chapitre sept

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Anastasia

Anastasia avait toujours adoré les études. Se lever le matin n'était pas un problème, motivée par l'envie d'apprendre et de se forger un avenir certain. En ce début de mois de septembre, assise seule à la table de l'immense cuisine, elle redoutait la rentrée de sa troisième année. Sa main vint instinctivement trouver son pendentif topaze, ses doigts le triturant frénétiquement. Elle en avait hérité de sa mère à son décès. La jeune femme n'avait jamais été aperçue sans depuis. Son thé à peine touché refroidissait doucement face à elle. Les premiers oiseaux se faisaient entendre, seulement interrompus par le bruit lointain d'une voiture. Ses pensées fusaient à toute allure, créant sur leur passage les scénarios les plus horrifiques. Sa poitrine se contractait douloureusement sous le poids de toutes ses angoisses.

Elle ne fut tirée hors de sa transe que par le grincement des marches. Evan franchit la porte de la cuisine, tout juste sorti du lit. Ses cheveux ébouriffés lui couvraient à moitié le visage, ses yeux à peine ouverts.

« B'jour, marmonna-t-il en se dirigeant vers la théière encore brûlante ;
- Bonjour, répondit doucement Anastasia. »

Il se servit doucement, ajouta une goutte de lait et un cube de sucre puis pris place face à elle sur l'îlot central.

« Qu'est-ce que tu fais debout si tôt ?, demanda la brune ;
- Pouvais pas dormir. Toi ?
- Premier jour.
- Oh, il prit une gorgée de son thé. Stressée ?
- Non, c'est pas comme si j'allais débarquer en plein milieu de mes etudes dans un tout nouveau campus après avoir perdu tous mes repères et tous mes copains en route. Franchement, tout va très bien. »

Evan étouffa un rire par une fausse quinte de toux.

« C'est hyper nul comme situation, je suis d'accord avec toi, constata-t-il simplement ;
- Il m'arrive de dire des trucs sensés.
- Ça peut aider dans ta profession. »

Anastasia secoua doucement la tête, une très légère vague de pression s'évaporant de ses épaules. Elle prit une gorgée de son thé devenu tiède.

« Le campus est grand ?, demanda-t-elle finalement ;
- Honnêtement ? Ouais. Mais le bâtiment de droit est assez isolé. On t'a donné une carte ?
- Oui et puis on m'a assigné un guide personnel aussi, répliqua-t-elle sarcastiquement ;
- Ok, ok. Je vois. Bouge pas la mienne doit pas être loin. »

Il disparut quelques instants dans le salon. Anastasia ne perçut que le bruit de tiroirs ouverts et le claquement de placards. Il revint tout souriant, un vieux bout de papier plié en mille entre les doigts.

« Pour vous servir, dit-il en lui tendant. »

Elle le saisit en le remerciant et le déplia devant elle.

« Ok, alors. Là, il pointa deux bâtiments en forme d'angle, c'était mon QG. Ne traîne pas là-bas y'a que des scientifiques pompeux. Ce truc-là, c'est la bibliothèque. Elle en jette un max. Et ici, c'est chez toi.
- Pas compliqué du tout.
- Au pire, si tu trouves pas, tu pourras toujours demander. Les gens sont sympas généralement. »

Elle hocha la tête, peu convaincue, et fourra la carte dans son sac de cours.

« Dans tous les cas, c'est quelques heures pour choper les infos principales puis tu t'en vas. C'est ça ?
- Oui, mes cours commencent dans deux jours.
- Si t'es vraiment perdue, je pourrai te faire un mini tour guidé si tu veux, proposa Evan en se grattant la nuque ;
- Ce serait super gentil ! Merci beaucoup. »

Il se leva en lui offrant un léger sourire. Il alla déposer sa tasse vide dans l'évier, tapota doucement l'épaule d'Anastasia puis sortit de la pièce. Elle débarrassa à son tour, saisit son sac et claqua la porte de la maison avant de rejoindre sa voiture, sa motivation retrouvée.



Son sac fermement serré contre sa poitrine, carte froissée en main, Ana pénétra dans le bâtiment de droit d'Oxford. Le bruit l'assaillit d'un coup sec. Le hall grouillait d'élèves, tous plus ou moins accompagnés. Des panneaux installés spécialement pour l'occasion indiquait l'amphithéâtre le plus proche. La brune les suivit timidement, chaque pas un peu plus incertain que le précédent. Elle entra dans la salle bondée et s'assit à la première place disponible, aux côtés d'une fille aux cheveux roses coupés aux épaules.

« Tout va bien ? »

Anastasia fut si surprise qu'on lui adresse la parole qu'elle en fit tomber sa trousse par terre. Sa voisine la ramassa en riant.

« Désolée de t'avoir fait peur, tu m'as juste l'air un peu pâle.
- Oh ! Non, non, t'excuses surtout pas ! C'est très gentil de ta part. Ça va, ça va. Juste un peu stressée.
- Attends, je dois avoir quelque chose, dit sa nouvelle rencontre en fouillant dans son sac. Ahah !, s'exclama-t-elle en lui tendant une barre de chocolat. Ça aide pour le moral.
- C'est adorable, merci beaucoup, sourit la brune. »

Elles échangèrent un sourire complice avant que le micro ne grésille.

Pendant plusieurs heures, les jeunes femmes furent assaillies par un nombre incalculable d'informations. La matinée terminée, elles sortirent ensemble de la salle, papotant de tout et de rien. Elles atteignirent le parc et s'assirent au pied d'un arbre.

« Je connais même pas ton prénom, remarqua finalement Anastasia ;
- Allison, répondit sa nouvelle amie en lui tendant la main ;
- Anastasia, mais je préfère Ana, dit-elle en lui serrant ;
- Et qu'est-ce qui t'amène à Oxford, Ana ?
- Le mariage de mon père. Sa femme et son fils habitent ici alors me voilà.
- Et l'inverse aurait pas été possible ?
- Visiblement non. Enfin, on peut pas dire qu'on m'ait beaucoup laissé le choix. Mon père était dithyrambique, il voulait absolument déménager.
- Génial, merci Papa !, plaisanta Allison. »

Elles furent interrompues par un bruit sourd. Un sac vint s'écraser aux côtés d'Anastasia, rapidement suivi par son propriétaire.

« Anastasia ! Je t'avais dit qu'on se retrouverait, entendit-elle. »

Elle croisa le regard d'une paire de yeux verts malicieux.

« Je suis désolée, je me souviens pas de ton nom.
- Ouch, répondit-il faussement peiné, main sur le cœur. Will, mariage de ton père, meilleur copain d'Evan, expliqua-t-il ;
- Ah oui ! Le fumeur. T'as pas l'air de vouloir lâcher l'affaire, rit-elle doucement ;
- Jamais, surtout quand il s'agit d'une fille aussi jolie, répliqua William en lui offrant un clin d'œil. »

Anastasia se contenta de lever les yeux au ciel, jetant un regard à sa nouvelle amie. Cette dernière se présenta et s'empressa de poser des questions :

« Evan ?
- Le fils de la femme de mon père, expliqua la brune ;
- Oh ! Et vous vous êtes rencontrés au mariage, c'est ça ?
- Plutôt cocasse pour y rencontrer l'amour de sa vie mais oui, répondit le roux. »

Ceci décrocha un rire à Ana.

« Je crois que tu t'emballes un peu mon grand, dans tes rêves peut-être, répliqua-t-elle ;
- Ah oui ? Heureusement que je suis un grand rêveur alors. »

La jeune femme lui frappa gentiment l'épaule, amusée par ses paroles totalement absurdes.

La réussite des astresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant