Chapitre 18

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A partir de quand peut-on considérer que notre vie est partit en vrille ?

Quand notre mère pleure à cause de notre père pour la première fois ?
Ou quand il se met à frapper ses fils ?

Je n'en sais rien... c'était il y a bien trop longtemps pour moi.

Sur le toit du lycée, je fixais les nuages défiler dans le ciel, envieuse de leur voyage à travers le monde.
Hier soir, nos parents s'étaient encore disputés. J'avais du serrer Jungkook dans mes bras tellement il tremblait.

Je serrais les poings à cette simple pensée. Mon père était un putain de connard égoïste.
Il disait nous aimer, mais l'amour était loin de ressembler à cela.
Ma main entra en contact avec la pierre dure et froide de l'immeuble.

Ça faisait mal. Mais et alors ?

- Tu frappes le sol maintenant ? dit Yeonjun en débarquant à côté de moi.
- Chacun sa façon de faire passer la colère, répondis-je sèchement.
- C'est sûr, dit-il d'une voix étrange. Y'a un an je faisais pareil... Se faire du mal ça soulage, hein ?
Je tourna la tête vers lui, étonnée.
Mon ami ne parlait jamais de son passé.

Yeonjun remonta son tee-shirt pour dévoiler des brûlures sur son ventre.
- Je cachais un briquet sous mon coussin, dit-il en esquissant un triste sourire. Et puis un jour, je l'ai balancé par ma fenêtre. Parce qu'il fallait que ça s'arrête. Alors te mutile pas pour faire passer ta haine.

J'étais bouche-bée.

Chacun sa douleur, disait toujours mon père. Mais qu'est-ce qui nous empêchait de la partager ?

- Quelle vie de merde... soufflais-je amèrement.
- À qui le dis-tu !
Je lâcha un rire. Il s'assit à mes côtés en me lançant une barre chocolatée.
- J'en mange toujours quand je suis triste ou énervé.
- J'en prend note.
- Tu as retrouvé ton carnet, au fait ?
- Ouais, il était sur la table de chevet de Jungkook. Je savais pas qu'il me l'avait pris, répondis-je en ouvrant l'emballage.
- Il s'inquiète pour toi. Il te protège.
- Ils le font tous, dis-je en croquant dans les céréales enrobées de chocolat.
- T'as de la chance, soupira-t-il.
- Moi aussi je te protège, lui promis-je. Ramène-toi à ma fenêtre si jamais.
- Tu devrais fermer ta porte à clefs... pour ma propre sécurité. Je n'ai pas envie que tes frères me voient assis sur ton lit.

Il avait raison. Avoir d'aussi grands frères impliquait une grande protection.

***

- Tu ne peux plus continuer à faire ça, dis-je en arrivant derrière ma mère, le soir-même.
- De quoi parles-tu ? rétorqua-t-elle alors qu'elle frottait avec énergie le plan de travail.

Comme si on ne possédait pas de femme de ménage...

- J'ai compris, dis-je en avalant ma salive. Ton mariage avec papa, était un mariage arrangé.

Elle cessa tout mouvement.

- Ta vie à été contrôlée par ton père et ton grand-père.
- Tais-toi, ordonna ma mère.
- Et la seule qui te soutenait, était tante Eun-Jung. Mais elle est morte dans cet incendie...
- TAIS-TOI ! hurla-t-elle.
Je resta muette un instant avant de relever les yeux et de croiser son regard. Ce regard qui me brisa le cœur.
- Maman... tes fils ont besoin de toi. Ils ne sont pas responsables.
- Tu es la seule que j'aime... dit-elle en me serrant doucement dans ses bras.
Je ne lui rendis pas son étreinte.

On pense souvent qu'être la préférée de ses parents est une chance. Mais si on aime ses frères, on se rendra compte assez rapidement que cela nous fait plus de mal que de bien. Cette pression que l'on ressent, et ce mépris que nos parents ressentent vis-à-vis des autres. On aimerait que toute la fratrie reçoive le même amour. Pour éviter cette haine.
On se sent injustement aimé.

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