Chapitre 8 : Le silence, tu l'as brisé

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Elle se revit avec Noah, jouant ensemble dans leurs jardins ; se courant après, faisant de la balançoire, regardant les nuages, en bref, vivre une vie d'enfant simple, sans pression. À présent, en fixant la porte par laquelle Noah était sorti il y a quelque temps, elle se dit que plus jamais ils ne pourraient se voir de la même façon, que quelque chose s'était brisé, avait changé.

Elle attendit en fixant la porte, en fixant le retour espéré de Noah.

Ses larmes avaient cessé de couler il y a peu et ses excuses se stoppèrent en même temps que celles-ci. Elle regrettait ce qu'elle avait fait, par le passé, maintenant.

Elle regrettait d'avoir fait souffrir Noah.

Elle regrettait ce qu'elle avait fait.

Elle qui s'était dit qu'elle allait arrêter.

Elle qui avait essayé...

Elle qui avait rechuté...

Elle qui...

Elle ne finit pas sa pensée.

Elle vit un pied devant l'embrasure de la porte ; des converses rouges abimées, les mêmes depuis 5 ans, à l'exception de la pointure, elles n'avaient pas changé.

Elle l'appela :

« Noah »

Angela comprit qu'il fut surpris qu'elle l'avait appelé. Il franchit la porte, mais hésita où s'assoir, ses yeux passèrent du lit où elle était allongée, au fauteuil où il était précédemment assis.

Angela, d'un simple signe de regards lui indiqua sa place, il s'assit à ses côtés.

Le silence dura plusieurs minutes, elle hésita à ouvrir sa bouche plus d'une fois pour prendre la parole, mais se tut au dernier moment à chaque fois.

Noah ne la regardait pas, il fixait le vide ne sachant certainement pas où poser les yeux.

Elle osa enfin :

« Écoute, Noah, je...

- Tu es désolé, mais encore ? La coupa-t-il

- Je suis désolé...

- Je le sais ça ! Mais moi je suis désolé de n'avoir rien remarqué ! Bordel, j'suis vraiment con ! Je suis ton ami, non-pardon, ton meilleur ami depuis qu'on a 6 ans, et j'ai même pas remarqué que ça allait aussi mal. C'est moi qui suis désolé, c'est moi qui... »

Il ne finit pas sa phrase. Angela lui prit la main et la serra.

« Ce n'est pas ta faute. Toi, tu n'as en aucun cas à t'en vouloir, c'est entendu ? Alors que moi si, j'ai toutes les raisons de m'en vouloir. Tu n'y es pour rien dans ce qui m'est arrivée, tu n'y peux rien si j'ai fait ce que j'ai fait. Tu n'y peux absolument rien, d'accord ? Au contraire, depuis qu'on est gosses on veille l'un sur l'autre, si tu savais le nombre de fois où je n'allais pas bien et que t'es arrivé au bon moment, que tu m'as fait sourire, voire rire. Tu peux pas savoir à quel point tu étais, et est toujours important, et encore plus aujourd'hui. »

- Il t'est arrivé quoi alors ? Je sais qu'il t'est arrivé un truc grave, je sais que ces filles te pourrissent la vie depuis, je sais aussi que ce foutu directeur de mes deux-là fout que dalle pour t'aider ! Il t'est arrivé quelque chose de grave que beaucoup trop de personnes ne croient pas ou ne juge pas sérieux. J'suis désolé, mais vu comment t'a agi hier soir, ils n'auront plus trop le choix de se rendre compte qu'il t'est arrivé un truc traumatisant. Il le dit presque en rigolant, mais son rire n'était pas drôle, il était d'un ton sec.

- Attends, c'est toi qui en as parlé au directeur ? Il m'a convoqué lundi en me disant qu'un élève lui avait rapporté que d'autres élèves m'insultaient dans mon dos. Je me demandais qui était la personne qui avait balancé...

- Tu m'en veux de l'avoir fait ? Parce qu'après tout je voulais juste t'aider moi et puis...

- Noah. Je ne t'en veux pas plus que ça. Je me demandais juste qui et pourquoi, c'est tout. Mais merci. De toute façon le directeur n'avait pas l'air de beaucoup croire à tes paroles, il était sceptique quand je lui ai dit que non. Peut-être que pour lui un 2nd qui balance des problèmes entre 1ères c'est trop chelou pour être logique. »

Parfois, elle et Noah oubliait qu'ils n'avaient pas le même âge, lui étant 1 an plus jeune qu'elle. Cette réalité, ils l'avaient mise de côté depuis belle lurette.

Angela se leva de son lit et s'assit plus proche de Noah, elle posa sa tête sur son épaule et garda sa main dans la sienne, comme ça elle avait l'impression d'être de retour au collège, quand elle était en 3ᵉ et lui en 4ᵉ, à cette époque ils subissaient des remarques sur leur proximité, tout le monde leur demandait s'ils étaient en couple, et à chaque fois Noah répondait un non-timide alors qu'elle lâchait un non décidé et sûr, un non qui voulait dire « on est juste ami rien de plus ! ». Les regards compatissants et des petits rires s'adressaient à Noah et alors les autres leur disaient juste « À je croyais, excuse-moi. » les deux amis continuaient leur discussion assis l'un à côté de l'autre sur un banc.

Elle eut l'impression que cet instant s'était figé dans le temps, que tout allait bien, elle oublia presque sa détresse quotidienne, oublia presque son martyre, oublia presque la tristesse ressentie sans Noah.

Presque...

Malheureusement, elle savait que rien ne s'arrangeait comme ça. Que tout ne va pas mieux en un claquement de doigts, elle savait que pour remonter la pente, il fallait le vouloir et s'accrocher. Elle savait que rien ne changerait si elle ne ferait rien pour changer les choses.

Elle savait tout ça, mais la réalité n'est pas si facile, les paroles sont bien belles, mais les actes seraient tellement mieux.

Noah passa la main autour de ses épaules et lui fit un câlin, cette fois Angela craqua à nouveau et pleura de grosses larmes. Elle se tourna vers lui et s'accrocha à son sweat, comme si elle craignait qu'il parte, qu'il la laisse seule, qu'il l'abandonne. Elle le serra tout en pleurant. Ses pleurs correspondaient à sa douleur que personne ne connaissait, cette douleur si profondément enfouie en elle depuis presque 1 an. Elle pleura et s'accrocha, car c'était comme si un poids la quittait petit à petit, elle savait que pour qu'elle la quitte entièrement, elle devait en parler.

Elle le savait.

Elle recula un peu son visage de son épaule. Sécha ses larmes et lâcha d'une voix dure :

« Tu veux savoir ce qui s'est passé ? »

Elle est moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant