CHAPITRE QUINZE :

22 4 17
                                    

Comme tous les jours, Marigold descendit les escaliers pour rejoindre la cuisine qui était déjà bien animée. Les gargouillis de son ventre semblaient vouloir répondre aux cris qui s’élevaient depuis la petite pièce dans laquelle ils s’entassaient tous. Une petite pièce qui ressemblait fort à un musée de l’enfant tant les murs, le frigo et tout espace à peu près libre disparaissaient sous les photos, les dessins et autres créations de la fratrie.

Ses frères et sœurs se disputaient la boîte de céréales pour faire le petit jeu qui se trouvait au dos. Elle se doutait qu’ils s’étaient déjà disputés au préalable pour savoir qui en aurait le plus, et surtout, qui en aurait le moins. Et qu’ils se disputeraient pour quelque chose d’autre une fois que ce conflit serait résolu. Et ainsi de suite, jusqu’à ce que leur père tape du poing sur la table ou que leur mère fronce ses sourcils.
Son propre bol avait déjà été rempli, puisque les plus jeunes l’aimaient tellement qu’ils étaient aux petits soins pour elle. Affection qu’elle leur rendait largement en les emmenant au parc, en leur achetant des jouets quand elle passait au centre commercial, ou en leur ramenant des bonnes petites choses à manger. Bon, bien sûr, elle ne leur laissait pas la belle vie tous les jours, et il lui arrivait d’aller les embêter, comme toutes les grandes sœurs se devaient de le faire.

Leurs parents entrèrent dans la pièce à leur tour, prêts à partir au travail. Ils prennaient cependant toujours le temps d’aller saluer leurs enfants, un par un, pour leur souhaiter une bonne journée et les encourager à donner le meilleur d'eux-mêmes. Le redoublement de Marigold n’avait pas été la meilleure nouvelle pour ces deux purs produits des Etats-Unis et des success story, mais à grand renforts de discours écrits par Elios, elle avait fini par les convaincre que, pour elle et son futur, ce n’était pas nécessairement une mauvaise chose.

En la voyant sourire face à l’écran de son téléphone puisque, justement, Elios lui avait envoyé un message, ils lui demandèrent quand est-ce qu’ils allaient rencontrer ce jeune homme qui plaisait tant à leur fille.
Marigold esquissa un sourire forcé, hochant la tête et leur souhaitant une belle journée. Elle leur demanda s’ils avaient besoin qu’ils fassent les courses, plus par désir de détourner la conversation que pour se rendre utile.

Elle détestait de ne pas pouvoir leur dire la vérité sur qui elle était, alors qu’elle était pourtant si fière de son identité. Mais elle désirait trouver le bon moment et pour l’heure, cela n’avait toujours pas été le cas.

⧫⧫⧫⧫⧫

Avant d’aller en cours, Marigold faisait généralement un long détour en transports pour se vider la tête et se donner l’impression qu’elle vivait tel un personnage de série. Elle s’imaginait plein de scénarios idiots, manquant de glousser, tandis que le rythme de la musique la faisait gigoter.

Elle faisait toujours le même détour, qui lui rajoutait plus d’une demie heure de trajet, mais elle aimait encore observer le paysage, découvrant de temps à autres de nouvelles choses. Un nouveau tag, un abribus délabré, un parterre de fleurs tout juste plantées… La ville évoluait toujours, comme un véritable organisme vivant, cependant loin d'être indépendant.

Ce matin, elle vit par la fenêtre du bus une silhouette recroquevillée, qui paraissait même souffrante. À mesure que le bus s'approchait de l'arrêt où se tenait tant bien que mal le blessé, la certitude de Marigold grandissait : cette personne avait été tabassée, et probablement pas à mains nues.
Elle était prête à descendre en trombe du bus pour lui porter main forte, ou au moins lui faire savoir qu'il y avait quelqu'un auprès de qui il pouvait se confier. Même si rares étaient ceux qui se confiaient ainsi aux inconnus.

Mais ce fut le blessé qui monta tant bien que mal dans le bus, validant son titre de transport dans un geste presque maladroit qui fit soupirer la mamie qui se tenait derrière lui. En guise de réponse, il se contenta d'aller s'avachir sur les places au fond du bus, non loin de Marigold.

— Vous devriez faire attention à vous mademoiselle, conseilla la vieille, en s'adressant à l'étudiante en droit, d'un ton tout à fait mauvais.

— Je pense que cela devrait aller, madame.

— Avec ce genre de crapules, on ne sait jamais à quoi s'attendre, ronchonna la retraitée.

Marigold se fichait bien de ce que la vieille pouvait raconter. Elle se fichait même de savoir si cet inconnu blessé était, ou non, une crapule comme elle persistait à le dire.
Elle voulait simplement savoir s'il allait bien et ce qu'elle pouvait éventuellement faire pour lui venir en aide.

Elle le voyait tenter de trouver une position agréable, probablement pour supporter les cahots du bus sans que son corps blessé n’en souffre trop.
Mais vu les grimaces qui étiraient de temps à autres ses lèvres, les tentatives ne se soldaient guère par des succès.

Dès qu’ils arrivèrent sur le campus universitaire, Marigold se jeta pratiquement sur lui, dans le seul but de savoir s’il allait bien. Elle reconnut le garçon aux cheveux bleus qu’Elios avait percuté à la machine à café. Cette brève collision lui avait valu une après-midi entière à entendre les rêveries du rouquin qui avait trouvé l’inconnu renfrogné tout à fait à son goût. Et s’il y avait bien un domaine où Elios était passé maître, c’était celui des crushes un peu trop rapides et bien trop fréquents.

Quand elle s’adressa à lui, il leva ses yeux gris dans sa direction, la toisa d’un air que Marigold ne savait déchiffrer, avant de lâcher, d’un air presque méprisant :

— Mêle toi de ce qui te regarde, pour une fois.

Elle était surprise, surtout qu’elle sentait bien qu’il sous-entendait quelque chose qui n’était pas tout à fait faux : Marigold avait la fâcheuse manie de mettre son nez dans les affaires des autres, c’était plus fort qu’elle.
Mais elle ne le connaissait pas. Il ne la connaissait pas, comment pouvait-il savoir ça ?
N’ayant guère envie d’obtenir une réponse qui ne lui convenait pas, surtout pas là, au milieu du campus, elle lui souhaita une bonne journée et tourna les talons.

⧫⧫⧫⧫⧫

La journée avait été longue, aussi Marigold se laissa tomber sur son lit comme une masse, désirant trouver un peu de repos. Dans la chambre d’à côté, son petit frère écoutait de la musique à un volume sonore exagéré, sans doute pour manifester sa révolte adolescente.
Marigold sourit, repensant à sa propre adolescence. Cela n’avait pas été rose tous les jours, certains moments avaient même été particulièrement compliqués, mais dans l’ensemble, elle en gardait de très bons souvenirs.

Son téléphone l’informa qu’un message venait d’arriver. Avec un sourire niais, elle découvrit la notification de Zéphyr.
Elle n’avait pas prévu, au tout départ, qu’elle s’attacherait autant à elle, ni que les sentiments à son égard ne se développeraient aussi vite. Mais Zéphyr était réellement incroyable. Alors, même si l’approche première n’avait eu pour but que de se rendre utile par rapport au problème auquel la blondinette était confrontée, pour avoir sa confiance, la relation était devenue une amitié sincère. Et au fil des rendez-vous, Marigold avait bon espoir que cela devienne un peu plus que cela.

C’était même en très bonne voie, les faisant oublier de travailler sur ce qui était arrivé à Zéphyr, mais plus le temps passait, plus Marigold pensait que son amie ne désirait pas tant que ça trouver le coupable.
Après tout, il n’avait jamais recommencé, avait renvoyé quelques pauvres messages insultants mais puisque cela ne prenait pas, il avait finalement laissé tomber.

C’était une bonne nouvelle, mais Marigold espérait qu’elles continueraient encore à se voir. Après tout, le but ultime (ou plutôt les buts) de l’étudiante en droit n’avait pas encore été atteint. Mais elle avait confiance en elle, elle savait que c’était imminent et que dans un futur très prochain, elle saurait tout ce qu’elle était venue chercher.

------

samedi, on clôture la partie une, ça me fait bizarre omgggg
et demain j'ai ma rentrée, j'y vais juste pour slay honnêtement

MENSONGESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant