Chapitre 20

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Thomas était du genre débrouillard et solitaire depuis toujours, mais s'il y avait une personne avec qui il adorait passer du temps, c'était bien Noah. Néanmoins, son but s'avéra cette fois-ci bien différent à celui de passer un simple moment père-fils. Disons qu'il allait tenter de faire d'une pierre deux coups tout en essayant de garder secrète cette dissension fraternelle qui rendait sa relation et celle de Stuart avec Stiles compliquées. Il savait que le cœur de Noah se retrouverait déchiré de part en part s'il apprenait que ses fils ne s'aimaient pas et... Que deux d'entre eux étaient peut-être un peu trop durs avec le troisième. Thomas n'imaginait pas la syncope qu'il serait capable de faire s'il finissait par découvrir que Stuart et Stiles s'étaient battus. Par « chance », le premier avait trouvé une excuse à ses égratignures et le second... Brillait par son absence, là aussi justifiée – par Thomas, cette fois-ci. Stiles n'avait pas menti quant à ses intentions : il ne dirait rien et ne chercherait à leur faciliter la tâche d'aucune manière.

Au départ, Thomas lui en avait un peu voulu. Maintenant, il voyait les choses sous un autre angle. Dire qu'il comprenait serait un peu fort mais se rapprochait néanmoins un peu de ce qu'il ressentait.

- Qu'y a-t-il, fiston ? Lui demanda Noah après un moment.

Le père et le fils étaient assis à table, l'un en face de l'autre. La table était dépourvue de nappe et de toute forme de victuailles : il n'était pas l'heure de manger et Thomas avait expressément demandé à son père de « discuter ». A la réflexion, agrémenter ce moment de quelques crocs dans un sandwich n'aurait pas été de trop. Thomas aurait peut-être même trouvé le moyen de se lancer sans se sentir gêné, en sachant quels mots employer. Il n'irait pas jusqu'à dire que la nourriture était son moteur, mais... Elle pouvait aider.

- Eh ben... C'est à propos de Stiles, finit-il par lâcher, en espérant que sa phrase ne donnerait pas une mauvaise impression à son père.

Noah fronça les sourcils d'un air confus.

- C'est juste qu'on ne s'est pas beaucoup vus ces dernières années et que... Stuart et moi, on a manqué beaucoup de choses à son sujet. Parfois, quand il nous parle, on est largués, expliqua Thomas.

Il avait trouvé ses mots avec aisance malgré le malaise qu'il ressentait. En soi, il ne mentait pas, il arrondissait simplement les angles, de sorte à ne pas alarmer Noah quant aux scissions qui déchiraient leur fratrie – au sens propre comme au sens figuré. Il était de toute façon clair que pour tenter d'ouvrir le dialogue avec Stiles, Thomas devrait de toute façon se renseigner sur sa vie de ces dernières années à Beacon Hills et ce qui l'avait amené à évoluer de cette façon. Sans tout cela, il serait difficile pour lui de trouver le bon angle pour discuter avec lui.

Noah sourit, amusé. Par chance, il croyait son fils et dans ses paroles, il ne trouva rien qui pourrait l'inquiéter. Il s'adossa confortablement contre le dossier de sa chaise.

- Ton frère a toujours été un électron libre, commença-t-il.

Sur ce point, Thomas ne pouvait qu'acquiescer... Sans pouvoir définir s'il s'agissait d'une bonne ou d'une mauvaise chose. Disons qu'il savait, par rapport à la fuite récente de Stiles, que ce dernier pouvait avoir des comportements frôlant l'autodestruction. Le simple fait de dormir dehors à cause de leur mésentente à tous les trois était parfaitement irresponsable. Sans alerter leur père, c'était encore pire. Faisait-il au moins attention à sa santé ? Thomas espéra qu'il n'avait pas attrapé froid, que tout allait bien pour lui. Que ces amis étranges qu'il avait l'accueillaient et... Ne lui jouaient pas de mauvais tour. Malgré leurs différends et leur relation plutôt explosive, il connaissait un peu Stiles et savait que ce dernier pouvait parfois se montrer... Un peu idiot, naïf. Le genre à donner sans réfléchir et à se faire bananer l'instant d'après. Or, Thomas ne voulait pas qu'il se mette en danger pour qui que ce soit, encore moins que l'on profite de sa crédulité pour lui soutirer quelque chose. De l'argent, des devoirs, l'emploi du temps de Noah, des techniques pour passer entre les mailles du filet de la justice...

- Stiles fait beaucoup de choses, il ne sait pas tenir en place, rit le shérif. Au début, j'ai eu tendance à m'en agacer et au final, je me suis rendu compte qu'il ne pouvait pas être autrement. Il a besoin de courir partout, d'aider ses amis.

Nous y voilà, pensa Thomas en se redressant sur sa chaise.

- Et tu n'as pas peur qu'ils profitent de lui ? Je veux dire... Certains d'entre eux n'ont pas l'air très nets, fit-il avec gêne.

Cette fois-ci, ses mots étaient mauvais, mal choisis. Disons qu'ils étaient sortis avec un peu plus de naturel que les précédents – l'inquiétude de Thomas concernant ce sujet prenait une place certaine, l'empêchant de garder le contrôle sur l'intégralité de la situation.

- Derek a un casier, confirma Noah d'un air pensif. Pour quelque chose qu'il n'a pas fait. Je le connais, c'est quelqu'un de bien et je peux te dire la même chose concernant chacun des amis de ton frère. Certains ont un parcours de vie particulier, je te l'accorde. Mais tous sont honnêtes et droits dans leurs bottes. Certains ont déjà sauvé la vie de ton frère, tu sais ? Et inversement. Ce sont des gens à qui, malgré les apparences, on peut faire confiance. Stiles sait s'entourer.

Et Thomas avait vraiment envie de le croire, ainsi son inquiétude reculerait-elle non pas d'un, mais de deux pas. Il ne demandait que ça. Seulement, il n'était pas dans les habitudes de Noah de se montrer aussi détendu. Les années l'avaient vraisemblablement assagi et rendu un peu plus ouvert qu'autrefois. Ce qui démontrait également que Stiles avait dû, dans un sens, lui en faire baver car autrefois, jamais Noah Stilinski n'aurait autorisé un homme ayant un casier à... « Être ami » avec l'un de ses fils, et ce, même s'il était innocent.

Mais Thomas voulait effectivement se dire que ça allait, que Stiles n'était pas dépourvu de bon sens. Pas complètement du moins. Un détail – et pas des moindres – se rappela néanmoins à lui.

- Papa... Qu'est-ce que tu entends quand tu dis qu'ils lui ont déjà sauvé la vie ? Finit-il par demander.

- J'entends exactement ce que tu comprends, répondit Noah en haussant les épaules.

Il ne semblait pas avoir envie de développer, or Thomas avait besoin de savoir. Il n'aimait pas le fait que son père sous-entende des choses sans les dire directement. Il avait tout simplement besoin de franchise.

- Mais comment ? Insista-t-il.

- C'est à Stiles de vous en parler, à toi et Stuart. Vous ne vous voyez pas souvent, laissez-lui le temps de se réhabituer à votre présence. Vous êtes ses frères, il vous parlera, le rassura Noah.

Et Thomas fit au mieux pour ne pas laisser le doute s'instiller sur son visage. Son paternel ne devait pas imaginer l'étendue de son inquiétude tout comme il ne fallait pas qu'il ait vent de la situation. Mais très honnêtement, le double de Stiles n'était pas certain que celui-ci finisse par leur parler, à Stuart et lui. Il semblait, au contraire, vouloir les éloigner de sa vie à tout prix, de leur cacher tout ce qu'il faisait.

Et ce pouvait être dangereux.

- Merci Papa.

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 10 ⏰

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