Je peine à fermer l'œil et essayant de ne pas trop remuer pour déranger mon partenaire, je tente pour la énième fois de m'endormir.
- Tu bouges pas, est-ce que c'est clair ?
Son souffle contre mon oreille, je me fige. Sans faire un bruit, je resserre ma main autour du manche de ma hache et ne bouge plus.
- Il est pas loin...
J'entends de la panique dans la voix de Kay et je lutte pour ne pas me retourner.
- Je descends voir, tu restes là !
L'insultant de tous les noms dans ma tête, je tente de lui dire que non, je l'accompagne, mais il me fait signe que non.
Il prend son épée et redescend lentement les roches. Agile comme un chat, il se dissimule dans l'obscurité quand, alors que je parviens à ramper dans le silence jusqu'au bord, je vois au loin une ombre disparaître dans la nuit.
C'est un piège, je le sais, il attire Kay loin pour le perdre dans le noir avant de le tuer. Sans perdre une seconde, je prends ma hache et, ignorant les conseils du carrière descends moi aussi de mon abri.
Malheureusement, je rate un point d'accroche et m'écrase sur le sol. Mon souffle se coupe et je tente de ne pas hurler de douleur. Mon bassin à tout pris et je ressens une forte douleur à l'épaule.
Grimaçant en silence, je me relève discrètement et cours dans la direction où est partie Kay. Si je repère Will et que je parviens à le contourner puis à le surprendre, j'aurais tout gagné. Trottinant tel une ombre ou un fantôme en fuite, je slalome entre les arbres, étant parfaitement à l'aise dans la forêt la nuit. Consciente que mon plan risque de ne pas marcher, je scrute avec attention les troncs d'arbres, il me faut un endroit où je puis grimper avant de l'appeler pour lui tomber dessus. Si je parviens à le maitriser avant qu'il ne trouve Kay, je pourrai m'estimer heureuse.
Totalement sûr de moi, je ne peux ignorer les battements rapides de mon cœur et les gouttes de sueurs qui coulent le long de mes tempes. La brise me donne la chair de poule et, essayant de me calmer, je m'abrite contre un tronc d'arbre. Ne pouvant m'empêcher de trembler, j'expire en silence et tente de ne pas faire de l'apnée. Calant ma hache contre ma poitrine, j'étouffe un sanglot et prie pour ne pas entendre le canon.
Je dois le faire, je dois le faire, je dois le faire, reprenant peu à peu mes esprits, je bloque ma respiration et fais le vide. La forêt fait du bruit, contrairement à ce que les gens croient, cette dernière a un son très reconnaissable, surtout la nuit. Tout son étranger ou nouveau s'entend immédiatement si l'on est attentif. Tendant l'oreille, je parviens à savoir si oui ou non quelqu'un rôde dans les dix mètres à la ronde, ce qui n'est après quelques minutes d'écoute pas le cas.
Prenant mon courage à deux mains, je quitte l'arbre et m'avance jusqu'à repérer un sapin dont les branches me permettent d'y monter jusqu'à environ mi-hauteur. De là, je parviens à avoir une vue d'ensemble sur la forêt assez dégagée et sur ce qui pourrait s'y balader dans le noir.
Ignorant comment attirer Will et non mon partenaire, j'opte finalement pour la chouette, signe de ralliement dans mon district lorsque les bûcherons partaient dans les profondeurs des bois pour y cacher du bois et que les pacificateurs commençaient à remarquer qu'une partie de l'effectif manquait. S'il a effectivement travaillé dans les scieries plus au nord, il reconnaitra ce son et saura que c'est moi.
Je me coince contre une branche et respire un coup, avant de prendre une inspiration et d'appeler.
Quatre coups, comme la cloche de notre mairie. Quatre coups pour le faire stopper sa traque. Quatre coups pour sauver Kay. Quatre coups pour le piéger.
Je me stoppe. Écoute. Pas un son. Le vent fait craquer les branches et je saisis le couteau caché dans ma ceinture. Je ne pourrai pas l'atteindre avec la hache, pas en me jetant sur lui par le dessus.
Je recommence.
Quatre coups.
Encore. Et encore. Mais rien.
Je commence à croire que cela ne sert à rien, quand enfin, j'obtiens une réponse.
Trois coups.
Il connaît le code.
Je recommence encore une fois et cette fois la réponse me paraît plus proche. Le vent porte le son et je décide de ne plus appeler. Il ne doit pas savoir où je suis.
Jetant un coup d'œil sur le sol, je me félicite d'avoir choisi le côté sans branches : je pourrai ainsi facilement me laisser tomber sans percuter un ou deux obstacles dans ma chute.
Mon rythme cardiaque augmente et je ressens le plaisir coupable de commencer à apprécier cette petite traque nocturne. Je ressens enfin ce sentiment de toute puissance ressenti par les carrières qui arpentent l'arène, tuant tout le monde sur leur passage. Je sais enfin ce que cela fait d'avoir la position de force. L'adrénaline m'envahit et en silence, perché dans mon sapin, j'attends.
Rien ne peut venir me déranger, focus sur ma cible, je crois apercevoir une forme entre les branches.
Se déplaçant lentement comme à la recherche de quelque chose. Tapis dans l'ombre, je compte les battements de mon cœur et le regard se mouvoir, tel un prédateur perché dans son arbre prêt à bondir sur sa proie ferait.
1, 2, 3, 4, 5, je respire aussi doucement que possible et plus il s'approche, plus, je me tiens prête.
Encore quelques mètres, il cherche où je peux être comme si j'allais bêtement me mettre derrière un arbre, je le vois, je vois son épée, fermement tenue dans ses mains, je remarque aussi son sac, obstacle potentiel à prendre en compte. Il fait les cent pas, et ne baisse toujours pas sa garde, je dois y aller maintenant. Mais il n'est pas encore assez proche de moi. Si je saute maintenant, je me brise les jambes.
Je dois atterrir sur lui. Sinon, c'est la mort assurée. À chaque pas qu'il fait, je prie pour qu'il ne me voie pas, pour que Kay ne se montre pas et pour que la personne en bas soit bien celle qui me sépare de mon but.
- Allez encore un peu... Je me murmure à moi-même quand, d'un coup, il fait quelques pas et lève la tête.
Mon sang se glace. Immobile, je ne bouge plus, ne respire plus, ne cligne même pas des yeux.
M'a-t-il vu ?
Il continue de fixer dans ma direction pendant de longues secondes et j'hésite.
Dois-je sauter maintenant ? Dois-je attendre ?
Un bruit attire son attention et il s'écrit :
- Aller Emme, on va pas y passer la nuit !
Je ne bouge pas, je devrais sauter, il sait que je suis dans les parages, mais mon instinct me dit d'attendre.
- Emme vient ici, qu'on en finisse ! Il ordonne alors que j'entends la colère et la haine qu'il crache à ce moment. Ton copain est en train d'y passer, alors s'il te plaît, ne rends pas ça plus long.
Kay ? Je panique et commence à croire que c'est lui contre moi. Est-ce l'un de nous qui gagnera ? Non, ce n'est pas possible.
- Emme !...
Je ne réfléchis pas et saute.
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61 Hunger Games
FanfictionLes 61ème Hunger Games Choisi lors de sa dernière année, Emme Carter originaire du district 7 comprend rapidement que les jeux pourraient être une porte de sortie. Mais entre amitié et prise de conscience, elle va rapidement découvrir que la victoi...