CHAPITRE 21

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- Pardon ?

Ma proposition est stupide, qu'est-ce qui m'a pris de demander ça ?

- Une alliance. Tous les deux, je répète, essayant de ne pas croiser son regarde malgré la pénombre.

- Emme...

- Il ne restera que nous à la fin, toi et les autres, et peut-être Will, les chances de victoire pour l'un de nous serons alors très basse. Je tente d'expliquer alors que je n'ai aucune idée de la tête qu'il fait.

- On a formé une alliance et promis de la suivre jusqu'à la fin. Il tranche.

Je peux entendre même à des kilomètres les présentateurs se frotter les mains et les mentors planifier ma mort prochaine. Caesar doit être aux anges. Deux tributs qui conspirent contre leur allié...

Qu'en pensez-vous président Snow ! je pense.

- N'en parlons plus d'accord. Je tranche en me remettant à marcher.

De retour au camp, il part se coucher et j'en fais de même. Ronflant à quelques mètres de moi, je continue de me retourner, tentant de trouver une position agréable pour dormir. Et alors que je m'apprête à fermer les yeux, je croise deux orbites jaunes me fixant dans l'obscurité. Je reste un moment à les observer, ne pouvant les quitter du regard lorsqu'ils disparaissent aussi subtilement qu'ils ne sont arrivés dans le noir. Comme je voudrais pouvoir m'enfuir, courir loin d'ici, loin de ce monde de destruction. Finalement, mes pensées se perdent alors que je m'endors.

Je somnole encore. J'hésite à ouvrir mes yeux, sachant que ce que je vais voir ne va pas me faire plaisir. Un courant d'air me frôle et je prends mon courage à deux mains. Je passe une main sur mon visage gelé et ouvre un œil, puis un deuxième et ce que je vois me tétanise.

Sa gueule à quelques centimètres de mon visage, salivant comme une bête enragée, un énorme rat. Je hurle aussi fort que possible et me lève. Autour de moi, c'est la panique. Karya sort de son sommeil alors que la bête se jette sur elle quand d'autres sortent de fourrés se jetant sur nous.

Annabelle, devenue hystérique, tente de fuir et donne des coups de couteaux dans tous les sens. Mes haches en mains, j'envoie un coup dans l'abdomen gras et noir de l'abomination. J'évite Diego et repousse une autre attaque, alors que j'essaye de fuir. En surnombre, les rongeurs nous attaquent de tous côtés. Le canon sonne, je panique, je crie, ma vue se brouille.

Des cris stridents résonnent quand j'abats l'une de mes haches sur une de bête alors que nous nous précipitons tous dans les bois. Je cours tout droit, les larmes coulant le long de mon visage, entendant les pas rapides de la bête s'approcher de moi. Je ne mourrai pas aujourd'hui, mais ne pourrai pas fuir éternellement.

Sans crier gare, je me stoppe net, me campe fermement sur mes deux pieds les enfonçant dans le sol mou de la forêt et faisant face aux rats géants, attendant qu'il se jette sur moi pour le frapper aussi fort que possible.

Plus que quelques secondes, le rongeur bondit et alors qu'il a atterri sur moi, la hache s'enfonce sa chair et le sang gicle. L'animal continue de se débattre et étant coincée, je hurle alors que mon visage est recouvert d'hémoglobine. Ses pattes griffues continuent de remuer et empaler par-dessus moi, il essaye de m'atteindre au visage. Je tente de me décoincer et saisis mon couteau que je plante en criant dans sa jugulaire. La peur mêlée à la colère et à l'hystérie, je ne stoppe que mon massacre lorsque je parviens à retirer ma hache devenue rouge du corps du rat.

Mes vêtements sentent la mort et je me sens d'un seul coup répugnant. J'essuie mes mains dégoulinantes sur mon pantalon, mais celui-ci comme le reste de mes vêtements est aussi mouillé que si j'avais plongé dans le lac. Couverte de sang, je récupère mon couteau et hurle.

Je pleure aussi longtemps que mon corps le permet avant de me laisser tomber par terre. Sans est trop. Je n'en peux plus. Je suis à bout.

Mon regard se pose sur le couteau et j'imagine ce qu'il adviendra de moi si je franchissais ce pas. Les tributs ont-ils le droit de faire ça ?

La question m'effleure.

- Les gars ! vous êtes où ! Emme ! Karya !

Le canon sonne une deuxième fois. Je tourne sur moi-même, repère une masse de buisson et me jette dedans.

- Hé ho ! Diego ! Anna !

Je crois reconnaître la voix de Kay, mais j'hésite à sortir. En a-t-il profité pour tuer les autres pendants la panique ?

Je le vois s'approcher entre les fines branches et je tente de ne plus respirer. Il continue de nous appeler, mais personne ne lui répond.

- Putain, vous êtes où ! Emme !

Il n'est plus qu'à quelques mètres de moi. Épée ensanglantée à la main, j'entrevois qu'il a, lui aussi, souffert de l'attaque des rats géants.

Je respire une bouffée d'air quand il se met à courir. Vers moi ? je me tiens prête, comme devenu paranoïaque et alors qu'il passe à côté de ma cachette, sort et me jette sur lui.

J'atterris sur lui, couteau à la main. Il me repousse et nous roulons l'un sur l'autre. Je tente de me dégager, mais il me coince sous lui et je crie.

- Mais ça va pas ! Tu veux vraiment y passer toi !

Le son de sa voix est comme amplifié et je me rends compte qu'il me hurle dessus. Essayant de me calmer, je fonds en larme. Je me relève en titubant et il me serre contre lui.

- Ça va aller...

Je continue de pleurer pendant de longues minutes jusqu'à ce qu'il n'y ait plus aucune goutte d'eau dans mon corps. Les mouvements de sa main dans mon dos me rassurent et encore une fois, je baisse ma garde.

Je vais un jour y passer.

- Où sont les autres ? je demande d'une petite voix, toujours contre lui.

- J'en sais rien, personne ne répond.

Me détachant de lui, je jette un rapide coup d'œil à sa blessure : elle s'est rouverte à un endroit. Rien de très grave, mais l'infection risque de le guetter dans peu de temps.

- On devrait retourner voir au camp. Je propose en ramassant mon couteau sale.

Il acquiesce et son regard se pose sur la bête.

- Je vois qu'il y en a un qui a eu moins de chance.

- C'était lui ou moi !

J'ai le droit à une tape dans le dos et nous retournons doucement au camp.

- Le canon a sonné deux fois.

- Je sais, c'est pour ça que je m'inquiète.

Finalement, nous restons peu de temps dans le flou quand je trébuche sur le corps lacéré d'un garçon.

- On a maintenant une idée de pourquoi il a sonné. Je dis en m'accroupissant à côté du garçon. Lorsque je tombe sur son visage qui a comme été croqué, ce qui me traumatise et m'oblige à reculer sous peine d'expulser mon maigre repas de la veille.

- Retourne-le pour qu'on puisse voir le numéro. Je dis en m'éloignant, mains sur la bouche.

Kay s'active à la tâche et retourne le corps comme disloqué d'un seul coup de bras.

- District 9 mesdames et messieurs.

Je respire un bon coup, soulagée et ne peux pas me retenir. Je me précipite aussi loin que possible de mon coéquipier et rejette tout ce que j'avais mangé. Le visage exposé à la lumière du jour ou du moins ce qu'il en reste restera gravé à jamais dans ma mémoire.

- Emme vient voir ! on crie. Dépêche-toi !

Je rattache mes cheveux en toussant et le rejoins.

- Oh mon dieu. Je murmure sous le choc.

C'est Diego.

61 Hunger GamesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant