Les aventures de Cyra - Une histoire Esprits Criminels

3 - Première partie

Shakespeare a écrit : « Ses flèches m'ont trop cruellement blessé pour que je puisse m'élancer sur ses ailes légères ; enchaîné comme je le suis, je ne saurais m'élever au-dessus d'une immuable douleur, je succombe sous l'amour qui m'écrase. »

***

- Vous avez demandé à me voir ? questionna rhétoriquement Cyra Leroy en cognant quelques coups sur la porte ouverte de son supérieur, Aaron Hotchner.

- Oui, entre. Et ferme la porte.

La jeune agent hocha la tête, soudain incertaine de la situation, et s'exécuta en silence. S'il était déjà inhabituel que Hotch la convoque, il était encore plus étrange qu'il lui demande de fermer la porte.

- Est-ce qu'il y a un problème ? interrogea-t-elle en s'asseyant avant qu'il n'ait pu dire quelque chose.

Mortellement sérieux, comme toujours, ce fut à son tour d'hocher la tête et Cyra se raidit sur le siège sur lequel elle avait pris place en face de son supérieur.

- Comment tu vas, depuis la dernière affaire ?

Machinalement, la jeune femme porta la main à sa tête, là où la cicatrice n'avait pas encore eu le temps de complètement se refermer, laissant une douleur diffuse qu'elle avait appris à ignorer.

- Mon médecin n'a rien trouvé d'anormal.

- Ce n'était pas ma question, insista-t-il.

Elle soupira.

- Je vais bien. J'ai juste envie de reprendre le travail, j'en ai marre de devoir être mise de côté.

Hotch ne répondit rien, se contentant de la fixer avec une intensité qui la mit presque mal à l'aise. Elle eut l'impression qu'il cherchait à voir au travers d'elle, au travers des tissus de mensonges et de non-dits en-dessous desquels elle avait caché la vérité.

- Je viens de recevoir le rapport de ton évaluation psychologique.

L'espoir fit se redresser l'agent. Elle savait qu'elle l'avait réussi cette évaluation, il ne pouvait pas en être autrement alors qu'elle avait fait exactement ce qu'il fallait pour satisfaire le psychologue.

- Et ? souffla-t-elle, impatiente.

- Je crois que tu es suffisamment intelligente pour tromper pas mal de monde.

- Qu'est-ce que ça veut dire ?

La tension s'était densifiée dans l'air, et Cyra revêtait désormais une posture hostile, inconsciemment. Hotch, toujours aussi calme, posa les mains sur son bureau.

- Tu agis de façon qui n'est pas professionnelle en mission, commença à énumérer l'homme ; tu désobéis aux ordres directs, tu te mets dans des situations dangereuses volontairement, tu...

- Arrêtez ! ça suffit !

Il le fit, il se tut, et attendit. Elle comprit soudain le but de la manœuvre : si elle avait réussi à berner le psychologue, Hotchner ne se laisserait pas avoir si facilement. Cyra se passa une main dans les cheveux, repensant à la raison qui l'avait poussé à les couper. Ça avait été le début de son déclin psychologique, le moment où les digues érigées avaient commencé à se fissurer.

- Je suis honnête avec vous, Hotch, je vous assure. Evidemment, les dernières affaires ont été... difficiles à encaisser, mais je vous trouve injuste.

- Est-ce que tu dors, en ce moment ?

- Je ne vois pas le rapport.

L'attitude stoïque de l'agent Hotchner commençait à lui taper sur les nerfs. C'était comme si ses paroles tombaient directement dans le vent.