Bienvenue dans l'équipe, Cailín

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Et c'est à la lueur des flammes de la cheminée que nos soldats se préparèrent, lacèrent leurs bottes, enfilèrent leurs gants en cuir et enfin, serrèrent les sangles de leur gilet pare-balle. Le plus silencieusement possible, ils armèrent un simple pistolet, rangèrent leur couteau et se placèrent devant une table et se mirent à parler à voix basse. Charlotte fit glisser ses doigts sur le papier bleuté qui se froissa sous son passage.

- Sullivan peut nous emmener jusque-là.

- L'île de Jersey. Lâcha Price.

- Et après ? Demanda Soap, les mains serrées autour de son gilet.

- L'armée française vous récupère. Mais pour ça vous devez arriver jusqu'à Paris. Renchérit Emily.

- Comment ? Demanda Gaz, presque inquiet.

Les petites routes, la marche, de jour comme de nuit. C'était risqué, mais à eux cinq, ils pouvaient le faire. Sur terre, comme en mer, ils étaient en danger, et ne pouvaient se fier à personne. Price avait interrogé la Française du regard, et c'est dans un murmure grave qu'elle lui avait répondu, s'il le fallait, ils abattraient Sullivan, s'il avait parlé, Wolfe et ses hommes pouvaient déjà les attendre sur le quai. Mais ils étaient prêts, à faire feu, Soap brisait d'ailleurs parfois le cercle et s'éloignait. Ses doigts soulevaient alors un rideau et il jetait un coup d'œil. Mai seul le vent pliait les herbes, un souffle calme et silencieux tandis que leurs ombres se projetaient sur les murs, dansaient avec les flammes. Ghost, Price et Cailín discutaient de la stratégie en cas d'abordage, par des pirates, des armées, officielles comme officieuses. L'Ecossais détourna alors son attention sur leurs visages pensifs. Au-dessus de leur pistolet et leur gilet, ils fermeraient un manteau de pêcheur, sous son pull en laine pour Charlotte couvriraient leur crâne d'un bonnet et en cas de fouille, cacheraient les armes, tout indice pouvant les relier à l'armée britannique ou leur destination.

- Ce qui nous laisse...

- Cinq minutes. Ajouta Ghost.

Les jambes changèrent d'appui, les yeux se fixèrent sur la carte puis dans ceux que l'on appelait « frère d'arme » ou encore « amant » et finalement, sur leur montre. L'heure approchait dangereusement, faisait battre un peu plus fort le sang dans l'oreille, regarder plus longuement le buisson en face de soi ou la route à côté, sursauter au moindre souffle du vent ou bond d'un renard sur les gravats.

- Très bien. Murmura le Capitaine Price. Vous êtes tous prêts ?

- Je reviens.

Ses bottes coquées, aux lourdes semelles grimpèrent silencieusement les marches, ses mains poussèrent tout aussi doucement une porte qui grinça et elle s'avança, Simon derrière elle, maintenant ils ne pouvaient plus se cacher, le lieutenant ne voulait plus se cacher. Au-dessus du petit corps endormi, le visage enfoui contre une peluche, le couple se pencha. Ils regardèrent son visage endormi, apaisé, écoutèrent sa respiration calme. La main de la mercenaire passa sur les cheveux de l'enfant, l'angle de son doigt le long de sa joue, juste avant qu'elle ne dépose plusieurs baisers, tendres, déchirée par cet adieu. Bien sûr que sa gorge était serrée, bien sûr que les larmes lui montaient aux yeux, brûlaient à force d'avoir pleuré ces derniers jours. Mais aucune larme ne coula sur ses joues et à son oreille, Charlotte glissa.

- Un jour, tu comprendras. Et j'espère que tu me pardonneras.

La main d'Arthur entourait le doigt ganté de Simon et ne semblait plus vouloir le lâcher. L'enfant poussa un petit gémissement qui inquiéta ce père attendri, tout aussi déchiré à l'idée de devoir quitter cet enfant qu'il avait tout juste rencontré et commençait à peine à connaître. Sur sa bouche, il releva son masque, entoura avec son bras le petit corps et le tira à lui, aussi doucement qu'il put afin de ne pas le réveiller. Simon serra Arthur contre lui, deux minutes à peine, son nez contre ses cheveux, ses lèvres contre son front qu'il embrassa tellement de fois avant de couvrir ses joues de baisers et de finalement le laisser dormir. La porte se referma sur un enfant toujours endormi, et ses parents, lui lancèrent un dernier regard.

Gloria Victis [FR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant