Chapitre XII

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Mya

Ce ne fut pas le soleil éblouissant qui m'avait réveillé, non, c'était le brouhaha autour de moi.

Femmes de chambres, valets et gardes restaient en retrait mais Sereia et les participants restants étaient proches, juste à mon chevet.

Ce n'était pas mon lit, ça ressemblait à une infirmerie, que ce soit par le blanc immaculé des draps et murs ou par la présence de matériel médical.

Comment je connaissais le matériel médical ? Il m'a fallu une chute d'une chaise lorsque j'avais cinq ans pour finir aux urgences. Ce n'était pas une simple blessure, non, en dessous de moi se trouvait des bouteilles brisées, j'étais donc ouverte sur tous les membres qui avaient rencontrés les morceaux de verre.
Evidemment mes parents n'étaient pas stupides au point de me laisser saigner là sur le sol de la cuisine, je salissais tout voyons.
C'était la première et la dernière fois que j'entrais dans un hôpital.

Je fermais les yeux ce qui affola Sereia.

— Mademoiselle, revenez avec nous !

J'ouvris instantanément mes paupières, il ne faut pas paniquer comme ça dis donc.
Mais lorsque je voulais la rassurer aucun mot ne sortit de ma bouche, comme si j'étais bloquée.

Un médecin s'avança jusqu'au niveau de Sereia.

— Il semblerai que sa chute ait causée nombres de maux à cette demoiselle. Les cordes vocales ont dû recevoir un choc en même temps. Ne vous en faites pas, d'ici quelques heures de repos vous serez apte à reparler, ce qui est de la marche... c'est à voir.

— Très bien, merci Monsieur Alaric.

— Ce n'est rien, maintenant vous pouvez tous quitter la pièce afin de laisser Mademoiselle Stevens se reposer.

Tous l'écoutèrent et me saluèrent.

— Je vais vaquer à mes occupations, n'hésitez pas à demander de l'aide aux infirmières ou à me solliciter.

Je le remerciais d'un sourire et le regardais partir.

Est-ce qu'Olympia allait bien ? Avais-je toujours ce lien avec elle ou bien celui-ci s'éteignait une fois le cavalier sur terre ?

— Le lien existe toujours, clama une voix mystérieuse.

— Olympia ?! demandais-je.

— Oui c'est bien moi. Comment te porte-tu ?

— Aphone et alitée. Qu'est-ce qui t'es arrivé ?

— On m'a ramenée aux écuries, je ne suis pas blessée, ne t'inquiète pas, me rassura-t-elle.

— Tant mieux.... soufflais-je

— Je suis désolée.

— Pourquoi donc Olympia ?

— Par ma faute tu es blessée.

— Tu n'y es pour rien, le tronc d'arbre nous a surpris.

Il eut un silence.

— Olympia ?

— Oui pardon, je réfléchissais.

— A quoi ?

— Personne n'a accès à la forêt de plus Il n'y a pas eu de tonnerre depuis longtemps. Cette histoire est bien étrange et improbable.

— Faudrait-il en parler ? m'inquiétais-je.

— Tu ferais mieux oui, le palais est sous haute surveillance, c'est-à-dire que ce tronc d'arbre a été placé par magie, sans alerter les gardes.

— Après ce n'est qu'un arbre... déclarais-je.

— Mais cela veut dire que la personne derrière est capable de s'introduire dans l'enceinte du palais, et ça ma chère Mya, ce n'est pas bon du tout. Annonça Olympia.

J'entendis quelqu'un rentrer dans l'infirmerie.

— Je te laisse, quelqu'un approche.

De l'autre côté du lien je sentis sa compréhension.

— Mya...

Je tournais la tête et vis Alvar. Elle était habillée d'une robe en soie verte, elle était divine, non la robe mais celle qui la portait.

Je voulais lui répondre mais j'étais toujours muette.

— On m'a mise au courant de ton état, je peux toujours te comprendre.

Elle me perdait déjà, comme si sa présence ne m'embrouillait pas assez...

J'entendis un rire franc, que lui arrivait-elle ?

— Je suis ravie d'entendre que je te fais perdre la tête. Ma chère Mya, j'ai la capacité de lire dans les pensées.

Impossible.

— Tout à fait possible.

Ce n'est que le hasard...

— Le hasard n'existe pas.

...

Alors qu'en est-il de ma venue ici ?

— En quelques sortes tu es liée à ce monde, j'essaye encore de savoir pourquoi.

Tu ne pouvais pas me prévenir ?!

— Excuse-moi, je t'avoue qu'en ce moment mes journées sont occupées.

Ce n'est rien...
D'ailleurs tu savais que les cavaliers et leurs montures pouvaient communiquer ?

— Evidemment ! Mais ce n'est pas commun, déclara-t-elle.

C'est à dire ?

— C'est-à-dire que tu n'es pas censé le savoir.

Je la regardais, interdite. Tout le monde n'avait pas cette capacité ?

— Ne me dis pas que tu en es capable ? murmura-t-elle.

Je ne dis absolument rien.

— Par les Dieux.

Elle souffla et vint s'asseoir à mes côtés.

— Mya, je doute de ton humanité.

Je ne dis rien, attendant la suite de sa phrase.

— Le palais est truffé de magie, à un moment ça t'aurait affecté, de même pour ta capacité à communiquer avec les animaux. De plus ce n'était pas un simple cheval, tu as monté un pégase et Olympia est loin d'être douce et docile.

Elle va m'annoncer que je suis une elfe ? N'empêche ça serait drôle.

— Non tu n'es pas une elfe, enfin je ne le pense pas. Je suis en pleines recherches lors de mes temps libres... Tu es en droit de savoir d'où tu viens.

Elle... se préoccupait de moi ?

— Depuis le premier jour.

Je portais mes mains à ma gorge, bon sang j'aimerai pouvoir parler de voix vive !

Elle me regarda comme si je m'étais envolée.

— Pourquoi me regarde tu... comme ça ? Attend, je viens de parler ?

— Absolument, et ta magie vient de se déclencher.

— Ah c'est pour ça... MA MAGIE ?!

Effectivement la gêne dans ma gorge avait disparue.
Mais j'avais des pouvoir ? Comme les êtres de cet endroit ?
Non c'est impossible. Je suis née sur terre, pas à Isernia !

— En est-tu sûre ?

— Les photos de naissance... ce n'était pas moi ?

— Je ne peux pas t'aider dans tes souvenirs mais je vais essayer de tout découvrir. Je te le promets.

Je m'approchais d'elle et la prit dans mes bras.

— Merci Alvar...chuchotais-je.

~~~

Après son départ j'eu le temps de m'ennuyer plusieurs heures. Fenrys ou Raihn passaient de temps en temps afin de me tenir compagnie mais cela ne durait jamais longtemps.

Je suis restée allongée à l'infirmerie jusqu'au soir, puis le médecin avait déclaré que je pouvais retourner dans mes appartements.
Ce fut grâce à l'aide d'Arzhel que je retournais saine et sauve dans la chambre attribuée.
Tandis qu'il me poussait dans mon fauteuil roulant j'essayais de faire la conversation.

— Alors, tu es revenu au palais dès que la compétition s'est déplacée au palais ?

— Ouais, nous avions été affectés en premier lieu à la tour mais maintenant nous sommes revenus à nos postes d'origines.

— Donc fini la surveillance des participants ?

— Plus de la sécurité que de la surveillance, Mya.

— Moui moui, je sais que j'étais une menace, marmonnais-je

— Et maintenant tu es leur précieux joyaux. déclara-t-il en souriant.

— Si tu le dis. Bon on arrive quand ?

— On y est, princesse.

— Pas encore, corrigeais-je.

— Tu n'es pas contre ? Ce n'est pas toi qui "détestais la famille royale" ?

Je me figeai, il va le crier sur tous les toits du palais ou bien ?

— Moins fort !

Il se mit à rire de plus belle. Il était incorrigible.

Il me poussa jusque mon lit, honnêtement je ne pouvais pas me changer donc je restais en chemise d'infirmerie et me glissais dans mes draps frais.

Cette journée m'avait épuisée alors que j'étais restée allongée tout le long.
Le sommeil m'appelait et j'y répondis instantanément.

~~~

Nous étions le matin du dernier jour de repos, cela voulait dire que la compétition allait reprendre dès demain après-midi, quelle joie.

Une personne vint toquer à ma porte lorsque l'horloge sonna onze heures.
Qui osait déranger une blessée ?

Ce fut dans un affolement monstre que les sœurs vinrent à mon chevet. L'ainée, Aislin, esquissa une révérence.

— Voyons, pourquoi tant de formalités ? demandais-je confuse.

— Veuillez-nous excuser de vous déranger, et veuillez nous excuser pour notre erreur.

— Quelle erreur Aislin ?

Elle se releva et je vis de la peur dans son regard.

— Nous...nous avons oublié de vous donner cette invitation.

— Eh bien ? Ce n'est pas si important, n'est-ce pas ?

— C'est une invitation pour le bal des finalistes de... ce soir.

Je me levais d'un bond. Effectivement, recevoir cette missive plus tôt aurait été mieux.

Je soufflais et me retournais vers mes caméristes qui effectuaient sans cesse des courbettes.

— Ne vous inquiétez pas, j'ai toute la journée pour m'y préparer.

— Nous vous remercions mademoiselle. Nous allons vous aider, c'est votre premier bal après tout.

Et probablement mon dernier...

Un bain aux roses fut préparé par Iris, tandis que les trois autres préparaient d'avance la tenue, les accessoires de coiffure et le maquillage. J'allais être apprêtée de la tête aux pieds.

Iris me guida jusqu'au bain où j'y découvris avec surprise des bougies et des huiles naturelles.
J'avais l'impression de recevoir un traitement de faveur tellement l'atmosphère était détendue.
Je me glissais dans l'eau brulante en fermant les yeux, c'était divin.
Iris et Nysa vinrent me laver avec des éponges toutes douces et étonnamment je ne refusais pas, c'était bien trop agréable pour dire non.
Alors que je m'endormissais presque, Aislin arriva avec un plateau.

— Le repas est arrivée mademoiselle.

Je me levais instantanément et m'emmitouflais dans le peignoir blanc. Enfin, je mourrais de faim !

J'allais dans le salon et commençais mon repas lorsqu'on vint toquer à ma porte.
Par les Dieux, je ne serais jamais tranquille.

Aislin ouvrit la porte sur Alvar, celle-ci était en tenue officielle avec sa couronne et tout le blabla.
Que venait-elle faire ici ?

— Alvar ?

— Mya... je venais voir comment tu te...

Elle s'arrêta et fixa ma "tenue".
Je me couvrais d'autant plus, pendant un instant j'avais oublié j'étais en peignoir.

— Je venais voir comment tu te portais, se reprit-elle.

— Hum, je vais mieux, merci... J'allais me préparer pour le bal de ce soir.

Elle se racla la gorge et souria.

— Alors à ce soir.

Et elle tourna les talons, comme si de rien était.
Cela devenait étrange.

Mais j'essayais de ne pas y penser et de me concentrer sur la préparation.
Une fois mon repas fini je m'asseyais près de la coiffeuse.
Nysa vint définir mes boucles avec de la mousse tandis que Thea accrochait une magnifique broche qui était une valse de perles avec des petites roses.
Une fois ma coiffure terminée, Aislin me maquilla légèrement. Elle couvrait mes paupières de rouge et soulignait mon regard de khôl noir avant d'appliquer du mascara, faisant ressortir mes yeux bleus.

— Du rouge à lèvres... ? Non, mademoiselle n'en a pas besoin, murmura Thea.

Je souriais, ces attentions me manquerons...

— Debout, nous allons vous passer vos chaussures. demanda Aislin.

Je m'exécutais et observais les talons qui m'attendaient. Ils étaient or et rouges, avec des lanières qui faisant le tour de ma cheville. Sur le bout était cousu un oiseau doré, comme s'enflammant. Et dans son fond, une lune, cela était étrange.

Iris vit mon regard et souri.

— C'est l'emblème du royaume, il représente un phénix s'enflammant dans la nuit.

— Wow, c'est magnifique.

Je comprenais à présent les emblèmes que je voyais de ma fenêtre.

Une fois les chaussures mises, on me présenta la robe que j'allais porter. Son corset en dentelle rouge en forme de cœur était bordé d'or et dépassait sur la jupe aux quatre volants. La jupe principale en dentelle rouge et noire était posée sur un immense jupon, où reposait déjà du satin rouge.
Les volants encerclaient le jupon principal mais laissait de l'espace devant. Dans des pliages somptueux et des broderies éclatantes, le tout brillait.

Je restais bouche bée.
Cette robe était un conte de fée à elle-même.

En voyant mon sourire, les sœurs soufflèrent de soulagement et m'aidèrent à la mettre.
Le corsage était agréable, mais les jupons étaient lourds. J'ignorais comment j'allais danser.

On me donna des gants en satin rouges et m'orna de bijoux en rubis et d'or.

Par tous les Dieux !

Je ne me reconnaissais plus dans le miroir. Ma silhouette était affinée, ma peau brillait et mes cheveux étaient éclatants.
Le bleu océan de mes yeux ressortait parfaitement.

Je me tournais vers les fées.

— Je vous remercie infiniment.

— C'était avec grand plaisir ! s'exclama Aislin.

J'entendais l'horloge sonner dix-neuf fois.
C'était l'heure.

Je sortis de ma chambre mais ne vit personne dehors. Etais-je en retard ?
Je me précipitais donc vers l'aile quartz qui était quelque part vers le nord d'après Arzhel.

Lorsque j'entendis le son des violons je sus que j'étais au bon endroit.
J'arrivais devant la porte et expirais. Tout allait bien se passer.

Deux valets m'ouvrirent les grands pans de bois blanc.
Un grand escalier s'ouvrait sur une salle somptueuse. D'un sol en marbre blanc et un plafond recouvert de constellations, la salle de bal était lunaire.
De grands tissus de couleur jaune, rose et bleu étaient suspendus tout le long des murs comme pour séparer la salle en trois. Au fond se trouvait un vitrail qui représentait la lune et le soleil, et en dessous, une estrade s'y trouvait, avec trois trônes.

Une partie de la cour se trouvait déjà dans l'assemblait où se trouvait les deux autres finalistes.
Tous étaient habillés d'or et d'orange.
Alors pourquoi la robe que l'on m'avait imposée était rouge ?

Je descendis les marches marbrées sous le regard de l'assemblée. Des centaines paires d'yeux me fixaient.
J'essayais de calmer mon rythme cardiaque mais cela était trop compliqué.

Lorsque j'atteignis le sol de la salle de bal je fus accueillie par Fenrys.

— Eh bien, quelle impression tu nous fais Stevens.

Je lui souriais à moitié.
Sa tenue était somptueuse. Son costume orange et or faisait ressortir ses cheveux bruns.

— Pourquoi suis-je la seule en rouge ? demandais-je.

— D'après ce que j'ai entendu, c'est la couleur du ou de la favorit.e.

Je restais muette.
Comment pouvais-je être la favorite sans avoir rencontré l'héritière ?

— Où est la famille royale ?

— Ils arriveront en milieu de soirée.

L'orchestre joua un air envoutant.

Mon ami s'inclina et me proposa sa main, que j'acceptais poliment.

Nous nous joignions aux danseurs et effectuons une valse à trois temps parfaitement. Je riais avec lui lorsque nos voisins se marchaient sur les pieds.
Comme quoi tous les nobles ne savaient pas tous danser.

La musique continua de plus belle pendant près de cinq minutes puis s'arrêta doucement.

J'effectuais une révérence puis alla vers le buffet que j'avais repéré lors de notre danse.
Je mourrais de faim !

Sur les longues tables nappées se trouvait des mets qui semblaient délicieux. Je pris des beignets de lilas couverts de miel.
J'en pris une bouchée et retenais une exclamation de surprise. C'était délicieux ! J'avais l'impressions de manger des nuages.

Lorsque j'entendis une musique qui me transportais je lâchais le buffet et entrainais mon ami sur la piste.

Les violons s'agitaient et je virevoltais. Tandis que les danseurs effectuaient parfaitement les pas, moi je dansais à ma façon. Je me rendais au centre en incitant Fenrys à faire de même. Il me rejoignit et nous dansions de mille façons différentes, selon les tonalités de la musique, selon les rythmes.

Lorsque l'orchestre se fit silencieux je saluais mon partenaire de danse. Mais avant de pouvoir quitter le cercle je remarquais que tout le monde nous applaudissait.
Je restais muette.

Ils avaient aimé.

"Je comprends pourquoi c'est la favorite. "
"Quelle danse émouvante !"
"Vivement qu'elle anime les futurs bals !"
"J'espère qu'elle deviendra reine."

Tous ces chuchotements me laissaient perplexes. Ils m'aimaient. La cour appréciait celle que j'étais.

Soudain le bruit des trompettes se fit entendre.

Cela annonçait l'arrivée de la famille royale.
Les portes d'ouvrirent sur le roi et la reine, habillés somptueusement de rouge, suivis... d'Alvar.
Seulement elle, où était l'héritière ?

Elle était habillée de vert, ce qui mettait en valeur la couleur de ses cheveux.

— L'héritière Aderyn est somptueuse dans sa robe mais pourquoi ne porte-t-elle pas les couleurs de l'emblème ? s'exclama quelqu'un à côté de moi.

L'héritière ?
Non, il n'y avait que sa sœur, Alvar.

— N'est-ce pas sa sœur ? demandais-je.

Le noble à mes côtés secoua négativement la tête.

— Non ma chère, la princesse Alvar a les cheveux blancs, comme le roi. L'héritière a les cheveux de la reine Clarya.

Rouges. Comme ma robe.

Between Our Worlds [FINIE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant