CHAPITRE 12 -

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Le sol se déroule sous mes pieds, une chute éphémère, un ballet suspendu dans le vide, avant que mes pieds ne touchent le sol. Une cage dorée m'enserre, un écrin luxueux pour une chute en douceur. Le sol, matelassé comme dans mes rêves d'enfant, accueille mes pas, et amortis mon atterrissage, cet endroit apaisant efface la terreur de l'effondrement. Sur ma gauche, un fauteuil de cuir se dessine, une invitation silencieuse à m'abandonner à son étreinte. Je m'y glisse, mes jambes s'étirent dans une danse de relaxation, épousant chaque courbe du siège. Tout cela semble trop parfait, trop irréel, comme une illusion que l'on craint de voir se dissiper. Une étrange force me pousse à demeurer ici, à repousser l'obligation de quitter ce lieu envoûtant. Les barreaux de la cage, d'une largeur suffisante pour que je puisse les traverser, m'incitent à tenter ma chance, à m'échapper de cette cage doré.

Lors de ma tentative, une onde magnétique invisible m'immobilise brutalement. La réalité s'impose, cruelle et implacable, me rappelant mes obligations, me rappelant ma condition de prisonnière. Le fauteuil, jadis si réconfortant, se dissout sous mes yeux ébahis, sa silhouette élégante se fondant en un tourbillon de particules dorées. Le sol moelleux, qui m'avait semblé si doux, s'efface lui aussi, laissant place à la dureté de la réalité. La boue, telle une créature insatiable, reprend possession de l'espace. La réalité me fait face ; je ne peux sortir, je suis prisonnière. Je me rends compte de ma captivité, de ma vulnérabilité.

Au lieu de me débattre comme tout être sensé, une étrange intuition me pousse à m'asseoir au milieu de la pièce confiné, repliant mes jambes vers ma poitrine. L'humidité insidieuse pénètre ma tenue, mon corps frissonne sous le faible abri de mes vêtements trempés. Je bascule d'avant en arrière, cherchant un semblant de chaleur dans ce lieu de désolation. Des pensées sombres m'envahissent, une mélodie funèbre qui semble annoncer une longue nuit d'incertitude.

L'endroit se métamorphose en une véritable prison, des murs de béton se dressent tout autour, implacables, me confinant dans cet enfer. Une vague d'insectes, grotesque et oppressante, m'envahit soudainement. Des araignées aux pattes poilues, des fourmis en rangs serrés, des vers ondulants, et même des cloportes indomptables, tous convergent vers moi, s'agrippant à ma peau comme s'ils voulaient fusionner avec mon être. En réponse à cette invasion, je replie mes mains sur mes oreilles, fermant ma bouche et mes oreilles dans une vaine tentative de barricader mon corps contre cette marée étrange. La sensation est terrifiante, ma peau devient collante, et une anxiété profonde m'envahit. Mon cœur semble battre au ralenti, comme s'il luttait pour survivre dans cette tourmente, et la plus grande de mes peurs se dresse devant moi, me clouant sur place, impuissante.

Mon cerveau résonne, comme si une force mystérieuse avait heurté sa surface, mais je ne ressens aucune douleur physique. Mes pensées tourbillonnent dans un tourbillon chaotique, comme si une entité invisible me refusait l'accès à mon propre esprit. Une autre secousse me traverse, et cette fois, je perçois un choc sur ma tête. Lorsque j'ouvre les yeux pour identifier la source de ce projectile, je sens encore les larves s'agripper à diverses parties de mon corps. Cependant, je les ignore en refermant mes yeux et en me plongeant à nouveau dans une forme d'inconscience ou de dissociation. Une pierre heurte le sol à proximité, impossible à ignorer. Quelque chose, ou quelqu'un, semble tenter de communiquer avec moi. J'essaie désespérément de localiser l'origine de ces pierres. Alors que je scrute l'environnement qui m'entoure avec une attention fébrile, mes yeux tombent sur une tâche sur le sol, une tâche qui n'était pas là au moment de mon atterrissage. Intriguée, je me penche pour l'observer de plus près et réalise avec une montée d'excitation que cette tâche n'est pas un simple accident du décor.

Les pierres disposées à l'extérieur de la cage forment une composition mystérieuse, un assemblage qui prend sens sous mes yeux ébahis. Les lettres prennent forme, et mon cœur bondit quand je distingue clairement le prénom de Valentina. L'espoir me saisit comme une bouffée d'air pur après une apnée dans les abysses. Valentina est là, elle est venue pour me sauver. Tout en ressentant cette connexion profonde avec elle, je suis submergée par un doute cruel. Je ne peux toujours pas la voir, et la pensée qu'elle puisse être une hallucination me frappe comme un coup de poignard. Est-ce possible que ma propre anxiété et ma peur m'aient joué un tour, créant de toutes pièces cette lueur d'espoir ? Les questions sans réponse planent dans l'air.

Je décide de me battre, impossible que ce soit une illusion, personne ne peux connaitre Val, a part si... Si quelqu'un ait pénétré mon esprit. Pourtant, cela semble purement impossible. Alors, je choisis de maintenir l'espoir en moi. Peu à peu, je réalise qu'une force extérieure exerce un contrôle sur mon esprit. Il est impensable qu'une pièce puisse changer de forme de cette manière. Au départ, j'essaie de discerner le réel du faux, mais les insectes qui m'entourent ne sont que des leurres, m'empêchant ainsi d'agir. Désormais, je me bats contre moi-même, contre mes pensées les plus sauvages. En même temps, du coin de l'œil, je perçois les mots d'encouragement de Val. Je fais demi-tour, revenant vers les insectes, tandis que dans mon esprit, je fais surgir l'image d'un lance-flammes pour déjouer l'ensorceleur. Je sens certaines de ses ficelles lâcher.

C'est alors qu'une de mes phobies les plus insidieuses me rattrape, et les murs eux-mêmes semblent s'animer pour avancer vers moi. Progressivement, je sens leur présence se rapprocher, caressant ma peau et enserrant chaque parcelle de mon corps. C'est comme si mes os se faisaient broyer lentement, une sensation à la fois insoutenable et réelle. Cependant, au plus profond de moi, je me rappelle que tout cela n'est qu'une illusion, une création de mon esprit. C'est à ce moment-là que je décide d'affronter cette terreur comme un miroir qu'on brise. Les éclats se dispersent dans ma tête, et soudain, je retrouve enfin mon emprise sur moi-même, émergeant de ces épreuves avec une nouvelle force.


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