4- Ava

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   Elle avait oublié ce que c'était d'être heureuse. Comment avait-elle pu oublier ce sentiment si salvateur ?

Les parfums qui s'envolent autour d'elle lui donne le tournis. Ava aime ce vertige qui lui rappelle qu'elle est vivante, qu'elle respire et que son cœur bat la chamade dans sa poitrine.

Cela faisait longtemps qu'elle n'avait plus ri autant. Elle avait oublié le son de son propre rire, le bien-être que cela procure. Quelle surprise de l'entendre de nouveau. Ce son mélodieux lui chatouille les oreilles.

Elle se couche dans les herbes hautes et fixe le ciel bleu. Elle se sent bien, merveilleusement sereine. Cela lui parait tellement improbable qu'elle respire profondément, savourant son bonheur.

La chambre d'hôpital s'estompe, les examens médicaux s'effacent, les opérations s'évaporent, la douleur disparaît petit à petit.

Elle n'y croit pas. Pourtant, elle se sent vraiment bien. Cela fait des années qu'elle n'avait plus ressenti cette sensation incroyable.

Ne pas avoir peur du lendemain, ne pas redouter des résultats qui tardent, ne pas fixer le médecin avec la boule au ventre. Elle ne doit plus rien appréhender et cela la perturbe.

Elle sent la chaleur du soleil sur sa peau. Elle savoure. Ava écoute un oiseau qui s'égosille à quelques dizaines de mètres d'elle. Elle déguste ce moment sans inquiétude, sans appréhension.

Elle se laisse bercer par la douceur du vent chaud qui s'infiltre dans ses cheveux. Certes, ils sont très courts, mais elle en a de nouveau. Tant pis si le garçon qui la dévisage dans le miroir la laisse perplexe. Ils pousseront petit à petit et cela effacera les effets secondaires de ses anciens traitements. Le garçon redeviendra une jolie jeune fille. Sa maman lui promet que sa chevelure sera encore plus belle, plus douce. Elle n'y croit pas vraiment, mais elle se laisse convaincre malgré tout.

Sa maman, Bree, avait bien dit qu'elle guérirait et qu'un jour, ce serait derrière elle.

Ce jour n'est-il pas enfin arrivé ?

Elle cueille une marguerite, compte chaque pétale avec attention puis lève les yeux vers les nuages.

Les bateaux blancs voguent sur la surface bleue de la voute céleste. Ils naviguent lentement et inventent des formes incongrues. Elle repère un chien hilarant, une fillette déformée, un drôle de clown. 

Elle ferme les yeux lentement et imagine sa vie future. Tout ce qu'elle pourra réaliser, tout ce qu'elle pourra rattraper. Certes, elle a perdu du temps, beaucoup de mois à se battre et à déprimer, mais il n'est jamais trop tard.

Elle veut se lever le matin, légère et libre. Elle veut réaliser les rêves qu'elle garde précieusement dans son cœur, ceux qu'elle pensait perdus, ceux qu'elle supposait impossibles.

Ava regarde les hautes tiges vertes s'élever vers le ciel, elle se remet à rire toute seule. Elle ne sait pas pourquoi et cela n'a pas d'importance. Son rire danse autour d'elle pour rejoindre les nuages.

Ava espère que le bonheur est enfin devant elle. Elle lui tend la main, oubliant les années grises qui essaient encore de la retenir.

Elle ne veut plus regarder en arrière, elle veut avancer.

Elle rit parce qu'elle est guérie. Ava rit parce que tout ce qu'elle espérait s'est transformé en réalité.

Apaisée, elle fixe le ciel si grand, si vaste au-dessus d'elle et cette vision la rassure. Elle prend conscience qu'elle vient de tourner une page.

Elle sait que désormais elle sera heureuse.

Elle est vivante.




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Pourquoi la maman d'Ava s'appelle Bree ?

C'est un clin d'oeil à ma super maman, Brigitte.

Les méandres de nos viesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant