12 - Un peu d'histoire

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"L'espoir est la seule chose plus forte que la peur".

Hunger Games


Je me tiens un peu plus droite sur le fauteuil, fixant un point au loin mais toute ma concentration est tournée vers mon ouïe. J'attends en silence, sur la défensive, qu'il explique afin de me faire mon avis. Ils n'ont pas été tendres avec moi, alors j'ai décidé de ne pas l'être non plus.

Il me tend une tasse de café, tout en douceur, comme si j'étais un animal sauvage à apprivoiser.

- Merci, je souffle par politesse.

Il m'observe, mais je continue de fixer le point au loin, bien trop gênée par cette situation oppressante.

- Quand elle était en colère, elle avait le même regard, lance Monsieur Lannord d'une voix calme.

Ses épaules sont affaissées et cette rage qui le possédait lors de notre première rencontre, est absente. Il est un autre homme, incomparable à celui rencontré dans la bibliothèque qui se laissait sûrement guider par cette haine envers moi.

- Elle a toujours été déterminée, et je pensais sincèrement tout connaître d'elle. Jamais je n'aurais cru qu'elle puisse vivre cela. Si j'avais pu savoir, j'aurais...

Je peux voir cette larme qu'il efface du revers de sa main. Le chagrin qu'il affiche me déstabilise et il réussit à me transmettre sa peine avec sa façon de se tenir.

- Le lendemain de son décès, j'ai su que tu étais... toujours vivante. Je devais subir la perte de mon enfant mais aussi cette nouvelle, qui en a entraîné beaucoup d'autres. J'ai très mal réagi et je m'excuse. Ces derniers jours ont été si douloureux que j'ai eu l'impression de devenir fou.

Je lui laisse le temps de me raconter mais surtout, j'essaye de comprendre, car les éléments du puzzle s'assemblent difficilement.

- Margaret m'a affirmé que c'était des manigances, que l'enfant ne pouvait pas être vivant et je l'ai cru bêtement. Je n'aurais jamais pensé que ma fille puisse me cacher cela pendant toutes ces années. Ce fut une première douleur d'apprendre que si. Car, après t'avoir croisé dans la bibliothèque, je connaissais la vérité.

Il se tourne légèrement vers moi et j'ose enfin soutenir son regard. Ses yeux gris... Je les reconnais.

- Je m'en veux pour ce que tu as vécu. Mais aussi pour ce que ma fille a subi car j'aurais dû être là pour elle, pour vous. Elle aurait dû me faire confiance et savoir qu'elle a tout fait seul, me blesse énormément.

La tristesse tort légèrement son visage mais pas autant que mon estomac. L'homme qui se tient devant moi est mon grand-père biologique, et il laisse ses émotions apparaître, m'expliquant sa douleur sans la cacher.

Et elle reflète avec la mienne.

– Le jour de ta naissance, les médecins ont annoncé que tu étais mort-née, suite à un problème cardiaque. Et le lendemain du décès de Lizzie, j'ai appris que j'avais une petite fille. Un mal pour un bien peut être, mais c'est surtout que depuis un mois, la descente aux enfers ne s'arrête pas. J'ai découvert que ma femme a payé les médecins pour te faire adopter, a falsifié les documents, et a créé tout un tas de mensonges qui m'horrifient un peu plus à chaque fois.

Il soupire et cette fois, il laisse la larme rouler sur sa joue.

- Si tu avais pu la connaître, tu aurais su que c'était une personne exceptionnelle. Une femme si gentille et douce, au caractère si bienveillant avec ceux qui l'aimaient. Et il n'y a pas un seul jour où je regrette la perte de mon enfant.

Chère Chloé - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant