15.2🦇Je t'ai à l'oeil

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— Ça ne sera pas gratuit.

Mon portable en haut-parleur sur mon bureau, je mordille mon crayon à papier avant d'expirer bruyamment. Il est tôt, ou tard, lorsque je passe mon appel à Dave, mon contact à New York chargé des analyses complémentaires sur Gustave.

Dave, un homme d'une quarantaine d'années, est un ancien journaliste que j'ai rencontré, ou plutôt sauvé, de Woodstock 99 lorsqu'il avait 18 ans. Depuis notre rencontre, il a repris ses études et s'est reconverti en expert médical des créatures fantastiques.

La gloire et la richesse auraient pu être à lui s'il n'avait pas, comme moi, des tendances dépressives qui le font parfois chuter dans les pires excès. La dernière fois que je l'ai vu, j'ai dû l'aider à sortir d'une relation toxique avec une succube.

J'hésite à lui rappeler cet épisode pour qu'il m'aide, mais me ravise. J'ai déjà si peu d'amis.

— D'accord. Envoie-moi ton prix, mais je veux que ma demande soit prioritaire, s'il te plaît.

— OK. Sinon, tu avais une autre question ou je peux y aller ? Mon service commence dans quelques minutes.

— Est-ce que tu penses que je devrais donner une chance à Mia ?

— Mia Joy ? Parce que vous n'êtes pas ensemble ? Tu n'es qu'un con, Blake.

Je roule des yeux avant d'observer par la fenêtre les étudiants se rendant en cours. L'automne s'est bien installé et me rappelle l'ultimatum reçu par la famille Heathcliff il y a quelques heures.

Ils veulent que le vrai coupable soit retrouvé et qu'Esmée soit libérée avant Halloween. Ce qui me presse dans l'écriture de mon rapport d'enquête et les confirmations de mes preuves.

— J'ai des vues sur une sorcière. Elle n'était pas d'accord.

De l'autre côté, Dave souffle certainement la fumée de sa cigarette, ce qui déclenche un tremblement de manque de ma part que je contrôle en buvant une grande tasse de mon thé.

— Vu ton passif, j'approuve. C'est quoi son nom ? Que j'aille fouiller.

— Maverick Granth.

Un silence de quelques longues secondes s'installe entre nous avant qu'il ne siffle d'admiration.

— Vraiment pas mal ! Tu as tout mon soutien pour-

— J'ai sucé son sang.

— Putain, Blake ! Pourquoi tu gâches toujours tout ?

— C'était du AB-.

Je n'ai pas besoin d'en dire plus que Dave laisse s'échapper un « hmmm » significatif. Il comprend enfin où je veux en venir et ça me facilite franchement les choses.

— OK, j'ai saisi. Alors j'ai un conseil pour toi : profite de ce que la vie peut te donner parce qu'on n'est pas sûr de ce dont demain est fait.

— Tu as trouvé cette citation sur Facebook ?

— Je me tire. Je t'envoie un mail avec les résultats dès que c'est bon.

Après son appel, mon regard est toujours perdu à regarder les feuilles des arbres tomber. J'essaie de me souvenir de ma vie mortelle, de la mer, des mouettes et de l'agitation du port. De mon père, sévère mais juste. De ma mère, la meilleure cuisinière de la ville. De mes amis, tous plus ivrognes, mais sur qui je pouvais compter.

D'elle.

De ce soir de pluie où elle a frappé à la porte de la cabane non loin de chez mes parents. Là où je passais le plus clair de mon temps à rêver d'elle.

Always yours, the Witch  [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant