Je me réveillais dans un lit, doux, qui n'avait rien du sol rugueux de la forêt.
- Je pense qu'il est conscient, murmura une voix féminine près de mon épaule.
J'entrouvris les paupières, cherchant à lui donner raison.
Mes yeux ne s'ouvrirent pas, au demeurant, ma bouche poussa un superbe grognement qui aurait terrifié un loup.
La douleur s'était ravivée, mes yeux hurlaient au supplice.
La personne qui venait de parler s'approcha de moi.
- Bonjour Raphaël, commença-t-elle. Ravie de vous voir éveillé.
Je la sentis réajuster mes oreillers.
- Un conseil, poursuivit-elle, n'ouvrez pas les yeux pour l'instant. Les blessures doivent cicatriser au mieux.
- Merci, murmurais-je pour les oreillers.
Je détestais être mal calé dans mon lit. Mais la femme pensa que je parlais de son conseil.
- Oh, ce n'est pas moi, c'est le médecin qui m'a chargé de vous le dire.
Le sommeil alourdissait toujours mes membres endoloris. Ma main glissa et vint heurter la barrière de mon lit. Enfin, du lit. Ce n'était pas le mien, le mien avait les rebords en bois, moins hauts que celui-ci.
- Où sommes-nous ? demandai-je subitement.
- À l'Hôpital de la Pinède, répondit l'infirmière. Après l'accident, la camionneur nous a appelés pour venir vous chercher. Nous vous avons rapporté ici, tu as dormi pendant vingt-quatre heures. Ton accident n'est pas très grave. La douleur a du s'apaiser, non ?
J'hochais la tête sans intérêt. Ce lièvre était définitivement l'animal le plus débile de la planète. À moins que ça ne soit moi. J'aurais dû sourire, normalement. Rire avec Arthur de ma boulette, ou juste remercier l'infirmière. Mais ma joie demeura figée au fond de mes entrailles, et mes lèvres se tordirent en une grimace disgracieuse.
J'entendis les pas de l'infirmière s'éloigner. La poignée de la porte grinça.
- Vous avez de la famille dans la salle d'attente, informa la femme. Je leur demande d'attendre ?
L'avantage de ma blessure, c'est que je ne verrai pas les visages trop anxieux ou faussement empathiques de la famille. Mais je me sentais toujours pas le courage d'entendre leurs voix.
En bon fils que j'étais, je répondis :
- Faîtes-les attendre, s'il vous plaît, je me sens encore faible.
- Très bien, dit l'infirmière avant de refermer doucement la porte.
La fenêtre ouverte me permettait d'entendre le concert fou des oiseaux. Les rayons du soleil réchauffaient mon bras gauche. Je repoussais difficilement les couvertures qui m'étouffaient.
- Si le projet des médecins était de me faire mourir d'asphyxie, murmurais-je, j'ai déjoué leurs plans.
Un bruit provenant du couloir attira mon attention.
Soit l'infirmière n'avait pas compris le message, soit ma famille s'en fichait complètement, mais la voix de ma mère résonna dans le couloir, se rapprochant dangereusement de ma chambre. La serrure cliqueta.
- Raphy ? appela Maman. Comment as-tu pu être aussi imprudent ? J'espère que tu vas mieux. Enfin, quelle question, c'est sûr que tu vas mieux. J'ai parlé à ...
Je tournais vers elle mon visage blessé. Elle se tut soudainement.
- Bonjour maman ! lançai-je, une pointe d'ironie dans la voix. Tu disais quelque chose ?
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La nuit sans étoiles
NouvellesJ'étais peintre, avant qu'un accident ait l'ingénieuse idée de me rendre aveugle. Dans leur extrême bonté, mes parents m'on expédié dans ce fameux centre "pour les enfants à problèmes". Ma seule amie est folle. Médicament prouvé. (Un vraie tarée, v...