Chapitre 3

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-Ne me dîtes pas de me calmer ! grogna Sybil entre ses dents.

Dans le salon des appartements de Cornélius, qui en vérité ressemblait plus à un laboratoire d'alchimie, la vieille femme postillonnait son appréhension sans parvenir à décolérer. Cela faisait plusieurs jours que le poison avait été préparé, et son apprentie assurait avoir déposé le produit dans le jus du souverain, ce jour même. Plusieurs heures s'étaient passées, et aucune annonce de décès du roi n'était survenue.

Pire, Evelyne était sur le départ. Ils manquaient de temps.

-Melina vous a certifié avoir utilisé le poison ? demanda le vieil homme.

Sybil acquiesça légèrement.

-Et bien, il n'y a pas de soucis à se faire dans ce cas. Soyons patients.

-Vous ne semblez pas réaliser que nous jouons absolument tout sur cette entreprise. Jusqu'à nos vies !

-Sybil, si on vous a assuré que...

La sorcière leva rapidement une main pour imposer le silence, et lui coupa la parole :

-Quelqu'un vient.

Elle l'avait murmuré si bas que même Cornélius avait eu du mal à comprendre. Une fois qu'il réalisa ce qu'elle venait de lui dire, il reprit de façon plus détendue qui, sans nul doute, aida même sa partenaire à paraître plus calme lorsqu'elle retourna s'asseoir à côté de lui :

-Nous n'aurons aucune difficulté à la faire revenir à cheval. D'autant que si Falcon cherche à entretenir une bonne relation avec Liney, il aura tout intérêt à la laisser voyager fréquemment ici.

Sybil saisit la perche tendue par son homologue afin de poursuivre une conversation tout à fait innocente.

-Bien sûr, vous avez raison. Et puis, je me plais à imaginer que nous manquerons à notre petite Evelyne.

Ils rirent doucement de concert, interrompus par l'ouverture de la porte du salon.

C'est Evelyne qui se fraya un passage dans la pièce d'une épaule, pour sourire à ses mentors, et présenter un plateau sur lequel reposait tout un attirail à thé.

-Voyez qui va là ! s'exclama Cornélius en souriant.

-Quelle délicate attention, Evelyne, renchérit Sybil.

-Je me suis dit, quitte à devoir vous abandonner pour Aelia, autant profiter du temps qu'il nous reste à passer ensemble ? se justifia la jeune femme.

-Tu as entièrement raison ! rétorqua le vieil homme en dégageant de la place sur la table couverte de grimoires autour de laquelle Sybil et lui étaient en train de converser.

Evelyne posa son fardeau et s'assit à son tour.

-Cornélius et moi constations avec affliction notre incapacité à trouver une solution pour te garder ici un peu plus longtemps, se plaignit Sybil.

-Ne vous en faites pas, ma Dame, répondit la jeune femme tout en préparant les deux sachets d'herbes à thé favorites de ses mentors pour les baigner dans leurs tasses respectives, déjà gorgées d'eaux fumantes. Je me doutais bien que nous ne trouverions pas de solution adéquate en si peu de temps.

-Mais rien ne nous empêche de continuer à réfléchir à un stratagème afin que tu reviennes plus souvent que nous ne l'espérons ?

-Bien sûr, Cornélius, opina la princesse. Comme je vous l'ai déjà dit, étant à la recherche d'une épouse, Elioren aura grand besoin de mon conseil. Je pense qu'il me rappellera à la capitale fréquemment pour rencontrer les prétendantes.

L'Héritage des Enfers (En cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant