Chapitre VI : La maison dans la falaise

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Quand on ne sait pas où on va, il faut y aller, et le plus vite possible. (Proverbe Shadock).



Peut-être y avait-il une bonne et une mauvaise méthode pour explorer des kilomètres de côtes en moins de deux semaines. En tous cas, Mathieu était rapidement parvenu à la conclusion que la leur manquait cruellement d'efficacité.

Fidèle à sa parole, Louis Serra leur avait prêté main-forte dès le lendemain de leur rencontre. Sa connaissance de la région s'était révélée utile. Mais à cinq seulement, le terrain qu'ils couvraient dans la journée était mince. A ce rythme, le mois de leur mission ne leur suffirait pas pour explorer l'intégralité des côtes. Deux semaines relevaient de l'impossible.

- Si ça se trouve, Jurençon a déjà regagné Soleil, avait suggéré Roméo, au troisième jour de recherches infructueuses. Et nous passons nos journées à faire de la randonnée pour rien.

Pierre n'avait pas su quoi répondre. Si loin de la capitale, et sans avoir prévenu personne de leurs activités, ils n'avaient aucun moyen de savoir si Jurençon était bien rentré tout seul. Peut-être les attendait-il à l'Elite en ce moment. Peut-être même hésitait-il à partir à leur recherche à son tour.

Cela aurait un côté particulièrement agaçant. Et Mathieu aurait infiniment préféré cette alternative à la réalité actuelle.

Au fil des derniers jours, le malaise qui l'habitait depuis leur départ n'avait fait que s'accentuer, renforcé par l'inquiétude que Pierre et les autres cachaient de plus en plus mal. L'attitude de Jurençon méritait sans doute des reproches, mais ceux-ci pouvaient attendre qu'ils soient tous en sécurité à l'Elite.

- Qu'il soit ou non à Soleil, nous perdons notre temps ici, avait déclaré Louis Serra, en se levant. Si Octave Jurençon est encore dans la région, nos chances de le trouver par hasard sont faibles, au mieux. Nous n'avons pas le choix. Je vais demander de l'aide aux autres Cœurs Noirs.

Quatre regards inquiets se tournèrent vers lui. Il dut les sentir, car il ajouta d'un ton apaisant :

– Je connais bien ceux en poste dans les environs. Pour la plupart, ce sont des amis. Ils n'ont pas besoin d'être au courant de tout. Du moment que l'école n'apparait pas dans un danger évident, ils ne poseront pas de questions, croyez-moi.

L'ancien capitaine était parti dans la foulée. Tous les quatre avaient convenu de poursuivre leur recherches sans lui, en attendant son retour. Ce n'était pas comme si les côtes offraient beaucoup de distractions.

– Si j'ai vu un grand jeune homme, blond aux yeux bleus, avec un uniforme de l'Elite astrienne ? répéta la tenante de l'auberge, les yeux rieurs. Hélas non. Si je l'avais vu, je crois que je m'en souviendrais.

Vu les regards qu'elle lançait à Pierre depuis leur arrivée, Mathieu la croyait sans peine.

– Je peux essayer de me renseigner, bien sûr, ajouta-t-elle en voyant leurs mines déçues. Mais si on ne m'a rien rapporté ici, à l'auberge, je doute que le reste du village...

– Ce serait très gentil à vous, lui dit Pierre. Nous repasserons peut-être ici dans quelques jours ...

– Vous continuez plus au sud, n'est-ce pas ? Alors, je vous conseille d'emprunter le chemin côtier. La vue est magnifique. Et il y a quelques vieilles demeures dans la falaise qui valent le coup d'œil.

Dans la falaise ? répéta Mathieu. Vous ne voulez pas plutôt dire...

– Non, non, vous m'avez bien comprise, confirma la jeune femme, avec un sourire satisfait. Dans la falaise. Taillées à même la roche. Des anciens repères de contrebandiers, à ce qu'on raconte. Voyez-vous, cette côte était autrefois renommée pour son commerce...

De l'Ordre et de l'AventureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant