samedi seize septembre

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Apparemment demain est un grand jour pour moi. 18. Sous les couleurs dorées qui frôlent les feuilles et semblent prêtes à les colorer, déjà, de leurs teintes cuivrées, moi aussi je mature, la lumière finit par s'encrer à un tel point dans ma peau que je grandis pour atteindre enfin le crépuscule d'un paysage d'automne. J'ai 18 ans, comme me le souffle la mélodie des susurrements de septembre dans les matins frais. La brise se glisse alors sous les cheveux pour les mettre en bataille, s'amuse à faire papillonner les paupières, et hérisse les poils sur les peaux où on vont perler la sueur dans l'après midi. J'ai 18 ans un 16 septembre, « seize septembre », la mélodie se répète comme une parole discrète murmurée à l'oreille, la rougissant, peut-être par l'effet du secret, peut-être par celui du souffle chaud porteur d'une caresse. La douce étreinte des mots sous les grelots d'un septembre matinal se lasse parfois et s'en va se plonger dans les rêveries de l'enfance pour se blottir au milieu de ces emportements imaginatifs maladroits pleins d'un espoir qui faisaient briller des étoiles dans ces grands yeux malins. Un instant, le temps de flâner en paresse dans les fleurs du passé, leurs parfums ravivent ce regard, qui, comme le soleil faisant briller la lune, éclaire un visage pour le reste terne. Au dessus des crevasses profondes de mes cernes, je peux toujours, pour compenser cette effrayante abysse, allumer quand je le souhaite la lumière dans mes yeux : cette lueur qui voyage depuis la poitrine où renaissent sans arrêt les étincelles qui font que l'on dit « ça me fait chaud au cœur ». Comme des bougies magiques, elles ne cessent de scintiller, et ravivent ce zest acide du rire de l'enfant malicieux. J'ai 18 ans le samedi seize septembre. La musique ne cesse donc de couler. La douceur m'a bénie à tour de baguette magique au dessus de mon berceau pour assurer qu'elle serait au rendez-vous pour ce jour apparemment si important. Le temps glisse alors, comme les reflets de l'eau qui s'écoule doucement sous le pont où reste figé Apollinaire. Je le regarde d'en dessous. Je le rejoindrai peut-être, l'eau ne s'écoule pas que dans un sens après tout. Samedi seize septembre, comme des murmures d'écoliers qui veulent se faire discret, comme un bruissement qui font de modestes feuilles des robes se chatouillant dans une valse silencieuse, comme des confidences scandaleuses à garder dans le mystère, comme l'échange séducteur de paroles amoureuses, comme les vagues qui s'éteignent dans une écume solitaire, comme l'insulte qu'un enfant puni s'amuse à pestiférer , comme le chant d'une formule magique qui aurait prit soin d'encrer le z joueur parmi ces sonorités trop passives. J'ai 18 ans demain, le samedi seize septembre. Si 18 ans c'est être adulte, par définition, je clos les temps passés de ma vie, je suis arrivée à terme de cette phase de développement. Mais nous savons tous que l'homme ne sera jamais à terme de rien. Soudainement, j'ouvre la porte au futur. Le passé, c'est encore moi. Pour continuer un chemin, faut-il déjà l'avoir commencé. Le samedi seize septembre me rappelle cette douceur au rire d'enfant, au cœur joyeux, au regard émerveillé, qui me donne la main pour continuer d'avancer dans un chemin peut-être plus tortueux, certes, sans ses paresseux aspects sinueux, mais à chacun de ses recoins regorge bien davantage de surprise. La surprise, n'est-ce pas là l'objet de l'émerveillement enfantin par excellence ? Dans un monde sans magie, il faut l'imaginer. J'ai 18 ans et je ne parle que de l'enfance et de ses délices. En effet, je suis grande, majeure maintenant. Mais c'est justement pour cela que ma nostalgie prend plus de sens. J'ai 18 ans le samedi seize septembre, aujourd'hui. Il est difficile pour moi d'accepter de grandir, mais ces douceurs sucrées des souvenirs et des rêves d'avenirs me consolent comme un câlin, ce mot si propre à la douce innocence, à l'amour dans toutes ses formes. 

Si le monde m'entendaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant