'il se noie dans son propre venin, comme pour se garantir une place dans son propre enfer. Il s'enfonce, se laisse emporter par de excès. Il est exactement l'homme que je ne supporte pas. La douceur doit lui faire défaut. Mais je sais que je ne le connais pas suffisamment. Nous sommes des inconnus droits devant l'un et l'autre. Simplement. L'un voit son empire s'écrouler et l'autre savoure cette chute. Comme une anesthésie, l'autre se plonge dans le chaos désespéré de l'âme de l'autre. Dans un autre contexte. Nous serions étrangers. C'est drôle et tragique. Que nos âmes soient là. Quel hasard. Quel destin. Que c'est tragique.
L'électricité et l'animosité se sent dans notre interaction. Pas de besoin de mots pour se comprendre. Pas besoin d'émotions pour se sentir vivant. Juste besoin de cette vengeance. Cette haine. Qui pulse, pulse dans notre sang. C'est peut être notre seul point commun. Cette petite boule noir que nous traînons respectivement derrière nous. Comme c'est chaotique.
Mais c'est irrévocable. Son visage est près du mien maintenant. Je ne saurais l'expliquer, d'un seul coup...
Nous sommes irrévocablement attirés l'un par l'autre.
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EVA
RomanceElle se redresse. Dans ces grands draps noirs, amples, qui entourent sensuellement son corps. Mes yeux se plissent. Le soleil est sorti. Comme son briquet. Et j'ai vu, lentement, la flamme dorée, luisante, danser sur le reflet de ses lèvres. Ses gr...