Chère Chloé - Tome 1

30 - Relever la tête et sécher ses larmes

"Les abeilles ne perdent pas leur temps à expliquer aux mouches que le nectar est meilleur que la merde".

Auteur inconnu

Aïe !

Ça fait mal même si je m'y attendais. Et ce n'est pas de la tristesse mais de la rage que je ressens sur ce moment-là

Bâtarde.

Elle a craché ce mot avec tant dégoût, que je l'ai senti même à travers la porte. C'est donc de cette méchanceté que m'a prévenue Natacha. Et même si je me suis préparée à toutes éventualités, les entendre parler de moi ainsi, me paralyse.

- Bien sûr que non, elle n'est pas d'ici, reprend une voix féminine. Ce n'est pas la première campagnarde qui essaye de s'intégrer parmi nous !

- Et dire qu'Edmond est fier de la présenter, quelle honte !

Elles rigolent et la pression monte en moi.

Mon estomac se contracte car "mon grand-père" est si heureux que je sois là. Peut-être que tout le monde pense comme ces femmes, et que je suis simplement ridicule. Peut-être qu'Edmond s'est fourvoyé, et que nous aurions dû rester discrets.

- Elizabeth doit se retourner dans sa tombe en voyant ça, la pauvre.

- Son image est salie à cause de cette gamine. Si Elizabeth ne l'a jamais présenté, c'est qu'elle avait ses raisons.

- C'est d'une tristesse.

Les pas s'éloignent et les voix deviennent inaudibles. Après plusieurs secondes, je reprends ma respiration, consciente d'avoir retenu mon souffle pour être discrète, mais surtout parce qu'il a été coupé.

Dans un premier temps, j'ai envie de fuir mais je comprends rapidement que ce serait être faible. Et même si ma mâchoire me fait mal à force de la maintenir contractée, qu'une larme a roulé sur ma joue en tachant mon maquillage, je dois être au-dessus de cela. Je suis blessée émotionnellement mais je suis physiquement indemne, donc je peux continuer d'avancer !

Je dois me reprendre et être plus forte que cela.

Pour Edmond qui est radieux depuis que j'ai répondu oui à son invitation. Pour Natacha qui a fourni un travail monstrueux afin que je sois prête pour ce soir. Pour Margaret, car la rage que j'ai vue sur son visage n'est pas aussi forte que celle que je ressens.

Et j'irai jusqu'au bout pour la détruire !

J'essaye de me reconstituer un visage normal, vérifiant le reflet dans le miroir. Ma robe est toujours sublime et mon maquillage n'a besoin que d'une légère modification. Je ne pourrais jamais empêcher les personnes de me critiquer. Alors comme m'a conseillé Natacha : avance et profite de la vie.

La tête droite, une retouche de rouge à lèvre et une grande inspiration m'aident à me motiver. Je me dirige vers la porte, et m'observe marcher dans le miroir. Le tulle de la robe bouge dans un léger bruissement digne des défilés de mode, et le bustier met tout mon décolleté en valeur. La dentelle est en harmonie parfaite avec le teint hâlé de ma peau, les paillettes ressortent si bien sous la lumière.

Cette robe est exceptionnelle.

Comme la personne qui la porte.

Oh punaise, 15 minutes avec Matthew Dambury et j'en viens à penser comme lui !

- Quelle élégance Chère Chloé.

Cette voix, je la reconnaîtrais entre mille.

- Bonsoir Ethan, je lance en me retournant.