Chapitre 15

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La pluie continuait de s'abattre sur Beacon Hills avec une énergie certaine, elle semblait claquer contre les vitres du loft. C'était en tout cas la perception de Stiles, dont le regard y restait accroché. Allongé sur le lit d'une chambre dont il n'avait même pas réfléchi au potentiel propriétaire, l'hyperactif restait là à ne rien faire. Il était juste là, apathique. Ses yeux secs ne clignaient que rarement et marquaient de leur rougeur caractéristique le mélange de sécheresse et d'émotion qui les avait malmenés. Qui continuaient, dans une moindre mesure. Une chose était certaine : il n'avait pas la moindre énergie. Pas la moindre envie non plus. Il avait cessé de lutter, parce que son esprit était trop fatigué, éreinté par ces jours qui n'avaient pas de sens.

Parce que Derek ne l'aidait pas. Parce qu'il le bridait, parce que... Cet enfoiré de Sourwolf, au lieu d'agir comme il en avait l'habitude, au lieu de le virer du loft à coups de pied s'acharnait à l'y garder enfermé. Stiles continuait de ne voir aucune bonté dans cette décision, aucune volonté de le garder au chaud, à l'abri du mauvais temps. Sa vision des choses ne concevait pas l'idée que Derek Hale puisse se montrer gentil avec lui. Il n'y avait qu'à voir la façon dont il l'avait laissé se ridiculiser devant lui. L'ancien alpha n'était pas du genre à faire les choses au hasard – chacun de ses mots, aussi rares soient-ils, comptaient. Ses silences aussi. Pour Stiles, l'intention du loup-garou avait clairement été de lui nuire. De se moquer de lui. Il voyait ça comme une espèce de vengeance suite à toutes ces fois où il l'avait agacé, dérangé, harcelé – à la Stilinski. Enfin pour sa santé mentale – s'il voulait en tout cas la préserver –, Derek ferait mieux de le laisser s'en aller incessamment sous peu. Car si les batteries de Stiles étaient vides, elles finiraient par se recharger. A ce moment-là, il redeviendrait insupportable, invivable, bien loin de la marionnette apathique qu'il était actuellement. Derek en paierait le prix fort – sans violence. Cependant, il devait comprendre que Stiles, lorsqu'il en avait la force, n'était pas du genre à se laisser faire. Ces quelques minutes, ces quelques heures... N'étaient rien de plus qu'une exception. Un moment de creux à cause d'une explosion qui menaçait toujours d'avoir lieu.

Car les défenses intérieures de Stiles avaient beau être zébrées ici et là, elles ne s'étaient pas encore complètement effondrées. Il n'avait pas craqué au sens propre du terme. Pleuré, oui. Laissé échapper des mots qu'il aurait aimé garder pour lui, aussi.

Mais c'était encore loin de ce qu'il se savait capable d'exprimer et qu'il retenait au maximum. Prisonnier de cet épuisement qui n'avait rien de physique, Stiles ne pipait mot. Que Derek profite de son silence, car l'hyperactif lui-même ne pouvait dire le temps que celui-ci durerait. Que Derek prenne ça comme un cadeau de la providence avant qu'un déluge de mots ne s'abatte à nouveau sur lui. Que Derek apprécie le fruit de son humiliation, pour le temps que Stiles était vulnérable. Les choses allaient bientôt changer. Redevenir comme avant, ou empirer.

Stiles soupira. Qui cherchait-il à convaincre ? Lui-même, sans doute, histoire de se donner la force qui lui manquait pour botter les fesses de ce loup-garou grincheux qui ne faisait rien de plus qu'obéir à son alpha – c'était en tout cas ce qu'il continuait de penser. Il s'agissait d'une chose plus facile à envisager que le reste, qui le pousserait à une réflexion poussée sur l'hypothétique humanité de Derek – et ça, Stiles n'en avait pas la force. Il laissait son déni le chouchouter dans sa position fermée mais confortable, celle qui lui laissait le loisir de se reposer moralement parlant.

Au fond de la chambre, un bruit. Celui de la porte, sans doute – Stiles n'en avait cure. N'en déplaise à son hôte, il n'avait pas la moindre envie de papoter ou même de simplement... Réagir. Quoiqu'ait prévu Derek, rien d'autre ne l'attendait, si ce n'était l'échec de la moindre de ses tentatives pour cela.

Not Good EnoughOù les histoires vivent. Découvrez maintenant