MACLEAN - O POINTS

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Erico passe sa main sur son front, décontenancé. Plus j'avançais dans mon discours, plus il perdait des couleurs. Il ne cesse de gesticuler, ne tenant pas en place dans son fauteuil. Dès que je suis arrivé au siège de la Scuderia, je me suis dirigé vers son bureau en premier sans même saluer personne. J'ai cogité durant tout mon voyage en avion sur comment j'allais lui dire. Comment pouvais-je faire comprendre à mon manager depuis toujours que j'allais les abandonner ?

Moi-même, je n'aurais pu prévoir ma réaction si les rôles avaient été inversés. Mais je me suis senti obligé de lui confier. Erico n'est pas que mon manager, il est devenu mon ami au fil des années.

— Tu te doutes bien que j'ai même enfreint la règle de confidentialité de MacLean pour te le dire, avoué-je pour le ramener auprès de moi.

Ses sourcils épais se froncent tandis qu'il redresse le visage. Sa main passe sur son crâne rasé et s'attarde sur sa nuque tandis qu'il gonfle les joues. Il desserre même sa cravate avant de souffler fort.

— Et je suppose que je dois la fermer ?

Je pouffe légèrement.

— Oui, ricané-je. Parce que là, je ne parle pas à mon manager, mais à mon ami.

Erico gratte sa barbe naissante, le menton en avant, il me toise, confus.

— OK. Je vais la boucler. Mais je t'en veux ! raille-t-il.

Je m'enfonce dans le sofa, en soupirant. Le contraire m'aurait étonné. C'est comme si je lui plantais un couteau dans le dos. Après toute ses années, et si Giuseppe n'était pas mort, j'aurais dû continuer chez eux. La vérité, c'est que je n'ai même pas eu de confirmation de renouvellement de contrat. J'en ai voulu à Guiseppe un certain temps. Après tout, il avait toute la saison pour me proposer un nouveau contrat ou même rallonger le mien, mais avec le recul, et en comprenant qu'il était surtout en phase terminale d'un cancer, je lui ai pardonné. Je crois au fond qu'il ne m'a rien proposé pour ne pas m'enchainer et me laisser libre dans mes décisions, du moins c'est comme ça que je le comprends.

— Je m'en doute, mais tu sais aussi que je ne pouvais pas passer à côté d'une occasion comme celle-ci.

— Tu seras certainement champion la prochaine saison, mais ça aurait pu être avec nous.

— Pas avec Riccardo aux commandes, grimacé-je.

Mon ami penche la tête de côté en pinçant les lèvres. Il aura beau me sortir toutes les raisons qui font que je devrais rester chez les Adessi, le nom de Riccardo les dégommerait tous comme un jeu de quilles.

— Oui, et je t'avoue que ça ne m'enchante pas non plus qu'il devienne le grand patron. Il est...

— Imbus de lui-même ? Ignorant ? Con ? enchaîné-je avec un demi-sourire.

Erico pouffe.

— Tout ça à la fois, je dirais.

Je hoche la tête, un rictus au coin des lèvres. Je sais que je n'ai pas pris ma décision à la légère et mon propre manager comprend les raisons qui m'ont poussé à le faire. Mais ça me fend le cœur d'une certaine façon de le trahir. Il était là depuis le début. Quand Giuseppe s'est porté garant pour moi, j'ai aussitôt été admis à la Adessi Driver Academy. Une école formant les futurs pilotes de formule 1. Erico a suivi mon évolution et m'a poussé sans cesse pour me surpasser. C'est lui qui a négocié mon premier contrat et depuis, il me soutient dans toutes mes décisions. Mais celle-ci... il ne s'y attendait pas.

— De toute manière, reprend-il. Riccardo va sans doute annoncer son sacre ce soir. Des bruits de couloirs disent qu'il a hérité de tout. Et c'est certainement aussi pour cette raison que ton contrat n'avait pas encore été renouvelé, le temps que tout soit officialisé chez le notaire, je suppose.

POLE POSITIONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant