Jane

5. Se résigner

Jane

Je respire bruyamment en maintenant mon cou, je ne comprends pas ce qui vient de se passer. Je me suis réveillée, ses doigts étaient à l'intérieur de moi mais je n'avais pas mal, ça ne me brûlait pas comme d'habitude. Qu'est-ce qu'il m'a fait ? Est-ce qu'il m'a donné une drogue spéciale dans mon sommeil avant de me faire tout ça ?

Je me relève doucement pour aller dans la salle de bain, mes côtes me lancent mais c'est supportable. Les patchs que Veronica a mis sur moi fonctionnent bien. J'entre dans la pièce, je cherche le miroir pour me regarder.

Je saigne du nez, mes joues sont écarlates, il y a la trace de ses doigts dessus. Ma nuisette est déchirée, mon sein gauche saigne aussi. Lyroïd n'avait jamais touché à mon visage, il disait qu'il ne fallait pas abimer la tronche de son gagne-pain le plus rentable.

Je ferme la porte à double tour avant de m'assoir au sol contre la baignoire. Je ne veux pas que l'on me voit dans cet état. Je suis si répugnante, si sale.

Où est Samantha ? Est-ce qu'elle a manigancé ça avec lui ? Si ça se trouve c'est elle qui m'a drogué à sa demande.

Je remonte mes genoux contre ma poitrine, je laisse mes larmes perler sans faire de bruit. J'ai cru que Samantha ou Veronica seraient différentes, elles me paraissaient si gentilles. Elles se sont occupées de moi comme personne ne l'avait fait avant. Je ne peux pas leur faire confiance, dans ce milieu on ne peut faire confiance à personne. Tout est bon pour trahir une autre fille.

-- Jane tu es là ? entends-je Samantha derrière la porte.

Je ne réponds pas, je n'ai pas envie de lui parler, à plus personne d'ailleurs. Il m'a dit que j'étais une menteuse, mais je ne suis pas une menteuse. Il m'a accusé de faire semblant mais c'est faux. Elle essaie d'ouvrir la porte mais elle est fermée à clefs.

-- Jane, ouvre-moi s'il te plait, ajoute-t-elle.

Non, laisse-moi traitresse. Il t'a promis quoi pour que tu le laisses me faire ça ?

-- Jane s'il te plait ouvres, insiste-t-elle. J'ai eu un appel de mon copain, tu sais je t'en ai parlé. Je n'ai pas voulu te réveiller alors je suis sortie dehors. Je suis désolée si tu as eu peur en te réveillant toute seule... Est-ce que ça va Jane ?

Je veux crier que je ne me suis pas réveillée seule, qu'il était là en train de me toucher, mais je n'y arrive pas. Ce sont elles les menteuses, elles me font croire qu'elles voulaient m'aider mais en fait non. Je mors ma lèvres et je frappe mes cuisses avec mes poings de toutes mes forces, encore... et encore... et encore...

-- Jane, dis-moi au moins si ça va, poursuit Samantha. Tu commences à m'inquiéter.

Tu t'inquiètes vraiment, arrête de mentir. Ça doit te faire plaisir qu'il me fasse du mal.

A la maison, c'était déjà comme ça. Les autres filles racontaient des choses fausses sur moi à Lyroïd pour qu'il passe ses nerfs sur moi. Il me ruait de coups, ce qui les amusaient. Il était si brutal que je n'arrivais plus à quitter mon lit pendant des jours. C'étaient au moins quelques jours de répits où je n'avais pas à recevoir de clients.

Toutes les filles passaient une à une dans ma chambre pour venir constater qu'il ne m'avait pas raté. Si certaines affichaient ouvertement leur satisfaction de constater que j'étais hors service, les autres tentaient de feinter qu'elles en étaient navrées. Mais je n'étais pas dupe, toutes se réjouissaient de ma situation. Je n'ai jamais compris pourquoi elles me détestaient au point de prendre plaisir à me voir dans cet état.