Chapitre 20 : Une nouvelle page s'écrit lorsque l'ancienne se tourne...

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Angela était rentrée chez elle ; trempée, blanche à cause du froid mais le visage rouge. En y repensant bien, Noah était le premier garçon qu'elle embrassait en toute connaissance de cause. Elle avait l'impression que pendant toutes ces années leurs lèvres s'étaient cherchées et que finalement elle avait pu leur permettre de se découvrir sous un nouveau jour, hélas seulement aujourd'hui.

La soirée passa presque comme si rien de tout ça n'était arrivé. Angela partit se coucher sans prendre la peine de dîner et bien avant que ses parents ne rentrent. Elle ne dormait plus dans sa chambre, sans doute avait-elle trop peur d'y entrer à nouveau après tous ces évènements. Comme si un charme se briserait et que la réalité la frapperait à nouveau et à répétition sans jamais s'arrêter. Elle se rendit dans l'ancien bureau de sa mère à l'étage et s'étendit de tout son long sur un canapé déplié, là, rien que pour elle, et ses peurs.

Chaque jour était une bataille pour elle ; se lever et sortir, affronter la vie sans son frère était l'obstacle le plus douloureux à traverser. Le deuil était l'étape la plus délicate de sa vie.

C'était comme si on lui demandait d'oublier Luka, comme si on devait l'effacer.

Avec les mois, elles voyaient ses parents ranger cette petite chambre d'enfant, remettre des objets dans des cartons, dans les armoires. Ces simples actions provoquaient de la colère à Angela.

Elle avait l'impression que ses parents ; ceux qui étaient censé le plus souffrir dans cette histoire,  faisaient disparaître toutes traces encore présente de son frère, de leur fils.

La colère fut la première chose qui éclata. Angela n'en pouvait plus de tout garder pour elle, elle était prête à, comme un volcan l'était, à exploser.

La colère aveuglait les propos cinglants de Angela, elle les disait cruels, qu'ils étaient des monstres, qu'ils désiraient oublier jusqu'à l'existence de Luka, son petit frère et par-dessus tout leur fils.

L'ambiance à la maison n'avait jamais été aussi lourde, aussi noir qu'un orage qui avait déjà éclaté.

Mais l'orage se résorba et Angela finit par comprendre que s'il faisait ça, c'était pour guérir.

Cette douleur était bénéfique, bien que dure à vivre.

Cette douleur leur permettait de guérir.

Ils souhaitaient guérir de leur deuil, ils savaient – autant qu'Angela – que Luka n'aurait jamais voulu qu'ils perdent leur sourire ; toujours rieur ils faisaient rire son entourage et lui apportaient tant d'amour. Ses parents le savaient.

Angela aussi...

Le deuil était compliqué, mais ils ont appris à en guérir. Ils ne souhaitaient pas effacer Luka, ils voulaient plus que tout le garder à leurs côtés, lui rendre hommage sans jamais l'oublier.

Et ça Angela finit par le comprendre quand elle entra enfin avec ses parents dans cette chambre.

Chambre dans laquelle elle n'avait osée mettre les pieds pendant des mois, pleurant et s'énervant à peine le pas de la porte franchi.

Elle avait enfin compris que Luka avait beau avoir disparu, jamais il ne les quitterait.

Le deuil était l'étape la plus difficile de la vie d'Angela, et pourtant elle réussit à le franchir. En signe d'acceptation elle punaisa une photo d'elle et son frère, - bras dessus et bras dessous – au-dessus du petit lit, et au-dessus de son propre lit ; dans sa chambre où elle n'avait pas osé aller non plus.

Angela avait compris et comprenait. Elle avait compris que sa vie ne s'arrêtait pas, ne s'arrêterait plus.

Désormais elle se devait de sourire et de se battre.

Pour Luka.

Pour le rendre fier, se battre rien que pour lui.

Et que s'il se trouvait quelque part à veiller sur elle, se disait-elle, elle lui montrerait qu'elle allait bien, qu'elle sourirait malgré sa disparition.

Malgré le deuil, elle n'effaça pas son frère de sa mémoire, au contraire elle se devait de le garder, de chérir leurs souvenirs.

Alors chaque jour, elle lève les yeux vers le ciel et le soleil qui se lève. Chaque soir vers les étoiles et souffle dans un murmure « Merci ».

* * *

Les mois avaient continué de défiler, Noah était d'un énorme soutien pour Angela, quand elle tombait il était toujours là pour l'aider à se relever.

Ils n'étaient pas réellement un couple, Angela semblait avoir peur de ce mot officiel « couple », il savait qu'il la mettait mal à l'aise, il était prêt à attendre autant de temps pour elle.

Rien et à la fois tout avait changé. Leur relation était toujours fusionnelle mais un petit quelque chose avait changé sans qu'on ne sache quoi exactement ; les chamailleries, les taquineries, les discussions, les jeux, le temps passé ensemble était toujours le même, mais avec cette étincelle supplémentaire.

Angela lui avait confié que le temps semblait être passé bien trop vite, qu'elle se sentait coupable d'avoir su et ou se relever aussi vite. Elle était troublée, Noah était là pour la rassurer, lui expliquer qu'elle était à un point où guérir peut importe la manière n'était que bénéfique.

Elle semblait aller mieux, elle sortait un peu plus chaque jour dehors, elle commença à abandonner ses énormes pulls, elle avait du mal à se regarder dans un miroir, mais elle se relevait de ses cendres, et ça même Noah le remarquait.

Et aujourd'hui Noah était fier de se dire, qu'Angela avait la force de se battre.

Un jour ils étaient sur son lit, chez elle. Assis côte à côte, se tenant la main

Angela souffla dans le creux de son oreille ;

« Merci ».

* * *

Angela allait mieux.

La peur de se relever sans son frère était le seul poids qui lui restait réellement, la peur de tourner la page était sans doute trop lourde...

« Et si je n'y arrive pas ? » pensait-elle souvent.

« Et si les cauchemars revenaient ? » demandait-elle souvent.

Malgré ses doutes. Malgré ses peurs, Angela avait le soutien de Noah, ils avaient beau savoir qu'elle ne se pardonnerait pas demain, mais qu'elle apprendrait à le faire.

Cette fois-ci après avoir murmuré un merci à l'oreille de Noah, celui-ci lui dit simplement

« Une nouvelle page s'écrit lorsque l'ancienne se tourne

Alors elle tourna la page et commença à écrire...

Elle est moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant