Chapitre 5 : Epié

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Lorsque Tom se réveilla, un silence de mort régnait dans l'avion, baigné par les lueurs matinales du soleil, déjà imposant dans le ciel.

Lentement, le plus silencieusement possible, il tourna son couteau dans la serrure, ouvrant la porte en réussissant l'exploit de ne pas la faire grincer.

Mais son geste, aussi infime était-il, avait attiré l'attention d'une autre personne, cachée dans les dunes.

Tom raffermit sa prise sur son coutelas, puis avança précautionneusement sur le sol déjà brûlant de l'avion. Des lambeaux de cuir, vestiges de ses chaussures bien cirées, prêtes pour une nuée de flash mais pas une nuée de sable, restaient fondus dans ses pieds. Impossible de les enlever. De résignation, Tom les avait laissé ainsi.

De ses multiples blessures remontaient des vagues atroces de douleur. La nuit mouvementée qu'il venait de passer n'avait en rien arrangé son état.

Il grimaça. Il avait l'impression de marcher dans de la lave en fusion.

Cet effort minime lui donnait pourtant l'impression d'avoir couru un marathon. Sa gorge le brûlait, il n'arrivait même plus à avaler sa salive tellement elle était râpeuse. Ses poumons étaient en feu, ses jambes lui semblaient lourdes comme du plomb, la fatigue lui tournait la tête, des points noirs sautillaient devant ses yeux...

Il avait mal, tellement mal ! Il lui semblait qu'il allait mourir !

Il s'effondra dans le sable et s'évanouit.

Dans les dunes, la-haut, un humain avait assisté à tout. Sa conscience se disputait avec son cœur.

Ce dernier lui clamait que les hommes blancs étaient tous les mêmes, qu'il méritait de mourir. Sa conscience le suppliait d'agir avant qu'il ne soit trop tard.

Sans qu'il sache pourquoi il faisait ça, il descendit de la dune et se dirigea vers l'homme. Il lui laissa une gourde d'eau, un voile pour se protéger du soleil et des rations de viande de chèvre séchées.

Il repartit, frustré. Il ne savait absolument pas pourquoi il lui était venu en aide, et cela l'énervait.

*
* *

Tom se réveilla, la bouche pleine de sable. Il était recouvert d'un grand tissus léger qui le protégeait de la fureur fiévreuse de soleil. Une gourde d'eau le narguait, à quelques pas de lui.

Tremblant, il leva un bras et parvint à la saisir. Cet effort le laissa pantelant, et ce ne fût qu'après un long moment qu'il réussit à la porter à sa bouche et à boire goulûment.

Mais cette gourde n'était pas apparue par magie, seule. Apres d'intenses efforts, Tom se releva et regarda autours de lui. Rien.

Il poussa un grognement de frustration. Il avait très mal et était épuisé, certes, mais la soif de connaissance l'emporta sur tout le reste. Il se releva tant bien que mal, rajusta le voile sur son corps meurtri et partit en quête de ... de quoi ? Il ne savait pas vraiment. Un indice, une trace de pas dans le sable, quelque chose qui pourrait le conduire à son bienfaiteur anonyme !

Ses pensées s'embrouillaient dans sa tête, lui retournant le cerveau dans tous les sens, dans un vain effort de comprendre.

Il grogna de plus belle. Il n'en pouvait plus. Il se releva avec peine et se dirigea vers l'avion. Il lui fallait se mettre à l'ombre, immédiatement. Il se traîna vers la cabine, rampant à moitié, puis s'effondra sur les tissus entassés et ne bougea plus.

Son esprit épuisé sombra à nouveau dans le sommeil et l'inconscience.

Pendant des heures, il resta étendu là, sans bouger, le coeur ne battant presque plus, tellement immobile et silencieux qu'on eut cru qu'il faisait partie du paysage.

Les animaux sauvages ne s'éloignaient plus de lui par bonds terrifiés, mais au contraire lui montaient dessus comme s'il n'était qu'un vulgaire caillou ou autre déchet de l'avion faisant à présent partie integrante du désert.

Alors l'homme caché, l'assassin du commandant, compris que l'homme ne survivrait pas à la nuit sans aide. Il admit aussi que cet homme n'avait jusque là rien fait de mal. À contrecoeur, il descendit de sa dune et alla aider Tom.

Sa détermination de protéger coûte que coûte le désert de l'arrogance des hommes s'effritait face à la vue de celui-ci. Il avait pitié. Pitié de cette loque humaine en manque de tout, de ce petit humain projeté par la force des choses loin de ses repères et de ses habitudes.

Merci de m'avoir lue et à mardi !

CRASHOù les histoires vivent. Découvrez maintenant