CHAPITRE UN :

135 18 122
                                    

Seven réprima l'envie d'étrangler l'étudiant qui lui faisait face et qui l'insupportait avec son sourire idiot ainsi que sa question qui l'était tout autant.

Le mois de novembre venait de s'installer, dépouillant les arbres de leur parure mordorée, laissant le béton se couvrir des feuilles rejetées. Ce tapis provisoire crissait sous les milliards de pas des étudiants tantôt pressés tantôt fatigués lorsqu'ils arpentaient le campus, à la recherche de leur collation ou de leur prochaine salle de cours.
L'agitation, elle aussi, s'était installée, parce que qui disait mois de novembre disait "période de partiels en approche" et pour certains, ce constat était encore plus terrifiant que les soirées d'Halloween les mieux préparées. Pour d'autres, quelques rares élus, aucun stress supplémentaire ne venait s'ajouter à la dose qu'ils ressentaient déjà d'ordinaire. Ce stress bien connu des jeunes puisque la vie étudiante était réputée pour faire naître toutes sortes de tracas chez ceux qui choisissaient - ou non - d'emprunter cette voie.

Le Club d'audiovisuel, que Seven présidait d'un main de fer depuis trois ans déjà, connaissait la même agitation que le reste du campus, ce qui était bien loin de lui plaire.
D'ordinaire, leurs locaux aux divers outils toujours impeccablement rangés, aux bacs bien triés et aux activités parfaitement organisées ne connaissaient aucun remous.
Seven détestait l'effervescence qui régnait actuellement dans cette pièce où tous élevaient la voix, comme si cela allait leur permettre d'accéder à ce qu'ils désiraient plus vite.
Après un dernier regard en direction de la porte qui menait à la salle de développement - et qui était restée miraculeusement fermée - elle abattit son poing serré sur la table qui la séparait de ce première année au bonnet fort laid.

Elle n'en pouvait plus, elle avait envie de leur hurler d'aller au diable voir si elle y était.
Mais elle se ravisa et se composa un sourire glacial, attendant que les derniers chuchotements s'estompent.
Bientôt, plus un bruit ne se fit entendre dans les locaux mais Seven n'avait même pas le temps de savourer sa sérénité retrouvée. On aurait pu entendre les mouches voler, au lieu de quoi, ce furent les mots de la jeune femme qui s'envolèrent, trouvant sans peine leur cible :

— J'ai dit non. Alors vous pouvez me poser la question encore et encore, ma réponse ne changera pas.

— Oh mais allez, steuplait ! se risqua un autre étudiant à la casquette enfoncée sur ses boucles blondes. On sait tous que c'est pas vrai !

Lorsque le regard mauvais de Seven se posa sur lui, il parut regretter, se tassant sur lui-même comme pour se faire oublier.

— Mais c'est que j'ai affaire à des lumières dites-moi. Je comprends que ce que je suis en train de vous annoncer est un peu compliqué à saisir pour vos cerveaux étriqués mais il va falloir vous concentrer. La réponse est non. N-O-N.

Elle agita ensuite sa main gauche, faisant cliqueter les bracelets qui y étaient accrochés.
Les plus malins comprirent de suite qu'ils n'étaient plus les bienvenus ici - bien qui ne l'aient jamais été - tandis que les plus lents ne détalèrent que face à son air toujours aussi revêche.

Une fois la pièce vidée, Seven se pinça l'arrête du nez, maudissant tous ceux qui l'avaient envoyée dans une telle posture. Un cas de figure pareil ne s'était pas présenté depuis ses années lycées quand elle avait réussi à piquer les sujets du contrôle de mathématiques et que toute sa classe était venue les lui réclamer.
Bien sûr, elle n'avait jamais rien communiqué.

La porte du Club s'ouvrit à nouveau, grinçant faiblement en un bruit qu'Isaak avait promis de supprimer des mois plus tôt sans jamais s'en occuper. Mais après tout, attendre quelque chose de ce bon à rien était une erreur que Seven n'aurait jamais dû répéter.
Elle faillit crier à la personne qui entrait qu'elle ne reviendrait pas sur ce qu'elle avait dit, et pour cause, c'était la vérité, avant de l'identifier.

MENSONGESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant