Chapitre 5 : Nuit de Noces

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Je ne suis réveillée le matin pas les rayons du soleil qui est déjà haut dans le ciel. Je m'extirpe difficilement de mon lit confortable et me rends dans le salon. Le petit déjeuné est posé sur la table basse en marbre blanc devant le canapé en velours. Jean a eu la délicatesse de déposer une rose jaune dans un petit vase en porcelaine blanche. Après avoir mangé mon déjeuner, je m'approche de la porte d'entrée de mon appartement. Les deux gardes qui m'y ont conduit hier sont bien présents. Si j'espérais échapper aux ordres du roi Constant et visiter le palais, c'est raté. Je les salue prestement avant de refermer la porte.

Je me demande ce que fait Cassandra et si par précaution elle est aussi enfermée dans sa chambre. En tant que maîtresse, elle a sûrement plus de libertés. Je n'ai aucune idée de comment la joindre et je me rends compte que je ne lui ai même pas demandé où elle était logée.

Deux jours passent ainsi, je m'occupe en lisant une grande partie de la journée. Les trois visites quotidiennes de Jean pour m'apporter mon repas sont des bouffées d'air frais. Je me demande combien de temps je vais supporter ça.

Je passe mon temps à dévorer les livres de ma bibliothèque. J'ai particulièrement adoré le roman Anna Karénine de Tolstoï. J'aime ces histoires de l'ancien temps dans lesquelles je me plonge jusqu'à oublier la réalité. Ma réalité. Je deviens l'espace d'un instant une de ces héroïnes capables de prendre en main son destin, de choisir qui elle veut être. J'ai l'impression que dans le monde où je vis cela est impossible. Ou peut être simplement que je manque de courage.
Le soir du deuxième jour, alors que je suis en train de m'assoupir dans mon lit, j'entends le cliquetis de la serrure de ma porte. Saisi de frayeur, je me redresse dans mon lit. Quelqu'un vient de pénétrer dans mon appartement. Je vois soudain une silhouette apparaître dans l'encadrement de la porte de ma chambre. Je pousse un cri de terreur.

─ Chut ! Ce n'est que moi.

Le temps que mes yeux s'habituent à l'obscurité, je reconnais Victor.

Sans un mot, il s'approche de mon lit et se glisse sous les draps. Je reste pétrifiée, glacée d'effroi.

Il prend mon visage entre ses mains froides et plaque sa bouche, dure, contre la mienne. Il ne semble pas gêné par mon manque de réaction et colle son corps contre le mien. Je n'ose pas le repousser, je sais qu'en tant qu'épouse je n'ai guère le choix. Lorsqu'il glisse sa main entre les cuisses, des larmes silencieuses coulent le long de mon visage. J'ignore s'il s'en rend compte.

Il remonte sa main le long de mon corps, saisit abruptement un de mes seins sous ma chemise et le serre. Je pousse un gémissement de douleur.

_ Laisse-toi faire, murmure-t-il à mon oreille.

Il crache ensuite dans sa main et la remet entre mes jambes. Il glisse ensuite son corps sur le mien et entre violemment en moi. Mes gémissements de douleur deviennent des cris. Il continue ses va-et-vient jusqu'à ce que je sente son corps trembler. Sa respiration et de plus en plus précipitée. Lorsqu'il termine enfin, il se laisse tomber sur moi. Il reste quelques secondes ainsi avant de rouler sur le côté. J'ignore combien de temps cela a duré. Je sais seulement que je voudrais tout oublier. Disparaître. Je reste immobile. Au bout de quelques minutes interminables, il se relève et sort de mon appartement.

Mes yeux sont maintenant secs. J'ai mal dans le bas du ventre, mais ça n'est rien par rapport à la rage qui grandit en moi. Je me dégoûte et ressens le besoin d'aller me laver immédiatement. Je monte dans la baignoire, en élève précipitamment ma chemise de nuit et je frotte vigoureusement le sang rouge vif entre mes cuisses à l'eau gelée. Lorsque je m'arrête, il y a bien longtemps que ma peau est irritée .

Je retourne dans ma chambre, arrache mes draps tachés de sang et les laisse dans un coin de la pièce. J'enfile une nouvelle chemise de nuit. Je regrette de ne pas avoir de quoi allumer la cheminée de mon salon et de brûler mes draps et mes vêtements souillés.

Je me couche sur mon lit à nu, attendant l'aube. Je ne bouge pas quand Jean entre dans ma chambre pour me réveiller. Il ouvre les rideaux, laissant entrer pleinement le soleil de cette belle journée de fin d'été qui s'annonce. S'il ne fait aucun commentaire sur les draps constellés de taches rouges sur la terre, je surprends son regard compatissant. C'est pire que tout.

─ Merci Jean. J'aimerais déjeuner tranquillement si tu le permets.

          Ma voix est comme enrouée et sèche.

─ Bien sûr, princesse. Il quitte la pièce en emportant avec lui les draps salis.

La Tour de sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant