Chapitre VI

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Mya

Après les douloureux souvenirs survenus lors du bal je m'étais rendue dans ma chambre afin de me cacher, mes larmes menaçaient de couler et je ne pouvais pas montrer cette faiblesse devant les autres.
 
Merci Arzhel pour le conseil...
 
Je tombais dans les bras de Morphée peu après le passage des fées pour me préparer à dormir.
 
Je fus réveillée par une voix assez forte.
 
— On se réveille !
 
Qui braillait aussi fort le matin ?
 
Je levais la tête et tentait tant bien que mal de voir qui c'était.
Oh mon mentor.
 
Elle sourit et enleva ma couette.
Sympa.
 
— Tu ne réussiras pas l'épreuve de tir à l'arc si tu dors jusqu'à pas d'heure.
 
Je grognais en silence, elle n'était pas commode.
 
— Aller, va t'habiller puis on ira dans la salle d'entraînement.
 
— Il y en a une ?
 
Elle hocha la tête, d'un air impatient.
 
Je levais les yeux au ciel et alla dans la salle de bain en attrapant les vêtements qu'elle m'avait apporté.

C'était une tenue simple coupée dans un tissus élastique noir.
 
Je sortis de là et remarquais mon mentor adossé au mur, elle semblait en avoir marre d'être ici.
 
Je marchais jusqu'à son niveau et me stoppais, hésitante.
 
— Vous connaissiez bien Misae ? demandais-je timidement.
 
Elle se redressa et se racla la gorge.
 
— Elle était douée au combat. Cette petite avait du potentiel.
 
Je souriais, c'était vrai qu'elle semblait être douée.
 
Elle s'en alla mais me fis signe de la suivre, ma fin était arrivée, je n'allais pas survivre à cet entraînement.
Mes peurs se sont accentuées en voyant la salle d'entraînement.
 
Nous étions au trentième étage, je pensais que j'allais traverser la plaque de verre qui se trouvait sous nos pieds mais mon entraîneuse m'a rassuré en affirmant que des centaines de gens venaient ici et que rien n'avait bougé.
 
J'espérais qu'elle avait raison. 
Les murs étaient noirs et blancs, enfin seulement deux car celui face à l'entrée était un mur d'escalade et celui à ma gauche était une grande baie vitrée.
 
Elle installa les cibles et me plaça sur la ligne blanche. Évidemment qu'elle n'allait pas me faire démarrer de loin.
 
— Tiens ton arc, tu sais l'utiliser ? demanda-t-elle.
 
Je secouai négativement la tête, gênée.
 
Elle soupira et vint derrière moi. 
 
— Droitière ou gauchère ?
 
— Droit.
 
— Alors prend la partie la plus épaisse dans ta main droite et la corde dans la gauche.
 
Je m'exécutais, peu confiante.
 
— Lève ta main droite et_ non regarde. 
 
Elle se stoppa dans ses explications et me montra.
 
Elle mit ses mains sur les miennes ce qui me provoqua des frissons. 
Je ne savais pas si j'étais gênée ou simplement mal à l'aise.
 
Je suivais ses indications et essayais de mieux comprendre. Pourquoi un bout de bois et une corde était si difficiles à manipuler ?
 
Je soufflais et laissais mon corps se laisser faire. Après tout c'était une professionnelle et pas moi.
 
La cible en face de moi n'était qu'à quelques mètres et pourtant, pas une fois elle fut touchée.
 
Mais mon entraîneuse ne lâcha pas l'affaire et échangea l'arc contre des fléchettes.
 
— Sérieusement ? demandais-je vexée.
 
— Tu n'as aucune précision, au moins tu ne risques rien avec ça.
 
Je me retenais de planter cette fléchette dans le sol et de m'en aller mais une chose me retenait, ma survie.
 
Alors j'exécutai les ordres et lançais ce bout de plastique plus d'une centaine de fois avant d'atteindre la cible et même d'atteindre quasiment le milieu.
 
Elle souriait presque et ça ce n'était pas mal. Elle avait l'air plus détendue qu'au début. Je comprends, sa réputation allait baisser si son élève venait à se faire éliminer à la moitié de la compétition.
 
— Bien, on repasse à l'arc, annonça-t-elle en me passant l'arme.
 
Ouch, j'aimais bien les fléchettes finalement, ce truc était vraiment lourd.
 
— On recommence, positionne-toi.
 
J'étirai la corde tandis que je levais le manche.
Cette fois-ci la flèche ne se décala pas et n'en fis pas qu'à sa tête.
Mais le moment le plus délicat arrivait, tirer.
 
— Inspire lentement et lâche au moment d'expirer, me conseilla-t-elle.
 
Je suivais ses indications et ma flèche ne se retrouva pas dans le mur. 
Toute contente je sautillais sous le regard moqueur de mon entraîneuse.
 
— Très bien, maintenant atteint le centre.
 
Je la regardais amusée, comment c'était possible ?
 
Je recommençais à bander l'arc mais cette fois Alvar se mit derrière moi et me guida, comme au début. La même sensation sur ma peau revint, mais je l'ignorais.
 
Avec son aide la flèche atteignit presque le milieu de la cible. 
Mais je savais que seule ça n'allait pas être la même chose.
 
— Comment vais-je me concentrer à l'épreuve ? demandais-je inquiète.
 
— Tu es facilement déconcentrée ? 
 
J'hochais positivement la tête. 
 
Elle réfléchissait deux minutes avant de se tourner vers moi.
 
— Pense à l'arène vide, il y juste toi et la personne que tu aimes. Regarde-la lorsque tu commences l'épreuve, pile à ce moment, après ça sera trop tard. Quitte à lui parler, ça la rendra réelle si elle n'est pas présente.

Je la regardais étrangement, elle pouvait être sentimentale ?
 
Puis je la remerciais et recommençais l'épreuve. A qui allais-je penser ?
 
Melody ?
 
Non non, elle n'était que source de tristesse. Je devais choisir quelqu'un qui me rendais heureuse. 
 
Misae...
Elle me rendait heureuse elle.
Mais sa mort provoquait une forte nostalgie.
 
Je soufflais et me concentrais, encore.
Les conseils d'Alvar furent très utiles. Je savais à présent me placer correctement et éviter de crever un œil à mon entraîneuse.
 
— Je pense que tu es prête, ta précision et coordination sont bien meilleures qu'au départ. m'annonça-t-elle.
 
— Vraiment ? demandais-je peu convaincue.
 
— Tu n'arriveras pas première mais tu ne finiras pas dernière non plus. Et puis nous n'avons plus le temps pour l'entraînement. Le déjeuner va être servi est tu es obligée d'y assister. Puis l'épreuve commencera.
 
Je levais les yeux au ciel,
 
— Déjà ? demandais-je.
 
— Tout se déroule en trois semaines mais les premières grandes épreuves sont casées en une.
 
Génial.
Je devais donc survivre trois semaines.
 
Elle me laissa retourner à ma chambre pour me changer mais je ne pouvais pas y rester, j'avais l'ordre de descendre manger avec les autres participants. Dommage.
 
Je fis donc un crochet dans la salle de bains, une robe avait été sortie, je devinais par les sœurs, elle était couleur crème à hauteur de genoux mais elle était moulante. Nous devions gagner la compétition ou séduire les autres participants ? Ses fils étaient accrochés au col et venaient fermer le dos de la robe par des croisements.

Mes femmes de chambre m'aidèrent à me changer et me coiffer. Sans elles je serais tout le temps en retard.
Puis je descendis jusqu'au deuxième étage afin de me jeter dans la gueule des loups. Bah quoi, ce sont tous des prédateurs chassant la couronne.

Ils méritaient de se battre et de perdre leur temps pour cette princesse qui n'était pas capable de choisir un prétendant.
 
Si un jour je la croise, je lui ris au nez. Moi m'incliner ? Jamais.
 
La salle à manger était immense, entièrement vitrée de verres noirs avec des leds venant éclairer directement par le sol, il était compliqué de montrer un désintérêt face à cette architecture sobre mais somptueuse.

Le repas était assez bon mais était-il m'était impossible de le savourer avec tous ces regards autours de moi. Je savais que j'étais un mystère, mon arrivée ne fut pas anodine. Le roi en personne m'a choisi pour cette compétition, mais quand même, fichez-moi la paix !
 
Évidemment que je n'allais pas leur dire ça, je tenais encore à la vie... sinon je ne serai pas ici.

Nous n'avions pas eu le temps de nous rendre dans nos appartements, nous devions aller dans le hall dans les plus brefs delais.
 
Je m'y rendis donc mais personne n'y était. Étais-je en retard ? Avant même de chercher une âme qui vive je fus téléportée dans l'arène.

Ma tenue habillée fut changée par une autre qui cette fois était bleue. Un chemisier souligné par un demi-corset blanc et un pantacourt en flanelle bleue venait finir la tenue.
 
Il n'y avait pas d'équipe cette fois, c'était juste nous contre le reste. Bonne nouvelle nous étions que quarante mais je n'étais quand même pas à l'aise avec un arc dans les mains.
 
L'arène, surplombée de gradins en pierre et couverts par des grands caches-soleil bleus, était remplie par les habitants d'Eryx. Tous avaient un ou une favorit.e et hurlait à plein poumons son nom pour l'encourager. 

Ce n'était donc pas calme. L'agitation était à son comble car l'épreuve de tir à l'arc était l'une des plus attendues de la compétition.
Je savais que je m'étais entrainée comme j'avais pu, en plus d'Alvar qui m'avait beaucoup aidée mais les participants qui m'entouraient m'angoissaient, en plus du public.
Le sol sablé était délimité en quarante parties, je devinais, pour chaque tireur. J'étais à trois places d'Ilmatar, je me sentais donc moins seule.
Le bruit sourd venant des gradins retentissait et annonça le début de la compétition. Les concurrents s'alignèrent sur la ligne de tir. Je pris une profonde inspiration, me concentra et tira ma première flèche. J'atteignis miraculeusement la cible et un soupir de soulagement s'échappa de mes lèvres. Une sur dix de faite.
 
Les autres concurrents tiraient à tour de rôle, chacun faisant preuve d'une grande habileté. Les flèches sifflaient à travers l'air, atteignant les cibles avec une grande précision.
 
J'étais en dixième position après la première manche, mais je pouvais faire mieux... n'est-ce pas ? Je pris le temps de penser deux secondes à une personne importante pour moi puis je pris une profonde respiration avant de viser avec précision. Ma deuxième flèche atteignit sa cible avec une telle précision que le public retint son souffle. D'où ça venait ? 
 
J'avais seulement pensé à la première personne qui venait dans mon esprit... Mais ce n'était pas Misae.
 
La compétition se poursuivit, et les concurrents commencèrent à être éliminés un par un. Je me rapprochais du haut du classement, et chaque flèche que je tirais était de plus en plus précise.
 
Finalement, il ne restait plus que dix-neuf concurrents en lice. J'étais toujours en compétition, et étais déterminée à y rester. 

C'était la flèche décisive. Je manquais la cible, c'était fini, je l'atteignais et je restais dans la compétition.

J'inspirais puis expirais en tirant ma dernière flèche, la regardant voler à travers l'air et atteindre la cible avec une précision incroyable.
 
Le public retint son souffle alors que les juges comptaient les points. Finalement, les résultats furent annoncés : j'avais remporté la compétition en étant quinzième sur les quarante concurrents. Je soupirais, je passais tout juste.
 
Mes premières pensées allaient vers Alvar, elle allait être fière de moi. Mais comment lui dire que c'était à elle que j'avais pensé avant d'atteindre ma cible ?
 
C'était simple, elle ne l'apprendra jamais.
 
Je me dirigeai donc vers un endroit reculé de la foule, les participants étaient partis voir le public, leurs familles et fan mais je n'avais personne à aller voir. Après tout je ne venais pas d'ici.
 
Mais même loin des gens, il y en a qui arrivent quand même à me trouver, dont Alvar.
 
— Bouh.
 
— Alvar !
 
— Félicitations, tu as survécu.
 
— Grace à vous. Merci pour votre aide.
 
— Je n'ai pas fait grand-chose, tu me remercieras lorsque tu auras gagné la compétition. En attendant tu as encore huit épreuves.
 
— HUIT ?! Ah non non je ne survivrai pas.
 
— Il ne t'en reste plus qu'une dans cette arène puis tout se passera au palais.
 
Je levais les yeux au ciel, je n'étais pas une fan de la famille royale.
 
— Un problème ? me demanda-t-elle en remarquant mon air ennuyé.
 
— Je n'aime pas tant que ça la famille royale.
 
Elle passa une main dans ses cheveux, zut je ne le sentais pas.
 
— Je ne sers pas la famille royale... j'en fais partie.
 
Je me figeai.
 
— Il ne manqueriez plus que vous soyez l'héritière.
 
Ce fut à son tour de se figer puis elle hocha négativement la tête.
Ne me dites pas...

— Je suis sa sœur. 

Un soupir de soulagement s'échappa de mes lèvres.
 
— M- mais... Ça n'a aucun sens, pourquoi vous êtes là ?
 
— Car j'adore enseigner et me battre.
 
— Vous êtes bien étrange. Vous pourriez vous prélasser dans un palais au lieu d'entrainer une participante maladroite.
 
Elle haussa les épaules.
 
— Oh tu sais, j'aime vraiment ce que je fais.
 
Je souriais, au moins elle se plaisait ici. Mais elle était quand même des leurs.
 
— Je n'ai rien avoir avec eux, encore moins avec ma sœur.
 
— Vraiment ?
 
Elle hocha la tête.
 
— Elle a toujours aimé l'argent, les belles choses et le pouvoir. Mais moi, c'est la liberté qui m'intéresse.
 
— On dirait que vous ne l'êtes pourtant pas...
 
— Je serai libre une fois ma sœur mariée.
 
— Alors vous attendez avec impatience la fin de la compétition ?
 
— Oui, en quelques sortes. elle se stoppa puis reprit avec entrain, aller il faut que tu rentres, je dois t'entraîner pour l'épreuve de nage. 
 
— On ne s'arrête jamais ? me lamentais-je.
 
— Si, tu pourras te reposer au palais. Aller hop en avant.
 
Je grognais et suivais ses ordres. Elle avait un peu raison.
 
Les autres participants faisaient de même alors je suivi le groupe.
Des calèches d'autre temps nous attendaient à la sortie des arènes. Toutes tirées par des créatures fantastiques. J'ignorais pourquoi nous n'étions pas téléportés jusqu'à la tour mais ça ne me contrariait pas.
Je montais dans la première calèche sans même me rendre compte que j'aurais pu monter avec Ilmatar. Mais au lieu de me retrouver avec des participants qui voulaient ma peau, j'étais avec un petit groupe qui semblait ne pas vouloir se confronter à moi.
 
Les paysages étaient magnifiques. Il n'y avait pas l'impact des humains.
Pas de pollution.
Les décors fleuris et colorés étaient si beaux, si vivants.
Au loin des agriculteurs fauchaient la terre avec sourire, les plantes semblaient leur parler.

Des elfes nous regardaient curieux et les fées jouaient entre elles.
 
Pourquoi nous ne vivions pas ici ?
 
Je pourrais rester dans ce monde juste pour sa beauté.

J'appris par des conversations que l'arène se trouvait à Zaira, la terre des oubliés. C'était pour ça qu'il y avait autant de végétation. Mais une fois passé la frontière d'Allendra, la flore laissa place aux immeubles et ses innombrables fleuves.
 
Nous arrivions enfin à la tour et je décidais de me mêler aux autres participants.
Nous n'étions à présent que vingt mais parmi eux je repérais Ilmatar. Je soupirais et la rejoignis sous les regards lourds des autres.
 
— Mya ! 
 
— Ilmatar , quel bonheur de te voir.
 
Elle me prit dans ses bras.
 
— Tu as survécu, bravo.
 
— Je n'ai pas fait grand-chose. Mon entraîneuse m'a beaucoup aidé.
 
— Tu as une entraîneuse ?
 
J'hochais la tête, pourquoi elle me posait-elle cette question ?
 
— C'est juste étrange.
 
Je la regardais, vraiment confuse.
 
— Personne n'a d'entraîneurs. affirma-t-elle.

Je réfléchissais, peut-être le roi a eu pitié de moi ? Ou quelqu'un avait profité de ma faiblesse...
 
Mais comment lui expliquer mes théories sans lui avouer que je ne venais pas de ce monde ?
 
— C'est effectivement étrange. 

Restons impassible.
 
Elle m'avait présenté à quelques participants qui étaient assez gentils.
 
J'avais donc fait la connaissance d'Ahmes et Fenrys. 
Elle était très gentille et sociable mais Fenrys était distant et ne semblait pas vouloir se mêler aux autres. Mais Ilmatar avait apparemment réussi à l'apprivoiser.
 
Nous discutions de tout et de rien, j'osais presque demander des informations sur ce monde. Mais seules des questions sur la capitale venaient. Ilmatar venait du sud, elle ne connaissait donc pas cette ville. 
 
J'avais donc appris que la ville réunissait les trois clans lors des événements. Mais tous les festivals et événements se passaient à Zaira. Il me tardait d'en apprendre plus sur ce pays.
 
Cette histoire d'entraîneur me trottais dans la tête, je ne savais pas à qui je pouvais en parler.
L'idée d'en parler directement à Alvar me traversa l'esprit mais je me ravisais, ça n'allait pas bien se finir.

Between Our Worlds [FINIE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant